Projet de refonte de la constitution de 1958 par 1789plus.org

Comptes de campagne de l’élection présidentielle de 2007 : dispositions pertinentes de l’avant-projet

Le Conseil constitutionnel vient d’invalider les comptes de campagne du candidat aux élections présidentielles de 2007, alors président de la République en exercice.

Les dispositions de l’avant-projet présenté ici empêcheraient que la même situation se représente, cela moyennant deux séries de dispositions.

  1. Concernant l’exercice du pouvoir présidentiel :

[i]Article 51

  1. Le Président de la République est élu pour sept ans au suffrage universel direct […].

  2. Le Président de la République exerce son mandat au nom de tous les citoyens. Ses fonctions sont incompatibles avec l’exercice d’autres mandats publics, activités professionnelles ou activités assimilées, rémunérés ou non, sauf dans les conditions prévues par la loi organique.

Il s’abstient dans l’exercice de ses fonctions de toute activité politique partisane.[/i]

  1. Concernant le non-renouvellement du mandat présidentiel :

[i]Article 52

[…] 2. Le mandat présidentiel n’est pas renouvelable consécutivement […].[/i]

Ces deux articles auraient pour conséquence 1) que le rôle apolitique du président de la République lui interdirait de toute façon de faire campagne pour lui-même ou pour un parti politique tant qu’il est en exercice, et 2) que de toute façon il n’aurait pas à faire campagne pour sa réélection. JR

Fête nationale française/fête nationale norvégienne

Sur un nouveau fil « Norvège » lanredec vient de poster le message suivant, qui concerne aussi, un peu indirectement il est vrai, le présent avant-projet de constitution :

Anecdote :

Ma petite fille (3 ans) est sans doute un des plus jeunes Français à avoir eu un cours d’éducation civique sur la fête nationale française et la révolution française.

Cela s’est déroulé au jardin d’enfants d’une bourgade norvégienne. La semaine précédant leur fête nationale (17 mai) avait été consacrée à celle ci. La semaine suivante aux fêtes nationales des enfants étrangers de la classe. Une quinzaine de petits Norvégiens et autres de 3 à 5 ans ont donc pu comparer le déroulement et la raison d’être des fêtes nationales norvégienne, française, indonésienne, brésilienne, et je ne sais plus quoi. Et colorier leurs différents drapeaux.

L’intérêt de cette anecdote est de me donner l’occasion de rappeler que la fête nationale norvégienne ne commémore pas une révolution, une fête de la fédération, une indépendance, ni même, comme la Fête de la Race espagnole, la découverte de l’Amérique. Non. Dans le moindre village les Norvégiens descendent dans la rue par tous les temps, vêtus de leurs plus beaux atours, la plupart du temps traditionnels, pour célébrer leur constitution. Et ne comprennent pas le rapport qu’il peut y avoir entre un défilé militaire, ou toute autre forme de spectacle patriotique, et une fête nationale.


Je ne vois pas en quoi il serait préférable de commémorer une constitution plutôt que les grands mouvements populaires de libération (1789), de fraternité (1790) et plus tard la splendide résistance des armées de volontaires aux agresseurs réactionnaires européens (1793). Après tout, ce sont ces mouvements-là qui ont directement rendu possibles la plupart des constitutions démocratiques modernes, y compris (si mes souvenirs sont exacts) la constitution norvégienne de 1814.

Le défilé militaire a sa place dans la commémoration du 14 juillet, ce qui ne veut pas dire que la fête nationale se réduise au défilé présidé à Paris par le président de la République : partout en France il y a aussi les bals popu, l’accordéon, les banquets, le souvenir de la prise de la Bastille et de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789…

Peut-être serait-il bon d’expliquer aux élèves norvégiens (si vraiment on ne l’a pas fait) que l’armée, dans un régime démocratique, n’est rien d’autre que le peuple armé, et que le défilé militaire du 14 juillet a surtout pour but de manifester et d’encourager cette identification salutaire de l’armée au peuple. De toute façon, les enfants de trois ans ont certainement beaucoup plus de mal à comprendre l’intérêt de la constitution que celui des défilés militaires : là, au moins, il y a la musique. Rousseau, je crois, aurait été de mon avis.

