3A1 Désignation des représentants politiques : élections (et avec quel mode de scrutin) ou tirage au sort ?

[b]Démocratie participative[/b]

Je voudrais soumettre à votre sagacité une description sommaire d’un système représentatif que j’ai élaboré il y a quelques années. C’est très schématique mais cela traduit un soucis de représentation de tous : le représentant porte la voix de tous…
De la démocratie participative


« Il est clair qu’il n’est pas envisageable de faire chaque citoyen prendre part directement aux affaires publiques. »

Souvent, quand on dit « il est clair » , il s’agit d’une croyance.
Elle doit être observée à la loupe :
D’où me vient elle ?
Qui m’a dit ça ?
Ai-je vraiment fait l’effort de l’étayer ?
Ai-je tenté d’imaginer autre chose ?

Faire suivre d’un donc appuyé l’énoncé d’une croyance, c’est prendre le risque d’ignorer la moitié de l’univers des possibles. En toute bonne foi.


« Un représentant représente une fraction de la population.
Il est élu au suffrage universel, à la majorité absolue.
Ce suffrage a pour unique but de le « choisir » dans la population. »

L’Histoire et le présent doivent nous faire craindre qu’il ne soit pas choisi « dans la population » mais dans un sous ensemble restreint ( oï oligoï ), les quelques uns qui on ne sait trop comment se retrouvent au devant de la scène.
En amont du suffrage, la face cachée de l’émergence des candidats potentiels est source de perversion et prépare secrètement le simulacre de la repérsentativité.
C’est clair hihi.

[b]Démocratie participative[/b]

Je voudrais soumettre à votre sagacité une description sommaire d’un système représentatif que j’ai élaboré il y a quelques années. C’est très schématique mais cela traduit un soucis de représentation de tous : le représentant porte la voix de tous…
De la démocratie participative


Mode de représentation
Si le représentant « porte le vote de ses électeurs proportionnellement aux choix qu’ils ont faits », il n’est qu’une urne, toutes les décisions sont des référendums, et il n’y a pas besoin de représentant.

Si pour la décision d on sait a priori que les possibilités sont d1, d2, d3, c’est que quelqu’un a déjà réfléchi à la question. L’exécutif comme aujourd’hui ? Les représentants ? Le peuple ? La réponse à cette question est en fait la clé qui définit tout le reste. On sait bien que l’exécutif et dans une moindre mesure les députés auront leur solution préférée disons d1, et qu’ils introduiront dans d2 et d3 des éléments qu’ils savent inacceptables…

Si c’est le peuple qui définit les possibilités, le représentant A arrivera avec les solutions d1, d2, le représentant B avec d4, d5, etc. Et ils auront alors un travail à faire : une synthèse. Et comme le représentant A était mandaté pour porter d1 et d2, s’il revient avec des synthèses par trop différentes de celles ci, il risque d’être révoqué.


Mais voilà : un représentant assez humble pour se contenter de porter la voix de sa circonscription en oubliant la sienne l’est peut être trop pour se présenter à son suffrage. Alors ? Tirage au sort ?

Le groupe, que représente monsieur X, s'exprime de la façon suivante :

t1% pour le choix d1, t2% pour le choix d2 et t3% pour le choix d3.

Monsieur X participe au vote de l’assemblée des représentants en portant le vote de ses électeurs proportionnellement aux choix qu’ils ont faits.

Il est impératif que les choix possibles pour la décision d soient les mêmes pour tous les groupes concernés par cette décision.


Bonjour Joël et merci pour cet effort utile. Comme Lanredec, je tique sur l’impératif de la limitation des choix possibles qui émaneront mécaniquement de la chambre des représentants qui pourront donc à nouveau corrompre le système.
Avec une assemblée tirée au sort - au moins en partie - on rompt le lien paradoxal qui existe aujourd’hui entre les rédacteurs de la loi et ses bénéficiaires.
Ce qui confirme que votre intérêt pour des mandats impératifs et révocables est partagé par l’essentiel des participants à ce forum et oriente l’essentiel de nos réflexions.

