Une idée géniale ? "LE REVENU DE BASE".

Prochain rendez-vous, sur POLITOSCOPE TV :
Émission en direct sur le site, le lundi 20 mai 2013, de 9h à 12h

Venez nombreux commenter et poser vos questions en direct sur le chat :slight_smile:

Avec :

Yoland Bresson (association AIRE / pour le Revenu de base universel)

Étienne Chouard (Le Plan C pour une Constitution d’origine Citoyenne, avec les « Gentils Virus »)

Bernard Friot (association Réseau Salariat / pour le Salaire à vie)

Bernard Stiegler (association Ars Industrialis, philosophe)

La réorganisation du travail

Qu’on se le dise ! :slight_smile:

Étienne.

Oublié de signaler cette traduction du [bgcolor=#FFFF99]texte séminal [b]sur le revenu de base[/b] : [url=http://lanredec.free.fr/polis/agjustice_tr.html][b]Justice Agraire[/b][/url] de [b]Thomas Paine[/b] (1795).[/bgcolor]
"Mais la terre dans son état naturel, comme je l'ai dit, n'est capable de nourrir qu'un petit nombre d'habitants comparé à ce qu'elle est capable de faire dans un état cultivé. Et comme il est impossible de séparer l'amélioration faite par l'agriculture de la terre elle-même, sur laquelle cette amélioration est faite, l'idée de propriété foncière a résulté de cette moralité [b]mais il est néanmoins vrai, que c'est la valeur de l'amélioration, seulement, et pas la terre elle-même, qui est la propriété individuelle."[/b]

Chaque propriétaire, donc, de terre cultivée, doit à la communauté une redevance foncière (car je ne connais pas de meilleur terme pour exprimer l’idée) pour la terre qu’il détient; …" CQFD

Passage lumineux de Bernard Friot à « Ce soir ou jamais », de ce 7 juin, qui donne toute la différence entre le salaire de base qu’il défend et l’arnaque du Revenu de base libéral qui est le faux-nez de l’abandon de toutes les prestations sociales. (intervention autour de 1h 10 sur la vidéo).

L’émission n’est plus disponible (seulement un extrait de 3min), mais du coup je suis allé faire un tour à droite à gauche pour voir ce qu’est le « salaire à vie » de Friot. Je m’étonne toujours que de mecs qui se prétendent penseurs, économistes ou autre aient oublié la raison première du travail salarié: la spécialisation. Alors certes, notre système actuel est bien dégénéré, et pas mal de gens occupent des emplois qui ne servent à rien, mais le problème aussi bien le salaire à vide que le revenue de base, c’est simplement qu’appliqués, ils dépeupleraient en un rien de temps en priorité les professions qui sont généralement les plus utiles, qui sont généralement mal rémunérées (en tout cas comparativement à leur indispensabilité).

Si un prof, comme Friot, décide de ne pas venir travailler toute une semaine, à peu près tout le monde s’en fout, ça n’a qu’un impact très mineur sur le fonctionnement de la société entière. Mais qu’un agriculteur décide de rester chez lui au moment où il faudrait récolter, c’est des tonnes de nourriture de perdues. Bon, après, c’est vrai, comme il est mis sous pression par la grande distribution qui fixe les prix au lieu que la loi de l’offre et de la demande s’applique, et qu’en plus une bonne partie des récoltes fini à la poubelle, l’impact final de l’inactivité d’un seul agriculteur est complètement négligeable. Sauf que c’est un métier très pénible, qui génère énormément de stress, et que si on offrait aux agriculteurs les moyens de conserver leur niveau de vie à peu près intact, mais sans avoir à travailler, sans stress et sans responsabilité, la production s’écroulerait de manière extrêmement sensible cette fois-ci.

Le travail utile est affreusement mal rémunéré, c’est un fait. Mais permettre l’oisiveté totale et éternelle sans impact catastrophique sur le niveau de vie, sauf pour ceux qui, à la base, sont motivés par l’aisance matérielle, voire la richesse, ça n’est simplement pas possible. Pas mal de gens n’aiment pas leur travail, ou leurs conditions de travail. C’est un problème. Il n’empêche en attendant qu’ils remplissent une fonction, même si c’est avec une efficacité modeste à cause du stress et du mécontentement. Si cette fonction n’était plus remplie du tout, soit un collègue capable de le remplacer aurait une surcharge de travail, donc plus de stress, donc encore plus de raison d’abandonner son poste, soit la machinerie se grippe purement et simplement, et derrière une dizaine d’autres personnes se retrouvent en chômage technique, et ça peut faire boule de neige jusqu’à ce que la plus grande partie de l’économie soit rétamée.

Le schéma de base de la spécialisation, c’est le village (et sa campagne) de 100-200 personnes. Il y a un ferron/forgeron, un charron/maréchal-ferrand, un potier, un menuisier/charpentier, un maçon, un menier/boulanger, et quantité de familles de paysans avec leurs paysannes et leurs enfants. Le village est, pour simplifier, autonome. Le forgeron fabrique des outils pour tout le monde, le charron s’occupe des chevaux et des charrettes pour permettre des déplacements beaucoup plus rapides, le potier fait de la vaisselle et des pots pour tout le monde, le menuisier des meubles et des toitures, le maçon monte les murs, le boulanger fait le pain, et les paysans s’assurent que tout le monde est bien nourri, en contrepartie de quoi ils ont des maisons solides et durables, des outils performants, des transports de qualité, du bon pain, et de la vaisselle en bon état. Tout le monde est gagnant. Mais qu’un maillon de ce système en échange mutuel perpétuel lâche, et d’un seul coup le niveau de vie va chuter pour tout le monde. Pas tout de suite, car tout est très durable, mais si la situation se prolonge pendant plusieurs années, le manque devient très sensible.