Ces considérations n’excluent pas de modifier le défilé du 14 juillet en le rendant moins militaire. JR

Le « nouveau » fil Norvège créé par gilles date de mai 2012, celui-ci de mai 2013.

Je n’ai pas dit qu’il serait mieux de ceci ou de cela. Il me paraissait juste intéressant de rappeler sur un forum consacré à la constitution qu’il existe des gens qui, à la fois collectivement (puisque c’est une fête nationale) et individuellement (puisque ce jour là il y a environ 100% de la population dans la rue à agiter des drapeaux en criant hurrah), considèrent ce sujet comme le plus important de ce qui constitue leur nation. Mais je respecte même ceux qui considèrent que ce qui constitue leur nation est fondé sur la découverte de l’Amérique, bien que je réprouve l’idée.

A l’époque où vous avez quitté la France il y avait certes encore ce que vous dites. De nos jours il existe encore peut être quelques endroits de ce genre, en particulier, c’est vrai, les consulats de France. Mais ce que je vois de ce côté ci de l’Eurasie, c’est plutôt une journée de bronzette à la plage terminée par un zouli feu d’artifice, et bien sûr une démonstration de force façon Armée Rouge à la télé.

Les Norvégiens savent bien, et mieux que les Français, « que l’armée, dans un régime démocratique, n’est rien d’autre que le peuple armé ». Leur fusil d’assaut, dans leur placard, le leur rappelle tous les jours. Et leur rappelle qu’en 1940 la Norvège n’a pas capitulé (le roi a pris le maquis et quand il est parti pour Londres avec le gouvernement et le gros des forces armées, le prince héritier est resté diriger la résistance). Mais pour eux un spectacle ne fait pas une fête, et national ne veut pas dire patriotique.

Quant aux enfants de trois ans … celle que je connais le mieux n’a pas trouvé la fête nationale norvégienne triste, bien au contraire. Je ne manquerai pas de lui demander ce qu’elle a pensé de la française puisqu’elle était en région parisienne ce WE.

Je n’avais pas remarqué que le fil « Norvège » avait été créé par Gilles l’année dernière déjà. Il m’excusera.

Le peuple armé, ce n’est pas un fusil dans un placard : c’est le peuple se formant en armée.

Une correction, si je puis : en 1940 la France n’a pas capitulé, elle a conclu un armistice. Par contre, les Allemands et les Japonais, eux, ont bien capitulé en 1945. En 1918, les Allemands avaient eux aussi conclu un armistice.

Du reste, j’approuve le gouvernement norvégien de n’avoir ni capitulé ni conclu d’armistice, même si le résultat est que la Norvège a passé quatre ans ou cinq ans sous un ReichsKommissar puis un gouvernement collaborationniste encore plus marqué que le régime de Pétain.

Enfin, notez que je n’ai pas « quitté la France ». La France est beaucoup plus que son territoire ; d’ailleurs, son territoire, je le parcours régulièrement au moins autant que le Français moyen et me tiens pour aussi bien informé que lui de ce qui s’y passe. JR

Le peuple armé, ce n'est pas un fusil dans un placard : c'est le peuple se formant en armée.
Je ne parlais pas de la chasse à l'élan mais bien de leur service militaire à la mode suisse (principale différence : les femmes aussi). Vous êtes d'humeur facétieuse ces temps ci.
Une correction, si je puis : en 1940 la France n'a pas [i]capitulé[/i]
:lol: Aussi ne l'ai je pas affirmé. Si vous avez cru le lire il y a peut être une raison.
un gouvernement collaborationniste
Collaborationniste, oui, et même national-socialiste, mais gouvernement, seulement pour la forme et seulement pour le Reich : aucun autre pays ne l'a reconnu et ses pouvoirs étaient limités à la répression de la résistance. Terboven a gardé le pouvoir effectif jusqu'en 45. Pour comprendre ce contexte il est utile de savoir qu'il y avait en Norvège 1 soldat allemand pour 10 civils norvégiens (pour comparaison, en France, 1 Allemand pour 1000 Français selon Paxton, 1 pour 100 selon Laborie - 1 pour 50 après le débarquement).