Souvent, quand on dit "il est clair" , il s'agit d'une croyance.
Cette formulation (il est clair) évite de s'attarder sur le bien fondé de la remarque. Elle évacue le débat sur ce point. Plus loin, on se rend compte que la formule proposée permet de "faire chaque citoyen prendre part directement aux affaires publiques" car ses représentants seraient tenus de consulter les citoyens qu'il représente avant tout choix et à respecter le souhait exprimé par ces citoyens.
L'Histoire et le présent doivent nous faire craindre qu'il ne soit pas choisi "dans la population" mais dans un sous ensemble restreint ( oï oligoï ), les quelques uns qui on ne sait trop comment se retrouvent au devant de la scène.
À vrai dire, peu importerait la "provenance" du représentant car il ne seraient "qu'une interface, un porte-parole, un intermédiaire entre l'assemblée et le peuple".
Si c'est le peuple qui définit les possibilités, le représentant A arrivera avec les solutions d1, d2, le représentant B avec d4, d5, etc. Et ils auront alors un travail à faire : une synthèse. Et comme le représentant A était mandaté pour porter d1 et d2, s'il revient avec des synthèses par trop différentes de celles ci, il risque d'être révoqué.
Un représentant de pourrait pas être révoqué s'il fait ce pour quoi il est mandaté. S'il revient avec des synthèses différentes que celles que sa circonscription défendent, il est dans son rôle d'interface. Il n'a donc pas à être révoqué. Mais la question de savoir qui fixe les alternatives à un choix est plus que pertinente et mérite d'être débattue.
Avec une assemblée tirée au sort - au moins en partie - on rompt le lien paradoxal qui existe aujourd'hui entre les rédacteurs de la loi et ses bénéficiaires.
Le problème que vous exposez n'est pas résolu par le tirage au sort. Si les alternatives à un choix sont définies par le peuple, que ses représentants soient élus ou qu'ils soient tirés au sort ne change rien.

La définition des alternatives à un choix devraient se faire de la façon suivante :

  1. Un problème est soulevé dans la société. Par qui ? Comment ? Il faudrait aussi approfondir la question. Mais il me semble que l’exécutif, le législatif, le judiciaire et le peuple doivent être en mesure de le faire.
  2. Le peuple réfléchit et fait des propositions de solutions localement (par circonscription). Ces propositions peuvent prendre la forme de pétitions par exemple.
  3. Les propositions sont soumises localement au peuple qui n’en retient que les plus pertinentes. Il y a un travail à faire sur la pertinence d’une proposition. Mais on peut considérer comme pertinente une proposition qui recueille un certain nombre de suffrages (seuil ?).
  4. Les représentants des circonscriptions confrontent leurs propositions à celles des autres en assemblée. L’assemblée peut alors synthétiser des propositions similaires de façon à présenter une liste d’alternatives identique à toutes les circonscriptions.
  5. Les circonscriptions se prononcent sur ces alternatives.

Chaque fois qu’il y aura un choix à faire, on pourra utiliser un vote de valeur qui me semble une idée intéressante pour nuancer ses choix.

Comme ça, l’idée me paraît bonne. Je doute de sa pérennité parce que un peu longue en l’état me semble-t-il mais elle a le mérite d’intégrer le peuple aux décisions. Maintenant, elle vient rejoindre l’épais tas de propositions pertinentes faites sur ce forum, propositions que nous aimerions tous voir soumises à débat.
Comment? est la question qui nous maintient encore dans la rêverie.

Souvent, quand on dit "il est clair" , il s'agit d'une croyance.
Cette formulation (il est clair) évite de s'attarder sur le bien fondé de la remarque. Elle évacue le débat sur ce point.
en effet
Maintenant, elle vient rejoindre l'épais tas de propositions pertinentes faites sur ce forum, propositions que nous aimerions tous voir soumises à débat. Comment? est la question qui nous maintient encore dans la rêverie.
Oh, je dirais volontiers que le débat a souvent eu lieu, parfois plusieurs fois, suite à l'irruption de nouveaux intervenants (tels que moi) longtemps après les débats initiaux... Comment sortir de la rêverie est une question qui m'intéresse :P J'ai commencé la pêche aux propositions déjà formulées, mais c'est LOOOOONG :/

Projet de jelise : à propos du tirage au sort et du mandat impératif

Des derniers messages publiés ici sur ce fil, jelise aura pu retirer l’impression que « l’essentiel des participants au Forum » s’est prononcé en faveur du mandat impératif et peut-être aussi du tirage au sort des « représentants », et que ces deux idées « orientent l’essentiel de nos réflexions ».

En fait, le mandat impératif et le tirage au sort ne sont que deux des multiples sujets traités sur ce forum, et sur les 785 participants inscrits (au 28 mars 2012) au Forum, moins de 10 (parmi lesquels, il est vrai, Étienne Chouard) se sont prononcés individuellement en faveur des deux mécanismes dont il s’agit.