Notre économie actuelle est hyper-spécialisée, et il y a énormément de maillons dont la mise en défaut pourrait avoir des conséquences incalculables sur le niveau de vie. Très vite, on repasserait en économie de la rareté, car beaucoup de gens ne consentiraient à bouger leur cul et à effectivement faire leur boulot que pour une rémunération excessive. J’imagine bien le plombier appelé en urgence qui demande déjà 300E avant même toute intervention, et qui en cas de refus jette: "De toute façon je m’en fous, j’ai pas besoin de ça pour vivre. Amuse-toi bien avec ta canalisation éclatée par le gel, bonhomme! ". Quoi, c’est mesquin? Mais on s’en tape, quand on peut se le permettre! A un moment, il faut quand même revenir sur terre: si on est là aujourd’hui, c’est parce qu’il y a derrière nous une longue succession d’individus qui ont réussi à survivre et à se reproduire, éventuellement en diminuant les chances de survie et de reproduction de leurs contemporains.

Alors celui qui aura absolument besoin que sa canalisation éclatée par le gel soit réparée, bah il sera obligé de cracher. Et à la fin du mois, tout son pognon en plus (SàV ou RdB) sera en fait parti dans les poches de gens malhonnêtes mais suffisamment malins pour tirer profit de la situation. Ne travailleront comme avant que les gens déjà bien et très bien payés, pour qui cet apport supplémentaire ne sera pas significatif. Mais ces gens-là sont soit peu utiles, soit déjà sur-payés. Enormément de pauvres et de modestes, et même beaucoup d’employés verront une réelle opportunité de cesser d’aller au travail, ou en tout cas de réduire significativement leur activité. Certes ils se consacreront peut-être à d’autres activités marginalement utiles socialement, mais en attendant, beaucoup de tâches réellement nécessaires, elles, ne seront plus accomplies, ou alors très en dessous de ce qui est requis pour la préservation de l’économie mais surtout du niveau de vie global.

Ce qui ne poserait pas de problème de ce genre, ce serait un SàV de 250-300E. Ca augmenterait le pouvoir d’achat des pauvres et modestes, qui le plus souvent achètent sur place, donc des rentrées de TVA, de la reprise économique, mais pas de tentation de quitter son poste, sauf pour les contrats à temps partiel déjà tout pourris, qui servent de variable d’ajustement au patronat. Par contre, financer ça… ça pourrait éventuellement se faire en taxant en particulier les flux financiers et les patrimoines élevés (mais on sait que ces gens-là sont comme des savonnettes: quand on essaye de les serrer, ils nous glissent des mains), en expurgeant un peu la fonction publique (sénateurs, députés, ministres inclus, sinon en premier lieu), en auditant la manière extrêmement peu efficace dont a été effectuée le décentralisation, et en envoyant Bruxelles se faire voir chez les Grecs (qui ont probablement plein de papouilles à leur faire, à n’en pas douter).

Ce qui pourrait être « amusant », ce serait de se doter de plans quinquennaux pesant sur les riches, du genre: "Vous, les plus de 10 millions d’euros de patrimoine, si d’ici cinq ans vous ne vous êtes pas arrangés pour que l’indice de Gini descende en dessous de 0.22 sans que la médiane des revenus ne bouge de l’inflation + la croissance +ou- 0.5%, on vous inflige une amende collective de 500 milliards d’euros à payer avant la fin de l’année fiscale, avec des pénalités de 5% par mois de retard, puis l’équivalent de 200 milliards de nationalisation EN PLUS par année de retard.

Chic mon ADSL fonctionne (en ce moment c’est un jour sur trois …)

Gotfried,

A Mexico, les égouts sont mal fichus et il y a quatre ou cinq scaphandriers qui plongent dans la merde pour permettre au reste du monde de vivre là sans souci.

Ils sont peu payés mais ils y vont parce que « il faut bien vivre ».

Avec le salaire à vie, il est probable qu’ils partiraient jardiner, ou jouer de la guitare.

Mais la personne au guichet de la banque ne serait pas plus vaillante, et qui sait, le directeur d’agence.

Ainsi donc le salaire à vie, du moins dans la psychologie actuelle, doit être assorti de primes alléchantes pour tous ceux qui ne se contentent pas du farniente.
[bgcolor=#FFFF99]Et j’imagine que la prime doit être beaucoup plus alléchante pour le plongeur de Mexico que pour le directeur d’agence d’une succursale de la société générale.
Ainsi donc le salaire à vie aura(it) pour effet de remettre les pendules à l’heure, c’est à dire de nous contraindre à accorder les primes les plus fortes à ceux qui transpirent, sont courbés sur la terre, respirent des vapeurs toxiques, j’en passe et des meilleures, alors que de nos jours les mieux rémunérés sont les manipulateurs de finance et les escrocs patentés et honorés.[/bgcolor]

Mais il y a quelque chose d’autre dans l’idée de revenu inconditionnel.
L’expérience de Tordmorden au présent, et au passé l’historique des peuples que nous avons assassinés, nous démontrent que nous sous estimons la pulsion contributive comme moteur psychanalytique de l’être. C’est complètement négligé du fait que nous sommes totalement engagés dans la civilisation de la carotte, qui nous fait marcher comme des ânes, mûs par nos désirs et sans conscience. Et cet engagement totalitaire, mais non dit, relègue l’acte gratuit au rang d’un bénévolat de musée, alors qu’il fait partie de notre psyché intrinsèque.
Celles des objections au revenu de base qui invoquent la paresse ne sont certes pas à négliger, mais elle ne doivent pas nous masquer le fait qu’ici se trouve le germe d’un vrai changement de paradigme. On nous bassine souvent avec le changement de paradigme, mais sans jamais développer, si bien que le changement de paradigme est souvent une arlésienne décorative, sans plus. Or il y a ici une vraie piste : passer du conditionnel au garanti, c’est pas rien …

J’ai donné sur le blog une définition du don acratopège qui peut aussi éclairer ces questions d’un jour original.