Mais nous nous éloignons encore plus du présent avant-projet de constitution.

lanredec :

  1. Je suis partisan du service civique obligatoire comportant un volet militaire (tant que nous aurons une armée), et un volet social et sportif (pour développer l’esprit de solidarité et les facultés corporelles et accessoirement servir d’exutoire aux surplus d’énergie physique).

  2. Vous n’avez pas affirmé que la France a capitulé en 1940 mais c’est l’idée que sous-entendait votre parallèle avec la Norvège, comme vous n’en doutez pas vous-même un seul instant.

C’était la raison de ma petite mise au point terminologique. Toutefois, il n’y a dans mon esprit aucune différence pratique entre les capitulations allemande et japonaise de 1945 et la demande d’armistice française de 1940 : en 1940 nous avons été battus à plate-couture exactement comme les Allemands et les Japonais l’ont été en 1945.

Pourtant, à la différence des Allemands et des Japonais, nous continuons d’en subir en 2013 les séquelles psychologiques et pratiques : c’est que, à la différence des Allemands et des Japonais, nous descendions géopolitiquement de très haut et de très loin, d’où une chute plus dure et une blessure civilisationnelle beaucoup plus profonde, dont la cicatrisation n’est pas encore terminée.

Les effets pratiques de 1940 continuent notamment de se manifester dans nos relations difficiles avec les pays anglosaxons, dans la réputation de prétentions injustifiées qu’a généralement la France (à tort ou à raison) à l’étranger, notamment dans ces pays-là (d’où les réactions outrancières des Américains face à notre position dans l’affaire iraqienne), et surtout dans le recul très net de la langue française en tant que langue internationale, même si dans l’absolu le français se maintient bien et si ses perspectives d’avenir, principalement grâce à l’Afrique et aux Africains, sont plutôt roses.

Ils se font également sentir dans nos propres crispations : par exemple quand nous nous opposons mécaniquement à l’usage circonstanciel et contrôlé d’autres langues que le français dans les universités et grandes écoles françaises (en oubliant au passage que l’université française n’a jamais autant brillé que lorsque l’enseignement y était donné en latin).

La guérison définitive du traumatisme de 1940 tient à la mise en place d’une grande Union européenne solidaire et efficace qui intégrera les valeurs de la France avec celles de ses autres membres.

(Incidemment, lanredec, ce sont là des considérations que les Français qui n’ont jamais vécu en dehors de leur bulle franco-française ont souvent du mal à prendre en compte, d’où les appels simplistes au retrait de l’eurozone ou de l’Union européenne : mais notez bien que je n’affirme pas que vous n’avez jamais vécu en dehors de la bulle franco-française).

  1. Les digressions sont une excellente chose, surtout si (comme celles-ci) elles touchent un peu, indirectement, au sujet du fil ; spécifiquement, aux projets d’article sur les pouvoirs exceptionnels. JR

Intéressante analyse historico-politique. Mais vous faites l’impasse sur le fait que les Français ont été des vaincus dans le camp des vainqueurs, ce qui explique, à mon avis, beaucoup mieux la blessure et les relations difficiles qu’une hypothétique supériorité (géopolitique ou autre) pré-1939.

Sur l’Europe, encore une fois je suis d’accord sur votre formulation. Mais dans le cadre d’une abrogation de tous les traités existants et d’une négociation réellement démocratique entre les vraies nations d’Europe. J’espère que vous m’accorderez que ceci n’est ni simple ni simpliste.

notez bien que je n'affirme pas
Je le note : vous nous évitez une autre digression. :D

« Vaincue dans le camp des vainqueurs », c’est en effet une composante de la donne psychologique mais pas la principale, puisque c’est aux Anglosaxons (aux Britanniques surtout) que la France doit d’avoir conservé une partie de son prestige international sous la forme d’un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU malgré 1940.