Je considère pour ma part que le débat reste ouvert sur les deux questions en objet, jusqu’à ce qu’un vote formel ait eu lieu ou qu’Étienne en décide autrement.

Il convient de ne pas éclipser la position de la minorité. La mienne est la suivante :

– Le mandat impératif n’est pas conciliable avec les réalités et les exigences du système représentatif moderne (cela vaut pour les instructions programmatiques et a fortiori pour les instructions de vote) ;

– Le tirage au sort des gouvernants (membres des trois pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire) ne satisferait pas aux deux déclarations (la française et l’universelle) des droits fondamentaux concernant le libre choix de leurs représentants par les citoyens.

Par contre, je suis partisan du tirage au sort de contrôleurs citoyens des pouvoirs, et à ce sujet j’appelle l’attention de jelise sur le fil 55 du présent forum (proposition relative à la création dans le cadre d’une association loi de 1901 de comités civiques qui auraient pour mission d’exercer ce contrôle indépendamment de tout pouvoir constitutionnel et à tous les niveaux, et d’aider les citoyens à se servir des outils de la démocratie participative). JR

  1. Le dimanche 8 janvier 2006 à 17:50, par Jacques

    Bonjour,
    « Le tirage au sort ne me plaît pas.
    J’aime les campagnes éléctorales qui précèdent les élections. C’est un moment où on parle un peu d’autre chose que des chiens écrasés et de foot dans les médias. Un moment aussi où on parle enfin de politique en famille, ou avec les collègues. Ce sont des moments forts de la vie collective.
    Le tirage au sort, c’est la ‹ technocratisation › à outrance, l’abstention institutionnelle. Quel ennui !
    Nous avons besoin de raison, mais aussi de passion. »

je reprends ce post pour une raison simple, c’est qu’effectivement dans l’idée courante les choix ne se font qu’a ce moment précis des élections
Or une démocratie participative pourrait fort bien s’articuler par un choix populaire et un tirage au sort des élus qui auraient la charge de les réaliser.
Le débat concernant le choix aurait très certainement la même richesse que celui de nos élections, voir même plus, dans la mesure ou le peuple aurait réellement le sentiment de départager les avis par son choix, avis tous exprimés (dans la mesure du possible)
Cela sous entend bien sur d’organiser cette consultation popuplaire et les débats qui s’en suivront. Et la politique prendrait bien toutes ses lettres de noblesse, perdant la connotation de promesses pour devenir un choix réfléchi.

Le tirage au sort serait précisément la réappropriation de la politique par le peuple plutôt que de débattre périodiquement sur l’élection du représentant qui se transforme en maître dès qu’il est élu et ce jusqu’à la prochaine élection.
Le tirage au sort permettrait l’expression d’un maximum de sensibilités ce qui est impossible dans la dérive bi-partisane actuelle.
Le tirage au sort aurait une chance de revigorer la notion de nation, d’implication citoyenne et d’identité collective.
Le tirage au sort romprait avec 20 siècles de confiscation consentie de la destinée collective par quelques uns.
Le tirage au sort réhabiliterait la notion de travail désintéressé au service du plus grand nombre.
Il est indispensable d’utiliser le conditionnel tant pour assumer notre ignorance en la matière que pour rester vigilant quant aux potentielles dérives d’un tel usage en politique qui ne saurait s’épargner une certaine curée parmi les représentants politiques actuels.

2. Le dimanche 8 janvier 2006 à 17:50, par Jacques
Bonjour,
"Le tirage au sort ne me plaît pas.
J'aime les campagnes éléctorales qui précèdent les élections. C'est un moment où on parle un peu d'autre chose que des chiens écrasés et de foot dans les médias. Un moment aussi où on parle enfin de politique en famille, ou avec les collègues. Ce sont des moments forts de la vie collective.
Le tirage au sort, c'est la 'technocratisation' à outrance, l'abstention institutionnelle. Quel ennui !
Nous avons besoin de raison, mais aussi de passion."

je reprends ce post pour une raison simple, c’est qu’effectivement dans l’idée courante les choix ne se font qu’a ce moment précis des élections
Or une démocratie participative pourrait fort bien s’articuler par un choix populaire et un tirage au sort des élus qui auraient la charge de les réaliser.
Le débat concernant le choix aurait très certainement la même richesse que celui de nos élections, voir même plus, dans la mesure ou le peuple aurait réellement le sentiment de départager les avis par son choix, avis tous exprimés (dans la mesure du possible)
Cela sous entend bien sur d’organiser cette consultation popuplaire et les débats qui s’en suivront. Et la politique prendrait bien toutes ses lettres de noblesse, perdant la connotation de promesses pour devenir un choix réfléchi.