Je n’aborde pas celles des objections qui ne sont que comptables des sous, mais en bref, elles sont du même tonneau car elles sont conduites comme si le système monétaire (entre autres celui de l’argent-dette) restait inchangé.

(Il y a des réformes qui paraissent impossibles si on n’envisage pas les autres réformes qu’elles rendent nécessaires)

Gotfried (244) Tu dis :

« Le travail utile est affreusement mal rémunéré, c’est un fait. Mais permettre l’oisiveté totale et éternelle sans impact catastrophique sur le niveau de vie, sauf pour ceux qui, à la base, sont motivés par l’aisance matérielle, voire la richesse, ça n’est simplement pas possible. »

Ce que tu décris là, est exactement ce qu’il se passe à l’heure actuelle. Les 4 000 000 de chômeurs sont une permission obligatoire à l’oisiveté (mais surtout à la soumission et à l’indignité par le biais de la stigmatisation orchestrée par les puissants, et le relai du « peuple travailleur », trop heureux d’avoir enfin quelqu’un à dénigrer et à regarder aussi de haut malgrés sa condition merdique d’alcoolo en puissance, tout en restant dans le « consensus » de la bien-pensence généralisée).
Cette oisiveté déguisée par les pouvoir publics et leurs copains prédateurs, a un impact catastrophique sur le niveau de vie dans un premier temps des chômeurs, bien sur. Mais surtout des salariés eux-mêmes.
Salariés que l’on surexploitent et maintiens au silence et à la docilité (et j’emploie un vocabulaire mesuré …) par le couperet des ASSEDICS pour les plus chanceux et du RSA pour les loosers.

Le fameux « stress des agriculteurs » dont tu parles précédemment en étant un des multiples symptômes visibles …

L’oisiveté volontaire et non subit ne pourra, au pire, avoir que des résultats équivalents. Elle ne fera, en tout cas, certainement pas plus de dégâts que notre système actuel.

Je ne connais aucune personne capable de passer sa vie à ne rien foutre. (A part quelques alcoolos …)

@Ana

Excellent exemple, ces scaphandriers de Mexico. C’est effectivement un travail qui mériterait d’être fortement rémunéré. Si ce pays n’était pas gouverné par une mafia, ils pourraient probablement fonder un syndicat, communiquer avec le grand public, qui globalement peut comprendre leur situation, et organiser des grèves partielles ou totales afin de faire comprendre à tous, par les conséquences gravissimes de ce « déni de service », l’absolue nécessité de leur travail, et donc la légitimité de la revendication d’un plus haut salaire. Multiplier par 10 le salaire de quelques dizaines de scaphandriers sur une agglomération de plusieurs millions d’habitant, ça représente une hausse d’impôt (je suppose que c’est un service public?) absolument insignifiante.

Mais donne leur du jour au lendemain l’opportunité de recevoir quasiment la même rémunération que leur offre leur travail de scaphandrier, je pense que dans la demi-heure où ils apprennent la nouvelle ils abandonnent leur poste pour n’y plus jamais revenir. Je suppose que c’est un métier qui ne demande pas tellement de qualifications, ou du moins pour lequel la formation est rapide et peu coûteuse, du coup le nombre de « prétendants » qui pourraient les remplacer si jamais on offrait une prime serait important. Mais je peux me tromper, et si c’est un travail qui demande des mois, voire des années de formation et d’expérience, le remplacement des scaphandriers, indépendamment de toute considération de rémunération, serait problématique.

Par ailleurs, autant une lutte syndicale se fait à la vitesse des mécanismes sociaux, et répond à des logiques conscientes (les travailleurs décident quand commencer et quand arrêter la grève, et l’ampleur à lui donner), autant cette désertion de poste permise, voire entraînée par l’instauration d’une rémunération suffisante inconditionnelle fait sentir ses effets (donc les égouts qui refoulent) de manière extrêmement brutale, rapide, et étendue. Si les rémunérateurs (publics ou privés) ne réagissent pas extrêmement vite, si la prime n’est pas instaurée au plus tard deux ou trois jours après, la réparation des dégâts causés devient de plus en plus difficile, gourmande en main d’oeuvre, et coûteuse.

L’apport nutritionnel conseillé pour un individu adulte de sexe masculin est de 2600kcal (on le prend pour une journée de 8h de travail). Le pouvoir énergétique d’un litre d’essence est d’environ 35.5 MJ, soit environ 8500kcal. Un litre d’essence peut donc « travailler » comme environ 26h de travail humain. A 9.40E de l’heure de travail salarié, un litre d’essence vaut environ 240E. On la paye environ 1.45E le litre. Certains estiment que c’est de là que vient notre irresponsabilité environnementale, énergétique, etc. C’est comme si on avait tous des dizaines d’esclaves. Jancovici, qui a une argumentation très solide, propose pour résoudre tout un tas de problèmes de progressivement multiplier arbitrairement (c’est à dire avec des taxes) le prix de l’essence: on serait forcé de fabriquer des voitures beaucoup plus économiques, d’apprendre à prendre les transports en commun, de produire et d’acheter local, etc. On me dira que ça n’a rien à voir. Si. C’est que si on multiplie brutalement par 3, 4, 6 le budget hydrocarbures des particuliers et des entreprises, le seul effet sera des faillites en masse, des ruptures de chaînes d’approvisionnement, et une augmentation générale catastrophique des prix.