J’admets volontiers que votre proposition de la table rase n’est pas une proposition simpliste. Elle est seulement très incommode : en effet, pourquoi ne pas modifier ce qui existe dans le sens souhaitable plutôt que de tout démolir et de recommencer à zéro ? Si, comme je le crois, le seul référendum du 29 mai 2005 a coûté 500 millions d’euros au Français simplement pour l’impression et la distribution des documents référendaires, combien coûteraient inutilement aux Européens les opérations de détricotage suivies d’un retricotage ? Au contraire, il faut tâcher de recycler ce qu’il y a de bon dans le passé. JR

Parce que les États-nations qui constituent l’Organisation de Bruxelles sont le premier obstacle à ce que vous appelez de vos vœux.

& parck : Le futur n’a pas de prix :wink:

Le futur a un prix, le présent aussi et le passé également : c’est le coût des efforts inutiles (voire nuisibles). JR

Oui, contentons nous des efforts utiles : casser le soutien inévitable des États-nations (actuels et en construction) à la lutte de la finance internationale contre les 99% (« La lutte des classes existe, c’est vrai, mais c’est ma classe, la classe des riches, qui fait la guerre, et qui gagne » W. Buffett) en cassant la fiction de leur légitimité et de celle des marionnettes qui les « dirigent ».

Une base de réflexion : la Déclaration Radicale.

Modification de l’avant-projet d’article [53b*] : possibilité de révocation du premier ministre par le président de la République

Je me propose de modifier l’avant-projet d’article [53b] comme suit (passage souligné) :

"[i]Article 53

Le Président de la République :

"a) préside le Conseil des ministres. Il peut se faire remplacer dans cette fonction par le Premier ministre ou un autre membre du Gouvernement ;

« b) nomme le Premier ministre, reçoit sa démission et peut mettre fin à ses fonctions sauf opposition de l’Assemblée nationale à la majorité absolue de ses membres […][/i] »

Cette modification a pour objet de permettre au président de la République, veilleur institutionnel (à qui l’avant-projet interdirait par ailleurs d’exercer toute fonction gouvernementale), de mettre fin à une éventuelle situation de blocage parlementaire tenant par exemple à la personnalité du premier ministre, pourvu que la majorité absolue des députés composant officiellement l’Assemblée n’y fasse pas objection.

Les cas visés sont ceux notamment qui ne se prêtent pas au vote d’une motion de censure faute d’une majorité absolue de députés favorables à la motion.

L’Assemblée nationale devrait approuver le programme du gouvernement dirigé par le nouveau premier ministre dans les conditions ordinaires. Elle conserverait bien sûr la possibilité de mettre fin à tout moment par une motion de censure aux fonctions du premier ministre en place. JR


*Voir sous http://www.1789plus.org/autres%20ressources/Const.%201958%20ProjRévJR29052013PUBLIC1.htm

À propos du RIC : comparaison des dispositions du présent avant-projet avec la proposition de loi Dupont-Aignan du 12 juillet dernier

La proposition de loi de Nicolas Dupont-Aignan (signalée par pparent sur un autre fil : < http://www.assemblee-nationale.fr/14/propositions/pion1248.asp >) est ainsi conçue :

[i]"PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article 1er

Le premier alinéa de l’article 3 de la Constitution du 4 octobre 1958 est ainsi rédigé : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum, soit à l’initiative du Président de la République, soit à la demande de 10 % des citoyens inscrits sur les listes électorales. »

Article 2

Une loi organique fixe les modalités d’organisation de ce référendum d’initiative citoyenne."
[/i]
Cette proposition de loi est à comparer avec le texte que j’ai proposé ici dans mon message 159 plus haut :

[i]"Section B
"L’initiative citoyenne

"Article 10

"1. L’initiative citoyenne peut porter sur les objets suivants :