Le défaut de votre raisonnement c’est que vous semblez parler du peuple français comme s’il s’agissait de qqs centaines de personnes, mais nous sommes 45 millions à voter.
On n’utilise pas la représentation sans raison. Vous ne pouvez pas la supprimer et espérer que cela fonctionne.
Comme les innombrables personnes qui avant vous ont cru trouver dans la démocratie directe l’ultime solution vous vous heurtez encore au même point, passer des principes généraux à la réalité concrète qui tient compte de notre nombre et de l’étendue de notre territoire ( sur tous les continents quand on n’oublie pas les départements d’outre mer ).

Je débarque un peu sur ce fil de discussion sans avoir lu tout ce qui a été dit précédemment, alors je vous livre quelques réflexions (vite fait).

Un système politique, ça sert à produire des décisions qui se traduisent ensuite par des lois, des budgets…

Une idée forte que je trouve sur cette page est le tirage au sort de contrôleurs citoyens des pouvoirs: intuitivement, ça me paraît être un bon moyen pour la société d’avoir les moyens de déléguer à un nombre réduit de citoyens une responsabilité importante qu’ils seront en mesure d’exercer de manière indépendante, donc pertinente.

Un point qui me semble sous-estimé est que, dans la réalité quotidienne, la grande difficulté des élus est de définir les priorités: les problèmes sont en nombre illimité et les contraintes (techniques, temps, argent…) font qu’il n’est pas possible de tous les traiter. En pratique, aujourd’hui, faire parvenir un message à un député peut prendre plusieurs jours et obtenir la présence d’un maire à une réunion relève parfois de la mission impossible. Définir les priorités relève à la fois de critères « techniques » et politiques et est une phase cruciale dans le processus de décision.

Je continue sur ma lancée: l’absurdité du système actuel est de penser qu’un élu puisse jouer le rôle de décideur de tout.
Il y a des moments où on ne peut pas porter plusieurs casquettes à la fois, et mon métier (conseil) me montre bien que les élus sont demandeurs de démarches dans lesquelles, par un processus bien cadré et astucieusement animé, on arrive à construire une coopération entre différents acteurs d’un territoire (population, associations, acteurs économiques, organismes publics…) sur un projet en les mettant en mouvement vers un objectif partagé. Typiquement, il faut un comité de pilotage (les élus ou fonctionnaires clés) pour valider la progression du travail et trancher à la fin, et un groupe de travail, pour faire le boulot et élaborer les propositions. De mon point de vue, évidemment, on arrive à sortir des choses bien plus valables par ce genre de processus que si on suit des voies classiques; mais faut payer les consultants.

Alors, évidemment, quand je vois un président sur la pointe des pieds qui prétend tout décider, je vois bien que ça ne peut pas marcher et qu’on devrait rire de tant de vanité et de stupidité.

Et oui, un élu devrait plus s’assurer de la qualité des décisions (Comment ont-elles été produites ? A-t-on respecté les bonnes pratiques de décision ? La consultation a-t-elle été assez large ? La concertation s’est-elle bien passée ou subsiste-t-il encore des conflits non résolus ? La décision prise respecte-t-elle bien tous les critères ?) que de leur contenu (Est-ce que le nouveau bâtiment sera assez beau le jour de l’inauguration avec le député ? Est-ce que ce sont bien les entreprises des copains qui ont les marchés ? Est-ce que mon projet est assez grand pour passer à la télé ?).

Le seul petit problème est qu’il faut être fort et s’appuyer sur des gens solides pour affirmer un leadership politique, imposer un haut niveau de qualité des décisions et savoir s’interdire d’intervenir sur le contenu de ce que le processus de décision collectif a produit. Et malheureusement, bien trop souvent, nous ne choisissons pas des vrais leaders, mais des gens à l’ego vraiment trop gros.

Ben oui, c’est bien normal, ça: la règle de la politique comme celle du management est en général la suivante: on monte en marchant sur les autres et le politique ou le manageur a pour impératif de monter, sinon il ne réalisera pas son plan de carrière.

Le vrai leader, lui, ne cherche rien pour lui, mais pour les autres, et a pour objectif de réussir avec les autres dans ce qu’ils entreprennent ensemble. S’il monte, c’est avec l’appui des autres.