Avec les abandons de postes dus à l’instauration d’un revenu inconditionnel, ce serait exactement pareil. Parce qu’on ne peut pas instaurer des primes sur un nombre très significatif d’emplois sans revoir entièrement le budget des entreprises et des institutions publiques. On ne peut pas « impunément » multiplier la masse salariale par 3, 4, 6 (dans certains secteurs d’activité à haute pénibilité, haut risque, ou haute responsabilité, mais responsabilité dans le vrai sens, car une semaine de grève des scaphandriers de Mexico provoque des dégâts beaucoup plus graves qu’une semaine de « grève » de quelques PDG qui n’encourent aucune sanction même quand ils ont lamentablement foiré la mission que les actionnaires et le CA leur avait confié). La trésorerie des entreprises n’est pas une boîte magique dont l’on peut sortir du pognon comme par magie.

C’est bien beau de parler de changement de paradigme et tout ça, mais on ne peut pas rêver le monde de demain avec des petits bonhommes lego idéaux. L’homme est ce qu’il est, et même si effectivement le don peut avoir une place importante dans notre psyché, l’arbitre des conditions de vie de l’immense majorité de l’humanité, c’est le cash qu’on a en poche ou le solde du compte en banque. Ce n’est pas tant que l’humain est paresseux, c’est qu’il cherche à rendre plus « efficace » sa survie, sinon sa vie. Si, pour vivre décemment, il doit travailler 8h par jour, et qu’en ne travaillant que 4h par semaine il vit dans de mauvaises conditions, il sera porté à travailler 8h par jour, ou dans ces eaux là. Si maintenant il peut vivre décemment en travaillant 0h par semaine, même s’il vivrait un peu mieux en travaillant disons 20h par semaine, il aura tendance à peu travailler, parce que les efforts fournis en plus ne sont pas « rentables ». C’est comme la différence entre le couteau à huîtres made in China à 4E (la lame en mauvais inox, mitres creuses, mauvais ajustages), et le couteau à huîtres fait en France à 18E (lame en bon acier, mitres pleines, ajustages précis): pour un prix 350% plus élevé, on a pas 350% de couteau à huître en plus. Donc la majorité des gens achètent celui à 4E, parce qu’il suffit à faire ce qu’on lui demande, et que ce que l’autre a en plus ne justifie pas le prix beaucoup plus élevé. Le cerveau humain fonctionne comme ça, ce sont des centaines de millénaires d’évolution qui nous ont conduit là.

@Patrick Flécheux

Et tu sais ce que ça fait 4 millions de personnes sans aucun revenu? 3 millions de mendiants dans les rues, 850.000 délinquants, et 150.000 criminels. Ca arrange beaucoup les puissants que pour 400 à 1000E par mois, tout ce monde se tienne tranquille et garde la société « propre ». Ca rend l’exploitation vachement moins palpable, et ça supprime presque la misère, source de trop de problèmes. Cependant, la « stigmatisation », on s’en tape un peu. D’ailleurs, c’est plus un fantasme qu’autre chose. Parce que dans la vraie vie, personne ne perd ses amis en devenant chômeur, il n’y a pas dans les transports en commun des compartiments « spécial chômeurs » sans sièges et qu’on ne lave jamais, il n’y a pas non plus d’escalier de service pour les chômeurs, afin qu’ils ne prennent pas l’escalier principal, il n’y a pas de loi interdisant aux chômeurs de se marier avec des personnes salariées, ou leur imposant le port d’un signe distinctif. A la limite, les blondes sont plus stigmatisées dans la vraie vie que les chômeurs.

Cependant, je partage le diagnostic de la pression à la fois sur les travailleurs et sur les chômeurs que permet le chômage (à la fois la situation de chômage, et l’allocation de chômage, inférieure à la paye). Cependant, le solution n’est pas d’abolir l’emploi, mais bien le chômage. C’est une lutte de type syndicale qui est nécessaire. Comme qui dirait, il faut que la peur change de camps, c’est à dire que les travailleurs aient les moyens de se faire respecter, et de voir leurs revendications aboutir. Et le travailleur sait qu’il peut être blessé, qu’il peut perdre son emploi, qu’il vieillit, d’ailleurs tel ami est blessé, tel ami a perdu son emploi, et tel parent est à la retraite. C’est donc pour ses proches et pour lui-même qu’il mène la lutte. La société a besoin que tout un tas de postes soient pourvus afin que des tâches soient effectuées, et le patronat, qui vit du profit, s’arrange pour que ce soit fait de manière efficace, il faut lui reconnaître cette responsabilité et cette utilité. Mais afin de ne pas être exploités, les travailleurs, qui sont les médiateurs du profit patronal, doivent avoir conscience de leur devoir de résister aux abus. Les puissances s’équilibrent, les travailleurs veillent à n’être pas trop exploités, et à la fin, le boulot est fait, ce qui sert la société toute entière car ça permet l’élévation progressive du niveau de vie.

Mais qu’on retire la contrainte de travailler, et le boulot n’est plus fait. Dans certains domaines, ce n’est pas forcément critique, mais dans beaucoup de secteurs, en dessous d’un certain seuil (et plus on s’en rapproche plus ceux qui restent pour assurer l’exécution des objectifs doivent trimer), c’est juste la rupture: la quantité de travail dépassent les capacités, le retard s’accumule, s’accumule, jusqu’à ce que le besoin ne soit plus satisfait (70% de satisfaction du besoin: crise sérieuse, 30% de satisfaction du besoin: crise majeure, conséquences désastreuses).
Alors tout le monde ne passera pas sa vie à rien foutre, mais que 10% des effectifs quittent pour toujours, 30% travaillent à 30%, 45% à 60%, et 15% à 90%, ce que j’appellerais une hypothèse optimiste, et la capacité de travail en temps est de seulement 50%. Mettons, comme c’est l’hypothèse optimiste, que la productivité est cependant augmentée de 30%, parce que les travailleurs sont contents, etc… ça ne fait tout de même que 64% de la capacité de travail initiale.
Mon hypothèse réaliste, c’est 20% d’abandon total, 25% à 20%, 30% à 40%, 20% à 60%, 5% à 90%, soit 34% de la capacité de travail initiale, avec une productivité inchangée (entre ceux qui restent travailler « beaucoup » et sont sérieux, et ceux qui viennent surtout pour s’occuper et voir du monde, sans plus craindre d’être licencié donc sans contrainte de productivité, j’estime que ça devrait s’équilibrer à peu près, mais à la limite envisager une productivité inférieure serait légitime).
A Wall Street, c’est pas gênant, mais dans quantité d’endroit, être en sous-capacité de 30 à 60%, et éventuellement pour des durées de plusieurs mois, voire années, je te laisse imaginer les conséquences que ça aura.