"a) dépôt au Parlement d’une proposition de loi constitutionnelle, organique ou ordinaire nouvelle ou modifiant ou abrogeant une loi existante ;

"b) dépôt d’un projet d’arrêté au Conseil municipal ou au Conseil régional ;

"c) opposition à une proposition de loi parlementaire ou à un projet de loi gouvernemental en cours d’examen au Parlement, ou à une proposition ou un projet d’arrêté communal ou régional ;

"d) destitution du Président de la République en application de l’article [58] de la Constitution ;

"e) association de communes ;

"f) rappel d’un élu par voie d’élection spéciale.

  1. L’initiative citoyenne au niveau national se déroule comme suit :

"a) Un comité de proposition de cinquante électeurs inscrits sur les listes électorales publie la proposition correspondante par le canal du système officiel de cyberconsultation et de cybervote visé à l’article [12] de la Constitution ;

"b) Le comité de proposition a trois mois à compter de la publication pour recueillir par la même voie les acceptations de dix pour cent au moins des électeurs inscrits;

"Le seuil d’acceptation est porté à vingt pour cent au moins, s’agissant d’une proposition de loi, si dans ledit délai de trois mois le Conseil constitutionnel a déclaré la proposition non conforme à la Constitution ;

"c) Le comité de proposition soumet les acceptations requises au Conseil constitutionnel, qui a quinze jours pour statuer sur leur validité ;

"d) Après que les acceptations sont reconnues valides :

"– S’il s’agit d’une proposition de loi, celle-ci est déposée à l’Assemblée nationale pour examen et adoption du texte proposé et, le cas échéant, établissement d’un contreprojet parlementaire à soumettre au référendum avec la proposition initiale ;

"– Dans les autres cas, la proposition est soumise au référendum.

« 3. La loi organique précise les modalités d’application du présent article, en particulier s’agissant de la procédure d’initiative citoyenne aux niveaux communal et régional. »

"Section C
"Le référendum

"Article 11

"1. Le référendum, national ou local, se rattache à une initiative citoyenne hormis les cas prévus par la Constitution.

"2. Les décisions référendaires sont acquises à la majorité des votes exprimés (le vote blanc comptant comme vote exprimé) pourvu que la majorité des électeurs inscrits aient participé au référendum.

"S’agissant d’une proposition de loi que le Conseil constitutionnel aurait jugée non conforme à la Constitution, les votes exprimés en faveur de la proposition doivent représenter la majorité des électeurs inscrits.

« 3. Les décisions référendaires une fois adoptées ne sont pas passibles du contrôle constitutionnel. »
[/i]

Outre que le présent avant-projet est beaucoup plus large et précis que le projet Saint-Aignan, il y a entre les deux une différence essentielle : dans le projet Saint-Aignan, le président de la République conserverait l’initiative référendaire, alors que dans le présent avant-projet, hormis les cas spécifiquement prévus par la constitution, l’initiative référendaire serait toujours d’initiative citoyenne : je rejoins sur ce point l’analyse d’Yvan Bachaud (Mouvement RIC) selon laquelle tout référendum émanant d’autres que des citoyens eux-mêmes appelle forcément une réponse faussée.

Par contre, je suis d’accord avec Dupont-Aignan (et donc pas avec pparent, ni avec Yvan Bachaud) concernant le seuil de 10 % pour la soumission au référendum d’une proposition de loi citoyenne.

Ce seuil de 10 %, déjà utilisé dans la constitution de l’an I (1793) pour la révision de la constitution, me semble être un minimum (aussi l’avant-projet prévoit-il que si le Conseil constitutionnel a jugé la proposition citoyenne inconstitutionnelle, c’est 20 % et non plus seulement 10 % des citoyens qui devront avoir accepté que cette proposition soit soumise au référendum).