Les vrais leaders se sont faits rares ces derniers temps…

Bonjour à tous,

Je vous donne rapidement quelques nouvelles du front :

Nos deux prochains rendez-vous :

[bgcolor=#FFFF99]• Ce soir, 29 mars, à Pernes-Les-Fontaines (Vaucluse) :[/bgcolor]
http://local.attac.org/attac84/index.php/agenda/pernes-les-fontaines/217-e-chouard

[bgcolor=#FFFF99]• et demain soir, 30 mars, à Cannes :[/bgcolor]
http://cannes.ldh-france.org/spip.php?article117

Je vous propose de suivre le PLAN suivant :

Je voudrais montrer que la « crise » n’en est pas une : ce n’est pas un accident, c’est le terme d’un processus de prise de pouvoir par les plus riches.

Je compte commencer par rappeler que les peuples ont progressivement perdu le contrôle de la monnaie à partir de la création de la Banque d’Angleterre (1694), jusqu’à carrément interdire aux États de battre monnaie (art. 123 du TL).

Après avoir signalé le lien que je vois entre cette dépossession monétaire originelle et notre dépossession politique via des Constitutions qui n’en sont pas, je propose une solution (que je trouve originale et prometteuse) qui consiste à remettre d’abord à l’endroit les mots importants que les voleurs de pouvoir ont mis à l’envers (avec notre incroyable consentement) : démocratie, citoyen, suffrage universel, constitution, réforme.

Je prévois d’insister surtout sur le fait qu’il n’y a rien à attendre des hommes au pouvoir quant au contrôle des pouvoirs (à cause du conflit d’intérêts), et j’invite donc chacun à se réapproprier — personnellement et quotidiennement — le processus constituant, la cause des causes de nos impuissances politiques et donc, selon moi, la vraie cause des injustices sociales.


Au plaisir de vous y rencontrer :slight_smile:


Par ailleurs, si vous ne l’avez pas remarqué, Rue89 vient de publier un article sur mon travail, qui vous intéressera peut-être (les commentaires sont intéressants) :

[bgcolor=#FFFF99][b]Etienne Chouard n'est pas mort, il soigne les orphelins du « non »[/b][/bgcolor] Mathieu Deslandes | Journaliste Rue89

Les candidats à l’élection présidentielle draguent la « France du “non” ». En 2005, un homme avait été son porte-parole. Sept ans après, Etienne Chouard reste mobilisé.

Etienne Chouard, chez lui, en mars 2012 (Mathieu Deslandes/Rue89)

François Hollande et Nicolas Sarkozy sont d’accord au moins sur un point : pour l’emporter le 6 mai, il faut « réconcilier la France du “oui” et la France du “non” ». Ces deux camps dessinés en 1992 lors du référendum sur le traité de Maastricht et renforcés treize ans plus tard à l’occasion du référendum sur le traité constitutionnel européen.

En 2005, la « France du “non” » avait un héraut : Etienne Chouard. Un prof marseillais qui avait fait l’effort de décortiquer le projet de Constitution européenne avant de recenser toutes les raisons qu’il y avait de s’y opposer. Son blog était devenu un point de ralliement.

Sept ans après, Etienne Chouard reste une référence pour de nombreux « nonistes ». Ils le lisent, lui écrivent, l’invitent à prononcer des conférences. Depuis un an, cet émotif volubile aux faux airs de Guy Forget est en tournée permanente. Lyon, Montpellier, Nice, Gap, Paris, Bruxelles…

Un soir, il se produit dans une MJC ou un café citoyen ; le lendemain, dans une université ; la semaine suivante, dans une antenne d’Attac ou chez des militants mi-écolos mi-« indignés ». « On est quelquefois 15, quelquefois 200. En général, on est autour de 80. » Ça peut durer cinq, six, sept heures. Refaire le monde est un marathon.
« Je fais comme Hippocrate »

L’invitation est souvent lancée par « des vieux militants qui se battent contre les injustices sociales depuis trente ou quarante ans ». Ils « se sont rendu compte que ça ne changeait rien mais reprennent espoir quand ils m’entendent, parce que je leur apporte une lumière ».

A tous, cet athée de 55 ans révèle que « nos malheurs » (la catastrophe écologique, la destruction des services publics, l’exploitation au travail, le règne de l’argent…) ont été rendus possibles « à cause de notre impuissance à résister ». Il indique :

« Je fais comme Hippocrate. Je cherche à remonter la cause des causes. Il est vain de s’en prendre aux conséquences. »

Il croit que cette « impuissance à résister », cette « infantilisation », est « programmée dans la Constitution ».