L’argument, c’est qu’une partie de ce temps libéré sera passé en travail socialement utile… une partie peut-être, oui, et ça se sera bien. Mais on a peut-être plus besoin du contrôleur aérien dans sa tour de contrôle pour éviter des centaines de morts que dans une maison de retraite à apprendre au petits vieux à faire des animaux en cure-pipes, et on a peut-être plus besoin de l’agriculteur aux commandes de son tracteur pour nourrir la population qu’à donner des cours gratuits au Louvre sur l’emploi des pigments d’origine minérale dans la peinture flamande du XVe siècle. L’épanouissement personnel c’est bien mignon, mais servir la société, c’est aussi accomplir efficacement le travail pour lequel on a été formé, car dans la plupart des cas il répond à un besoin réel et aide au maintien d’un niveau de vie général dont tous nous profitons.

Tout ça serait vrai si la productivité était constante et si les besoins de base n’étaient pas satisfaits. Or comparons avec le Moyen-âge :

  • La productivité y était infiniment plus faible ; 165 fois dites vous (240E/1.45E) ? peut être ; possible : il faut 1 jour de boulot par hectare de blé, il fallait un temps plein pour cultiver un hectare.
  • Les besoins y étaient déjà raisonnablement satisfaits puisqu’on n’y travaillait que 200 jours par an (plus de 150 jours fériés), seulement à la lumière du soleil (donc moins de 6 heures par jour en hiver), et qu’on trouvait du temps pour des occupations inutiles comme construire des cathédrales à la force des bras et faire la guerre avec les voisins quatre jours par semaine (private joke inside, nlescan si vous me lisez).
    Autant dire qu’une « sous capacité de 30 à 60% » c’est très loin de m’affoler.

Et la « productivité » continue à augmenter. Je mets des guillemets parce que je ne sais pas le mesurer à part par la contrepartie financière (ce que vous appelez le « niveau de vie ») de chaque heure de travail.

Trois solutions:

  • Augmenter les soi-disant besoins (téléphone portable, voyages en avion, etc) par la propagande, la manipulation, ou la contrainte. Difficilement compatible avec une vision démocratique de la société.
  • Diminuer la qualité de la production pour obliger le consommateur à consommer plus (exemple des toilettes à chasse d’eau obligatoires qui privent l’individu d’un compost de haute qualité et obligent à construire des stations d’épuration coûteuses et inefficaces … et obligent les scaphandriers mexicains à barboter dans la merde). Comme depuis Lavoisier on sait qu’il n’y a pas de production, seulement de la transformation, et que depuis Carnot on sait que l’entropie augmente inexorablement, c’est parfaitement incompatible avec une vision durable de l’économie.
  • Admettre que le plein emploi est un concept du temps jadis. Avec une alternative : soit on y retourne (au temps jadis), soit on y renonce (au plein emploi).
    (Pour une analyse un peu plus sérieuse voir par exemple André Gorz et l’évolution de son point de vue)

Il y a confusion sur ce que j’entends par « niveau de vie ». Pour moi, et c’est vrai que ce n’est pas la définition généralement admise, le niveau de vie, c’est vraiment « le niveau de vie » Peut importe qu’on gagne 35 tonnes d’or par jour, si on a pas de voiture, pas de médecin, pas d’hôpital, pas d’artisans ou d’industries, pas d’eau courante, pas de chauffage, pas de savon, pas de contraception, bref, qu’on vit au Moyen Age (ou dans le tiers monde), c’est que le niveau de vie est bas. Concrètement, c’est que tout demande beaucoup plus de planification, beaucoup plus d’effort, et quand bien même on serait au taquet chaque minute d’éveil, aucun effort individuel, dans un système faiblement spécialisé, ne permet de contrer sérieusement les accidents, les maladies, de réduire la vulnérabilité aux aléas climatiques, etc. C’est la spécialisation qui permet un niveau de vie élevé pour un grand nombre de personnes. Le challenge, c’est d’améliorer le niveau de vie sans détériorer la qualité du lien social, voire en l’améliorant, et c’est là où notre civilisation actuelle pèche.