À mon avis, une proposition qui ne recueillerait pas d’emblée et très rapidement 10 % d’avis favorables de l’ensemble des citoyens ne mériterait pas qu’on dérange tous les citoyens pour voter référendairement à son sujet, surtout considérant que les dépenses entraînées par un référendum sont telles qu’il ne faudra (toujours à mon avis) en organiser que si la représentation nationale ne peut pas régler la question elle-même (notamment en reprenant à son compte une proposition citoyenne qu’elle jugera justifiée). Il faut partir du principe que le RIC est fait pour remédier à une déficience du mécanisme parlementaire ou jugée telle, rien d’autre, et que cette procédure aura toujours un caractère extraordinaire.

Une grande différence entre les deux projets est que dans la proposition Dupont-Aignan il n’est question que de référendum, alors qu’à mon avis la question déborde largement cet aspect de procédure : il ne s’agit pas de répondre par oui ou par non à n’importe quelle proposition formulée abruptement par un groupe quelconque de citoyens, mais bien de donner le temps au public de débattre à fond d’une proposition qui ne sera jugée digne d’être soumise au référendum que si les proposants initiaux sont en nombre substantiel, de faire examiner dans tous les cas cette proposition par le Parlement pour qu’il l’adopte ou sinon qu’il dise pourquoi et fasse éventuellement une contreproposition, de sorte que le peuple tout entier, s’il y a lieu (c’est-à-dire si le seuil des 10 ou 20 % est franchi et si le Parlement n’accepte pas la proposition), puisse se prononcer référendairement en pleine connaissance de cause. Tel est, en gros, le système utilisé en Suisse dans le cadre de l’« initiative populaire » ; il semble qu’il donne satisfaction, sauf que le seuil d’acceptation initial retenu en Suisse (voir à ce sujet < http://www.1789plus.org/autres%20ressources/Initiative%20populaire%20en%20Suisse-JR%20150111-141012Pub.htm >) est évidemment trop bas puisque jusqu’à présent neuf propositions sur 10 présentées au référendum sont rejetées. JR

D’accord avec vous sur la différence de qualité entre votre proposition et celle de Dupont-Aignan (Saint-Aignan est mort en 58 … 1858 :wink: )

Tel est, en gros, le système utilisé en Suisse dans le cadre de l'"initiative populaire" ; il semble qu'il donne satisfaction, sauf que le seuil d'acceptation initial retenu en Suisse (voir à ce sujet < http://www.1789plus.org/autres%20ressources/Initiative%20populaire%20en%20Suisse-JR%20150111-141012Pub.htm >) est évidemment trop bas puisque jusqu'à présent neuf propositions sur 10 présentées au référendum sont rejetées. JR
Là par contre je ne vous suis pas. Pour au moins deux raisons :

Premièrement, un résultat négatif est aussi signifiant qu’un résultat positif (en sciences ce sont même les seules expériences qui échouent qui permettent de progresser). Même si ce résultat ne se traduit pas dans la législation, le fait que l’initiative populaire « pour une limitation du nombre annuel des naturalisations » ait été rejetée (par exemple) est infiniment plus signifiant (au niveau de l’attitude ultérieure de la population, des partis, de la presse, et du gouvernement) que si elle n’avait pas eu lieu.

Deuxièmement, le fait que peu d’initiatives populaires soient pertinentes (si on considère qu’une initiative rejetée n’est automatiquement pas pertinente) traduit, à mon sens, essentiellement le fait que l’assemblée fédérale fait son boulot et que les lois pertinentes sont déjà votées à ce niveau. Une des raisons pour lesquelles c’est le cas est peut être justement l’existence de la procédure d’initiative populaire ET SURTOUT la facilité avec laquelle elle peut être initiée. Les députés sont en permanence sous la pression du peuple (voir en France le nombre de propositions de lois pertinentes et auxquelles les Français sont favorables qui s’enlisent néanmoins, ou peut être ipso facto, dans les méandres des commissions).

L’utilité de la procédure référendaire comme instrument du débat public et comme moyen de contrôle du pouvoir législatif est évidente même quand la réponse est négative, et c’est bien pour cela que l’avant-projet 1789plus.org donne toute sa place à l’initiative citoyenne.