Comme « ceux qui rédigent les Constitutions pensent d’abord à préserver leurs intérêts », pour « changer les choses », et instaurer « la vraie démocratie », il ne voit qu’une seule voie : tirer au sort des citoyens qui écriraient eux-mêmes une nouvelle Constitution, « comme en Islande et en Colombie britannique ».

Ils sont quelques uns à s’être déjà mis au travail. Pendant trois ans, à Aix, au sein d’une « université populaire ». Désormais sur le forum et « le wiki » hébergés sur le site d’Etienne Chouard.

« Je suis prêt à croiser le fer avec Hollande »

Son modèle est vieux de 2 500 ans ; c’est la démocratie athénienne.

« On vient de vivre 200 ans de gouvernement des ultrariches. Mais les hommes ont déjà inventé un autre système qui a marché 200 ans aussi. Ils tiraient au sort des délégués pour six mois et le président d'Athènes était tiré au sort tous les jours. »

Il est convaincu que « mettre du tirage au sort en politique va tout changer en bien ». Il est très sûr de lui :

« J'ai des milliers d'heures de travail là-dessus, je me sens invulnérable, je prends Strauss-Kahn ou Giscard d'Estaing quand ils veulent en débat, je n'ai pas peur. Je suis prêt à croiser le fer avec Mosco, Hollande, Barroso, toute la clique. »

Des extraits de certaines de ses conférences circulent sur Internet. Tous les jours, le « père Chouard » – comme il dit – est destinataire de témoignages de gens bouleversés d’avoir enfin identifié une issue possible. Ils l’ont aussi encouragé à se présenter à l’élection présidentielle : « On aurait quelqu’un derrière qui se mettre… »

Patiemment, il a répondu qu’il ne cherchait pas à être élu. « Je cherche juste le bien commun, je ne veux pas le pouvoir, le pouvoir transforme toujours les êtres – c’est pour ça que les Athéniens avaient mis en place une rotation des charges. »

« Je pense comme Robespierre »

Il ne donnera pas non plus de consigne de vote à ses disciples :

« Comment choisir entre le cancer et le sida ? J'aime beaucoup Mélenchon mais il ne veut pas sortir de l'UE. Des lecteurs me disent qu'ils veulent voter Le Pen pour tout faire péter, mais ce n'est pas comme ça qu'on sort du piège.

Hollande fera la même chose que Sarkozy, à quelques bricoles près. C'est un jeu de dupes. On va perdre dans tous les cas. Ce sont tous des marionnettes aux mains des hommes d'affaires. »

Les riches ! Chouard y revient toujours. « L’histoire de la République, c’est celle du gouvernement par les riches pour les riches », répète-t-il. « Qu’est-ce qu’ils se sont goinfrés depuis 200 ans, les Versaillais ! »

Il pense que « l’argent gouverne tout », que « l’élection met toujours Goldman Sachs au pouvoir ». La preuve ? « Les grandes avancées ont toujours été portées par la grève générale, jamais par l’élection. »

Entre deux bouchées de pintade, il peut déclarer : « Je pense très profondément, comme Robespierre, que les trop riches sont les fléaux de l’humanité. » Ou encore :

« La logique de l'Union européenne et des entreprises, c'est des salariés privés de moyens de résistance qui doivent se contenter des rémunérations les plus basses possible. Le bout du bout de cette logique, c'est les camps de travail. C'est bien plus dur de se battre contre ça que contre le fascisme à la papa. »

« Je suis bientôt mort »

Les références historiques et théoriques prolifèrent dans son discours. Depuis 2005, il est lancé dans une quête intellectuelle forcenée. Il vit avec les auteurs qu’il découvre, parle d’eux comme d’êtres familiers.

Au fur et à mesure qu’il investit une nouvelle période, il établit des parallèles avec le présent : « On ne comprend rien à notre époque si… » Il repère des permanences, des sens cachés, des forces à l’œuvre derrière les événements. Cela le réjouit et le terrifie à la fois :

« Fallait m'apprendre tout ça à l'école. A 50 ans, c'est trop tard. Je suis bientôt mort. »

Etienne Chouard, chez lui, en mars 2012 (Mathieu Deslandes/Rue89)

Sa bibliothèque contient désormais 3 000 livres. « Je les ai tous feuilletés, mais je ne vais pas avoir le temps de tous les lire en entier. » Alors il les scanne, page à page, en écoutant des enregistrements de conférences de l’historien Henri Guillemin, puis il les « transforme en documents pour y faire des recherche par mot-clé ».