Rapide retour sur la comparaison avec le Moyen Age (ou n’importe quelle autre époque avant le milieu du XIXe siècle environ):
-la spécialisation est assez peu développée, l’immense majorité de la main d’oeuvre est attachée à remplir le besoin en nourriture. Aujourd’hui, en France, il y a environ un demi million d’agriculteurs pour environ 28.5 millions d’actifs, et une population de 63 millions d’habitants. Cette simple statistique rend accessible l’immensité du bouleversement dans la structure de la production qui s’est opéré.
-les besoins étaient relativement bien satisfaits… si on estime que la mortalité infantile, la mortalité en couche, la mortalité due aux accidents et maladies, et la mortalité due à la famine et à la misère n’exigent pas des solutions pour être diminuées. A titre indicatif, on estime qu’au XVIIIe siècle, un nouveau-né sur trois mourrait avant d’atteindre son premier anniversaire, et que la mortalité maternelle s’élevait aux environs de 11 décès (de la mère) pour 1000 naissances. Personnellement, ça ne me fait pas vraiment rêver. La santé est un besoin relativement récent, mais que seul une société où la spécialisation est assez poussée permet de remplir.
-c’est plus anecdotique, mais aussi bien la construction (des cathédrales, entre autres) que la guerre étaient des métiers à part entière, pas des « passe-temps » des paysans ou des artisans. L’organisation des métiers « artisanaux » en corporations était un des traits particulièrement intéressant de l’époque médiévale (et même moderne). Ces corporations, qui avaient quelque chose du syndicat (bien que de nature éminemment conservatiste, il ne s’agit pas de le passer sous silence), en même temps qu’elles jouaient un rôle de perpétuation de l’exploitation (des maîtres sur les apprentis et les ouvriers) organisaient en même temps une certaine défense des droits de ces derniers. Dans les chartes des corporations, on lit souvent l’interdiction de (faire) travailler à la bougie la nuit tombée, l’interdiction de (faire) travailler le dimanche, et pendant les fêtes chômées, etc. En contrepartie de quoi, le travail était difficile, et le « licenciement » à la pure discrétion du maître (ou parfois de sa veuve). Les paysans n’avaient pas la vie beaucoup plus paisible, eux devant se charger, en plus de toutes les tâches de leur état, de l’entretien des chemins et talus et autres possessions seigneuriales (et oui, à l’époque la DDE, c’était Jean-Jean, et ça s’appelait la corvée), et « arrondissant les fins de mois » en hiver ou en allant travailler dans d’autres régions, ou en produisant de l’artisanat vernaculaire (vannerie, etc). Je ne sais pas bien d’où viennent ces « 150 jours fériés » par an, mais je serais curieux de savoir comment ça a été établi, et surtout la portée qu’a ce chiffre. Menfin, on s’en fout, ce n’est pas ce qui nous intéresse aujourd’hui.

A mon sens, au contraire, le plein emploi, c’est à dire que toute personne capable de travailler ait un travail et soit rémunérée pour son travail, c’est un aspect important de la reconnaissance par la société de l’utilité d’une personne, et donc de la dignité. Personnellement, si on pouvait restructurer nos modes de production (de biens ou de services), et sans rien toucher à la satisfaction des besoin et au niveau de vie général, passer de contrats de 35h à des contrats de 20h, mais au plein emploi, je ne vois absolument pas ce qui pourrait poser problème. Je ne dis pas qu’il est important que les gens passent du temps au travail, mais qu’ils aient une contrainte afin qu’ils accomplissent ce que la société attend d’eux. Certes, un des problèmes c’est que la satisfaction du besoin est laissée majoritairement entre les mains du privé, sans supervision publique guidée par l’intérêt général, ce qui fait qu’on emploie des gens à ne rien faire (ou à défaire ce que d’autres font), alors que des activités importantes sont mal gérées, délaissées ou trop mal rémunérées. Il faut réfléchir à diminuer ces effets délétères, mais un revenu inconditionnel n’est pas la solution, au contraire.

Soit ça (plein emploi, lutte syndicale, etc), soit il faut carrément abolir l’argent pour passer de force et sous la contrainte à une société du don, par nature non-comptable, et qui finira probablement avec un niveau de spécialisation proche de celui d’un village pyrénéen au Ve siècle. Les gens sont attachés à un certain confort matériel, c’est un fait. C’est bien d’envisager des réponses novatrices aux problèmes dont les gens se plaignent, mais il faut quand même garder les pieds sur terre et partir du réel et de l’actuel. Un jour peut-être l’humanité sera comme la population de la Planète Verte (du film La Belle Verte), mais on ne le fera pas arriver. On ne passe que d’état d’imperfection en état d’imperfection, sans être aucunement capable de dire si l’on s’approche ou si l’on s’éloigne de la perfection, puisque chacun en a son idée.

Les luttes syndicales dans un monde d’égoïstes totalement dépolitisé ? Je n’y crois plus depuis longtemps. Avec le RDB plus besoin de syndicats dans leurs formes actuelles, ni des vendus qui les diriges. Les grands patrons n’aillant plus les mêmes pouvoirs sur les gens.

Une solution possible pour combler un éventuel déficit de production pour les tâches indispensables ?

1/ Le partage (quelques jours ou semaines/an selon les besoins du moment) des tâches indispensables à la vie collective et ne demandant pas de compétence particulière (les emplois). Partage accompagné d’un très bon salaire - en complément du RDB - pour les tâches les plus pénibles que personne ne veut faire.

Après tout, je ne vois pas pourquoi nous devrions faire ramasser notre merde par les autres et/ou produire quantité de choses que l’on ne veut pas pour soi-même.

2/ Afin de n’imposer aucune obligation de fait. Mais de conserver une certaine rigueur dans les productions utiles et indispensables, on peut jouer sur le gros défaut des hommes, à savoir « l’envie ».
En limitant, par exemple, l’accès à certains biens de consommations (non indispensables à la vie) aux gens qui ne voudraient pas participer à ces actions collectives - salariées ou associatives - de partage des tâches utiles. (Par exemple, si l’ont ne participe pas à l’effort collectif, l’impossibilité de prendre l’avion ou le TGV - train normal obligatoire, ou l’impossibilité d’acheter une voiture de plus de 5cv, un écran plat ou des produits de luxes. La liste, bien que non exaustive, pourrait-être assez motivante pour beaucoup …)

Après tout une Vraie Démocratie est un monde peuplé d’adultes. Et le propre d’un adulte n’est-il pas d’assumer les conséquences de ses choix ?

Les syndicats reconnaissent de fait la subordination du travailleur à l’investisseur (étatique ou privé). Ils négocient les modalités de cette subordination sans de nos jours la contester. Sont dans la droite ligne de l’article 23 de la DUDH qui par inadvertance pérennise cette subordination, au niveau « universel » et mondial.

L’article 23 de la DUDH

Il dit ceci :

[i]"Article 23

"1. Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage.

"2. Tous ont droit, sans aucune discrimination, à un salaire égal pour un travail égal.