Je continue cependant de penser que le chiffre de neuf rejets sur 10 propositions (cas suisse) est révalateur d’une seuil d’acceptation initiale (obligeant à organiser le référendum) beaucoup trop bas, surtout – c’est à vérifier – s’il s’agit de rejet « secs » (qui n’aboutissent pas à une modification des lois correspondantes).

Il vaut mieux fixer un seuil d’acceptation initial élevé qui permettra éventuellement au mécanisme du débat public (avec participation du Parlement et des autres pouvoirs) de dégager en prenant le temps nécessaire pour réunir les acceptations une solution réfléchie et consensuelle sans avoir à organiser un référendum toujours coûteux.

J’ajoute que la procédure d’initiative citoyenne (débat + procédure d’acceptation initiale + référendum) nécessitera, pour être effective, de mettre en place le système de cyberconsultation fiable, anonyme et vérifiable également prévu dans l’avant-projet. JR

Aux référendums de 1988 et de 2000, la participation n’a pas atteint 40%. Pensez vous que le soutien à l’initiative aurait atteint 20% ? Pourtant dans le cas de 88, non seulement la question était pertinente, mais il n’était pas imaginable d’en faire l’économie.

J'ajoute que la procédure d'initiative citoyenne (débat + procédure d'acceptation initiale + référendum) [bgcolor=#CCFFFF]nécessitera[/bgcolor], pour être effective, de mettre en place le système de cyberconsultation fiable, anonyme et vérifiable également [bgcolor=#CCFFFF]prévu dans l'avant-projet[/bgcolor]. JR
Soit c'est nécessaire parce qu'il n'existe pas d'autre façon de faire, et alors inutile de le préciser dans la constitution. L'exécutif qui mettra la procédure en œuvre sera bien obligé "de mettre en place le système de cyberconsultation etc."

[bgcolor=#00CCFF]Soit vous estimez que toutes les autres possibilités, y compris celles que vous ne connaissez pas (et moi non plus, par exemple parce qu’elles seront inventées la semaine prochaine), ne vous plaisent pas pour une raison X ou Y. Mais ça serait sympa d’expliciter cette raison.[/bgcolor] Et la raison pour laquelle la loi, même organique, n’est pas adaptée pour spécifier ce détail de mise en œuvre.

À mon avis, si on se donne le temps de la réflexion et du débat publics (je ne suis pas sûr que cette condition ait été remplie dans les cas des référendums dont vous parlez), il est fort possible en effet que très peu de propositions franchissent un seuil d’acceptation initiale de 20 % ou même de 10 %. Je dirais même : c’est à espérer, car cela prouverait soit que les institutions représentatives sont aptes à prendre en compte à temps et dans de bonnes conditions les intentions qui sous-tendent les propositions, soit que la majorité des électeurs n’estiment pas a priori qu’il y ait lieu à référendum, et donc on évite un référendum inutile et toujours coûteux. (J’ajoute que les référendums périodiques me semblent une mauvaise idée : le rôle des référendums n’est pas de faire plaisir à ceux qui les proposent, mais de répondre à une utilité collective véritable – sur ce point, je ne partage pas l’avis d’Yvan Bachaud.

Incidemment : la faible participation aux référendums de 1988 et de 2000 ne serait-elle pas due aumoins en partie au fait que ces référendums avaient été déclenchés par le pouvoir exécutif et non par les citoyens ?

Je pense que des propositions évidentes (que nos représentants, pour des raisons non moins évidentes, ont ou auraient du mal à adopter) franchiraient très vite le cap des 10 ou même 20 % d’acceptations initiales nécessaires : par exemple, une proposition citoyenne tendant au non-cumul et à la non-reconduction des mandats électoraux, ou à la suppression de la disposition constitutionnelle habilitant les anciens présidents de la République à siéger au Conseil constitutionnel.