« Comme un fumeur en manque »

Il y a des papiers partout et une poubelle Obélix. On parcourt les rayonnages :

« Y a les anars, les cocos, ceux qui résistent au travail et à l'idéologie du progrès. Ici, c'est les républicains radicaux, là la pensée de la résistance au totalitarisme... Orwell, Michéa, Lasch, c'est génial.

Puis on a ceux qui s'intéressent à la fabrique du consentement et les lanceurs d'alerte. Le colonialisme, l'économie générale, la création monétaire, les théories du gouvernement représentatif, la critique du sionisme, la critique de Freud, l'éthologie...

Mon fil d'Ariane, c'est la résistance aux abus de pouvoir. »

(Dans cette logique, il rêve d’être végétarien, il a arrêté la viande trois mois, mais il avait mal partout, « comme un fumeur en manque ».)

C’est un peu vertigineux. Il a l’impression de toucher du doigt la vérité. De l’avoir atteinte au terme d’une démonstration méthodique. Il supplie :

« Si je me trompe, qu'on me le montre. Je ne demande pas mieux. Mais qu'on ne me dise pas que je suis paranoïaque, c'est un argument de cour de récré. »

« Je m’en fous du 11 Septembre »

Parano ? Il se voit aussi régulièrement accusé d’avoir « glissé à l’extrême droite » et d’être devenu « complotiste » :

parce que sa critique du parlementarisme et des élites est jugée « fasciste » (« Ils oublient que cette critique relève aussi d'une tradition anarchiste libertaire ») ;
parce qu'il a eu le malheur d'avouer qu'il trouvait Thierry Meyssan « intéressant » et qu'il n'avait « rien trouvé de diabolique dans ses écrits » ;
parce qu'il estime qu'on ne connaît pas « toute la vérité sur le 11 Septembre ».

Il s’explique :

« Je m'en fous du 11 Septembre. Mais on m'a posé la question un jour et j'ai répondu. C'est devenu le truc qui sert de marqueur pour savoir qui peut parler ou pas. Or, moi, je suis pour l'isegoria, le droit de parole pour tous à tout propos. »

En 2005, ceux qui voulaient le discréditer insistaient sur son statut de prof « de BTS » et rappelaient que son œuvre publiée se composait en tout et pour tout de deux méthodes d’informatique (« Créer une application avec Access » et « Prendre de bonnes résolutions avec Excel »).

Il enrage autant qu’il y a sept ans. Et recourt au même remède : le parapente. « Ce qui compte », dit-il, « c’est voler ». Danser avec les martinets dans les nuages. Survoler Gréoux, Valensole, Digne, et toute la chaîne de la Blanche, le lac de Serre-Ponçon au soleil couchant, déboucher face au Grand Morgon. Et rentrer en stop. « La vie est plus belle en haut qu’en bas. »

On vient de se parler cinq heures d’affilée. Il a été tour à tour enthousiaste, grave, inquiet, grandiloquent. On va se quitter et tout à coup, il s’assombrit. Il a une question :

« Est-ce que vous pensez que je pourrais être devenu fasciste sans le savoir ? »

Source = Rue89 : Rue 89 : actualités en direct et info en continu


Erratum : Mathieu exagère : je n’ai que 2 000 livres de travail, pas (encore) 3 000 :slight_smile:


Il y a aussi [bgcolor=#FFFF99]deux vidéos[/bgcolor] qui ont été publiées :

• une pour la conférence de Montpellier le 14 mars 2012 :

• une autre pour la radio à Cannes le 16 mars 2012 :


À propos, je signale que je commets souvent, ces temps-ci, une erreur (récente et bizarre) : après avoir correctement attribué (pendant des années) la paternité du conseil « Cherchez la cause des causes » à Hippocrate, je me suis mis, depuis quelques mois, dieu sait pourquoi, à l’attribuer à… Hérodote… N’importe quoi… :slight_smile: Alors, surmené, le père Chouard ?

Voilà comment j’interprète ce signe de sénilité : il est grand temps que je recommence à voler :wink:

Étienne.

Quand vous parlez de crise qui n’existe pas je suppose que vous parlez de la crise financière. Mais ne croyez vous pas que LA crise c’est plutôt la rencontre de celle là avec les crises écologique, économique, climatique, énergétique, démocratique, etc … et que toutes ces crises interagissent.