"3. Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable et satisfaisante lui assurant ainsi qu’à sa famille une existence conforme à la dignité humaine et complétée, s’il y a lieu, par tous autres moyens de protection sociale.

« 4. Toute personne a le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts. » [/i]

Je ne vois pas ce qui dans cette disposition serait dû à « une inadvertance qui pérenniserait la subordination du travailleur à l’investisseur ». Si en disant « investisseur » on vise le capitaliste, je crois qu’il y a maldonne : cette disposition de la DUDH me semble applicable sans aucune modification dans un contexte non capitaliste (collectiviste ou communiste, voire anarchiste). J’imagine d’ailleurs que cet article est probablement dû pour une bonne part à une initiative des pays du bloc soviétique, qui se préoccupaient assez peu des investisseurs.

Quels changements Ana Sailland voudrait-elle apporter à cet article pour en éliminer toute trace de subordination travailleur-investisseur (employeur-employé ?), et comment redéfinirait-elle la fonction des syndicats ? JR

« Je ne vois pas » > Hélas

C'est la spécialisation qui permet un niveau de vie élevé pour un grand nombre de personnes.
Jusqu'à un certain point. Passer 40 années de sa vie à serrer le même boulon est un niveau de vie (puisque vous récusez avec raison la définition économiste du niveau de vie) que je trouve moins élevé que celui d'un forgeron médiéval (ou même de l'époque de mes grands-parents).
Le challenge, c'est d'améliorer le niveau de vie sans détériorer la qualité du lien social, voire en l'améliorant, et c'est là où notre civilisation actuelle pèche.
Oui, le niveau de vie au sens du développement personnel passe, entre autres, par le lien social.
Rapide retour sur la comparaison avec le Moyen Age (ou n'importe quelle autre époque avant le milieu du XIXe siècle environ): -la spécialisation est assez peu développée, l'immense majorité de la main d'oeuvre est attachée à remplir le besoin en nourriture. Aujourd'hui, en France, il y a environ un demi million d'agriculteurs pour environ 28.5 millions d'actifs, et une population de 63 millions d'habitants. Cette simple statistique rend accessible l'immensité du bouleversement dans la structure de la production qui s'est opéré.
Oui, c'est exactement ce que j'ai écrit.
-les besoins étaient relativement bien satisfaits... si on estime que la mortalité infantile, la mortalité en couche, la mortalité due aux accidents et maladies, et la mortalité due à la famine et à la misère n'exigent pas des solutions pour être diminuées. A titre indicatif, on estime qu'au XVIIIe siècle, un nouveau-né sur trois mourrait avant d'atteindre son premier anniversaire, et que la mortalité maternelle s'élevait aux environs de 11 décès (de la mère) pour 1000 naissances. Personnellement, ça ne me fait pas vraiment rêver.
Moi non plus. Mais il se trouve que la condition humaine c'est de mourir. Et si ce n'est pas de déshydratation ou d'hémorragie (l'essentiel de ce que vous évoquez), finalement des morts relativement douces (si la mort peut être douce), c'est de cancer, de maladies cardio-vasculaires ou d'Alzheimer. Et personnellement ça ne me fait pas rêver non plus.
La santé est un besoin relativement récent, mais que seul une société où la spécialisation est assez poussée permet de remplir.
La "santé" n'est pas un "besoin". Et savez vous que l'archéologie montre que les populations de chasseurs-cueilleurs étaient en bien meilleure santé que les populations d'agriculteurs sédentaires. Que l'essentiel des maladies infectieuses est la conséquence de la sédentarisation et de la domestication. Alors bien sûr, encore plus de sédentarisation et de spécialisation aide à les contenir (en en créant d'autres), mais rien n'est simple.
-c'est plus anecdotique, mais aussi bien la construction (des cathédrales, entre autres) que la guerre étaient des métiers à part entière, pas des "passe-temps" des paysans ou des artisans.
Pas un passe-temps des artisans ou paysans (quoique dans les batailles le gros des troupes était quand même du petit peuple armé de faux et de fourches ; et les cathédrales ont bien été construites par des artisans : qui sinon ?), mais un passe temps de la société. Une société qui peut détourner tout le temps de travail d'une partie de la population à des tâches non productives, c'est, du point de vue macroscopique, équivalent à une société qui peut détourner une partie du temps de travail de toute la population à des tâches non productives.
A mon sens, au contraire, le plein emploi, c'est à dire que toute personne capable de travailler ait un travail et soit rémunérée pour son travail, c'est un aspect important de la reconnaissance par la société de l'utilité d'une personne, et donc de la dignité. Personnellement, si on pouvait restructurer nos modes de production (de biens ou de services), et sans rien toucher à la satisfaction des besoin et au niveau de vie général, passer de contrats de 35h à des contrats de 20h, mais au plein emploi, je ne vois absolument pas ce qui pourrait poser problème.
Bon, ça dépend de ce qu'on entend par travail. S'il ne s'agit que d'éviter que les gens se tournent les pouces et aient le temps de réfléchir, pas d'accord. S'il s'agit de faire en sorte que chacun soit utile, se sente utile, se sente respecté, etc, oui, bien sûr. Et pour ça, la spécialisation Tayloriste ou Fordiste, ça n'est pas l'idéal. Regardez autour de vous : celui qui est respecté par tout le monde c'est celui qui sait tout faire, pas celui qui travaille à plein temps à visser un écrou (ou à appuyer sur le bouton d'un tomodensitomètre). Ce qui m'amène aux 20 heures. Dans les boulots que je connais, même 35 heures ça n'est possible que par une forme ou une autre de Taylorisme. Donc je n'ai pas l'impression que la réduction du temps de travail soit une solution. Un des problèmes c'est la productivité, sa solution c'est, certes, moins de productivité, mais pas de cette façon. Je ne crois pas. L'idéologie du travail est récente à l'échelle de l'humanité, et même de l'histoire. On a longtemps fait sans, on peut de nouveau faire sans. Sans l'idéologie, pour le travail c'est autre chose.
un revenu inconditionnel n'est pas la solution, au contraire.
Oui ça n'est pas LA solution. Mais un certain niveau de revenu inconditionnel est un élément que l'évolution de l'économie rend utile et nécessaire tant d'un point de vue pratique que d'un point de vue éthique ou philosophique.
On ne passe que d'état d'imperfection en état d'imperfection, sans être aucunement capable de dire si l'on s'approche ou si l'on s'éloigne de la perfection, puisque chacun en a son idée.
Oui. Malheureusement ceux qui ont les moyens de faire passer leurs idées n'ont qu'une idée très vague de la vie (passée, présente et future) de 99% de l'humanité.
"Je ne vois pas" > Hélas
Ce n'est pas une réponse.