Même des propositions plus conjecturales, comme celle d’instituer un organisme citoyen de contrôle des pouvoirs dont les organes seraient composés par tirage au sort, ou encore de collégialiser les candidatures électorales par adjonction au candidat en titre de coadjuteurs bénévoles désignés par tirage au sort, devraient, à mon avis, passer le seuil d’acceptation initiale dans des délais assez courts.

Quant à mentionner le système de cyberconsultation dans la constitution, c’est nécessaire selon moi pour éviter qu’une loi organique en cote mal taillée permette de traiter les propositions citoyennes par la voie classique du vote papier (l’aspect « coût » est curieusement très peu commenté, mais il est important). En l’inscrivant dans la constitution, on empêcherait que des lois organiques additionnelles et des lois ordinaires restrictives viennent gêner le développement effectif de l’initiative citoyenne. L’initiative citoyenne serait une innovation considérable de la constitution : il n’est pas irraisonnable de préciser dans la constitution même la forme qu’elle devra prendre, car c’est là un point majeur de l’organisation des pouvoirs publics.

Si vous voyez d’autres moyens pratiques de gérer l’initiative citoyenne que le système classique du vote papier et celui du cybervote, je suis prêt à en discuter.

De toute façon, quand les procédures de vote papier ont été mises au point, personne n’avait idée de la possibilité du cybervote : fallait-il pour cette raison s’abstenir de mettre en place la procédure classique ? JR

Souveraineté populaire/souveraineté nationale

L’avant-projet d’article [7] actuellement en ligne reprend pour l’essentiel la constitution actuelle et se lit ainsi :

[i]"1. La souveraineté nationale appartient indivisiblement au peuple.

"Aucune section du peuple, aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice.

« 2. Le suffrage est universel, égal et secret, et direct ou indirect selon ce que prévoit la Constitution. »[/i]

Entendons-nous sur les mots :

  1. La « souveraineté populaire » (souveraineté du peuple) signifie que la volonté de la majorité des citoyens, à tout moment, en tout domaine, doit l’emporter absolument.

  2. La « souveraineté nationale » (souveraineté de la nation) implique qu’au facteur majoritaire viennent s’ajouter des considérations tenant à la nature de la « nation ». La nation est le peuple (la collectivité des citoyens) plus le « vouloir vivre ensemble » des citoyens qui composent le peuple, sans distinction de majorité et de minorité. Sans la volonté de vivre ensemble, il n’y a pas de nation : seulement un État, et un peuple d’habitants qui (en régime démocratique) décide à la majorité des citoyens.

  3. Pour maintenir la volonté de vivre ensemble, on doit écarter l’arbitraire, qui peut être aussi le fait de la majorité. C’est pourquoi, dans le système de la souveraineté nationale, le peuple décide (à la majorité des citoyens) d’encadrer l’exercice de la souveraineté par des institutions telles que le Conseil constitutionnel et des tribunaux indépendants chargées de faire application de la loi aux cas particuliers et, surtout, adhère au principe de l’état de Droit (ou principe de non-arbitraire), ce qui lui évite de prendre sans équité et sans nécessité des mesures préjudiciables à une minorité.

  4. Mais c’est au peuple (à la majorité des citoyens) qu’il revient de trancher en dernier ressort (quitte à se tromper) : c’est donc bien à lui qu’appartient la souveraineté nationale, selon la formule constitutionnelle française traditionnelle, laquelle me semble à cet égard équilibrer parfaitement les notions de souveraineté populaire et de souveraineté nationale. JR

De toute façon, quand les procédures de vote papier ont été mises au point, personne n'avait idée de la possibilité du cybervote : fallait-il pour cette raison s'abstenir de mettre en place la procédure classique ? JR
C'est exactement ce que je dis : aucune des constitutions que j'ai lues ne mentionne aucun des mots "bulletin papier", "urne transparente", "assesseur", "décompte manuel des voix", etc. Ce qui n'a pas eu pour conséquence de généraliser le vote par acclamation. Pourquoi cet technique particulière et contingente devrait elle faire exception ?