Ce graphique que j’ai trouvé ce matin a un vague rapport avec cette idée :

« Est-ce que vous pensez que je pourrais être devenu fasciste sans le savoir ? »
Vous me décevez sur ce coup là. Si par fasciste vous entendez votre vision perso du fascisme, la concentration de tout ce contre quoi vous vous battez, je ne comprend pas comment vous pouvez vous poser la question. Si par fasciste vous entendez ce que vos contradicteurs appellent comme ça, quelqu'un qui se bat pour des idées qu'ils détestent et qui en plus a raison (parce qu'on n'insulte pas quelqu'un qui a tort, on se contente de montrer qu'il a tort), alors évidemment que vous l'êtes devenu, mais pas sans le savoir, et ça devrait vous réchauffer le coeur, pas vous désespérer. Mais si par fasciste vous entendez ce que Mussolini ou Arendt (chacun-e dans son camp) ont théorisé, vous êtes quand même plus cultivé sur le sujet que le premier journaliste venu pour y répondre. Vous savez quand même au moins si vous souscrivez au "Tout pour l'État, rien hors de l'État, rien contre l'État" !

Être fasciste, c’est mettre en faisceau convergent l’ensemble des pouvoirs.
C’est donc attaquer Montesquieu de front.
Donc notre éveilleur de 2005 n’est pas devenu fasciste sans le savoir.
Bien au contraire.

Y a du boulot
de terrain.
Chacun sa pelote, et ailleurs qu’en forum siouplaît !

Quant aux journalistes, ils détiennent un pouvoir de médisance épouvantable.
Il devrait y avoir des journalistes tirés au sort et à mandat court.

Oui ou alors il faudrait goudronner et plumer qq journalistes pour l’exemple.

Je propose : Jean-Michel Apathie, Pascale Clark, Alain Duhamel, Jean Quatremer et Michel Denizot.

Merci Ana :slight_smile:

Merci Sandy :slight_smile:
Qu’est-ce qu’on est proche, le plus souvent, c’est étonnant : heureusement qu’il y a cette belle grosse différence qui nous sépare (pour l’instant) : ça nous fait des sujets de conversation… :wink:

Cher Landerec, je suis désolé de vous « décevoir », mais étant très humain, donc très imparfait (et c’est peu dire), je crois qu’il faut vous préparer psychologiquement à ce que ça recommence… :wink: En même temps, la suite de votre message montre que ce gros mot n’est pas si simple et que même un esprit averti peut douter et se demander, de bonne foi, s’il n’est pas en train de rater une mutation personnelle qui lui échapperait.

Je conteste le mot CRISE, parce que je ne pense PAS que la situation soit accidentelle => je préfère donc l’expression COUP D’ÉTAT ; c’est plus approprié à la situation, je crois.

Le goudron et les plumes pour les oligarques, ça c’est une idée amusante :slight_smile:

Vous avez raison Etienne de vous battre même sur des mots, surtout celui là.

A propos du titre du fil : « Désignation des représentants politiques : élections (et avec quel mode de scrutin) ou tirage au sort ? »

-------->>>

Comme amorce de ce qui suit, je me répète :
Il devrait y avoir des journalistes tirés au sort et à mandat court.

Je pense que cette question de la nomination des « huiles », qui guide ce fil de discussion, doit être étendue à d’autres pouvoirs que le pouvoir représentatif.
Et à d’autres personnes que nos « représentants ».
Et au delà du domaine de l’État.

Ceux qui façonnent l’économie, ceux qui façonnent l’opinion, d’autres (?) sont les détenteurs de pouvoirs immenses qui échappent aux urnes et souvent attaquent l’État dans sa souveraineté.
Nous nous focalisons sur la structure de l’État, alors que le pouvoir est pour grande part ailleurs.
Le champ de la démocratie réelle que nous appelons de nos vœux ne peut se limiter au simple État.

J’entends déjà penser :
« Oui mais un État reformé saura régler ce problème car il s’en donnera les moyens »
MAIS
Le risque de compter sur l’État pour régler les pouvoirs qui ne sont pas siens est l’émergence du totalitarisme.
C’est pourquoi nous devons nous concentrer aussi sur les pouvoirs latéraux, (entreprises sensibles, grande distribution, rédactions des grands médias, etc)
qui eux aussi devraient être du domaine de la démocratie, réelle.