Tout le monde n’est pas clairvoyant et n’a pas votre agilité d’esprit.

Peut-on vous demander d’expliquer ?

Suis-je le seul à n’avoir pas compris ? JR

Cet article fait l’apologie du travail salarié en 2 et 3, donc subordonné … Je pense que c’est cela que Ana voulait pointer. Elle infirmera si je me trompe :slight_smile:

Ceci dit tant que le salariat reste la norme d’exploitation dominante, cet article ne me choque pas plus que ça.

@Patrick :

Merci de cette explication.

Sur le paragraphe 2 :

Le salaire est la « rémunération d’un travail effectué par un employé pour le compte d’un employeur en vertu d’un contrat de travail » (Petit Larousse 2013). Notez que l’employeur peut être l’État ou une collectivité de citoyens aussi bien qu’une entreprise ou un individu. Le président de la République, les députés sont des salariés au même titre que l’infirmière, l’éboueur ou le professeur de faculté.

Qu’est-ce qu’on peut avoir contre le « travail salarié » et par quoi veut-on le remplacer ? Par du travail non salarié ou du travail excluant toute hiérarchie ? Allons, allons !

Remarquez bien aussi que cette question n’a rien à voir avec celle du revenu de base.

Sur le paragraphe 3 :

Sa simple lecture (« 3. Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable et satisfaisante lui assurant ainsi qu’à sa famille une existence conforme à la dignité humaine et complétée, s’il y a lieu, par tous autres moyens de protection sociale. ») montre que l’idée de subordination n’entre pas en jeu ici. La rémunération, c’est le prix d’un travail ou d’un service rendu.

Comment faudrait-il reformuler cette clause dans le sens supposément voulu par Ana (on pourrait aussi la supprimer, notez) ?

Devrait-on considérer que le travail lui-même équivaut à la subordination ? JR

« Ceci dit tant que le salariat reste la norme d’exploitation dominante, cet article ne me choque pas plus que ça. » >>> Le problème est qu’étant inscrit dans un texte intitulé " déclaration universelle des droits de l’humain", déclaré urbi et orbi comme la direction idéale du chemin à suivre par l’espèce humaine, il institue, si nous ne sommes pas attentifs, et pour les siècles des siècles, l’obligation pour celui qui désire survivre et faire vivre sa famille, l’obligation de rechercher un travail salarié. Bon oui, on m’objectera qu’il peut être artisan, ou patron, … ou toucher des indemnités de chômage :wink: Mais comprenons que ce texte ferme la porte aux autres philosophies de la synergie humaine, et place le contractuel au centre du futur.
Il n’y a par ailleurs rien sur l’éthique associée à un emploi dont on peut difficilement se passer. Autre sujet …

Jacques, comme à mon habitude, j’ai été abrupte.Ceci est accentué par le fait que mon ADSL se coupe trois jours avant que je puisse approfondir/éditer :wink: Alors voici plus étoffé : Il faut dire que je ne me vois pas rerédiger cet article 23 en le laissant dans un contexte global qui mériterait une attention critique bienveillante mais sans pitié. En plus la DUDH joue un peu le rôle de préambule à plein de constitutions, alors qu’elle n’a pas été écrite de manière démocratique. Ni même conformément au schéma représentatif → Pas envie d’apporter de l’eau à ce type de moulin. Bien que j’ai de l’estime pour les rédacteurs de 1948, ça va de soi.

Il y a plusieurs sujets mélangés dans le même article (23)

-Le droit à la subsistance

-Le droit de contribuer

-Le devoir de contribuer

-Le statut du contributeur

-Le concept de salaire

-Le droit syndical (qui si je ne m’abuse reconnaît une guerre, et ne la conteste pas ! entre pourvoyeur et demandeur d’emploi)

ça fait beaucoup en quelques lignes, non ? Et le subliminal s’y glisse aisément.

Et il est clair que dans le contexte du présent polylogue ( « revenu de base » ) on ne peut pas accepter cette fusion des sujets, inhibitrice de l’imaginaire.

Les syndicats reconnaissent de fait la subordination du travailleur à l'investisseur (étatique ou privé).
Je trouve ça faux. Les syndicats sont avant tout des travailleurs confrontés a la REALITE qui se regroupent pour se défendre. Ils ne s'agit pas de reconnaître ou pas, il s'agit de faire face a une situation.
Ils négocient les modalités de cette subordination sans de nos jours la contester.
Pareil tu généralise grave, les syndicats ne disent pas tous la même chose, quand la CNT organise des débats avec Friot ce n'est pas laCFDT en train de signer l'ANI.
Sont dans la droite ligne de l'article 23 de la DUDH qui par inadvertance pérennise cette subordination, au niveau "universel" et mondial.
Non franchement sur ce coup la je ne suis pas d'accord, c'est super tiré par les cheveux. Tu dis que des dispositions destinées a protéger les travailleurs dans le cadre EXISTANT du capitalisme pérennisent leur subordination. Ça ne marche pas ton truc.