Comme prévu, je progresse à l’occasion de cette controverse. [bgcolor=#FFFF99]Il me semble que l’élection de représentants est à la fois LA CONDITION d’apparition et LE VERROU de pérennité du CAPITALISME lui-même, avec son cortège d’injustices sociales et de catastrophes écologiques.
Et nous protégeons nous-mêmes, — guidés et INTIMIDÉS en cela par un MYTHE jamais sérieusement remis en question, celui du SUFFRAGE UNIVERSEL RÉDUIT FAUTIVEMENT À L’ÉLECTION DE REPRÉSENTANTS —, nous protégeons nous-mêmes, donc, l’outil le plus efficace que les privilégiés aient jamais conçu pour exploiter leur prochain. La gauche sincère, généreuse, authentiquement altruiste croit bien faire avec la défense de la « démocratie représentative » (qui est pourtant un oxymore évident) et NOUS ENFERME ainsi, sans le vouloir et sans le savoir, dans la négation même de la démocratie.[/bgcolor]
J’ai hâte de vous lire.
Amicalement.
Étienne.
RÉPONSE (FRATERNELLE) D'ÉTIENNE CHOUARD À RAOUL MARC JENNAR
Cher Raoul,
Tu as publié lundi dernier, une tribune expliquant ta méfiance par rapport à l’idée du tirage au sort en politique : http://www.pouruneconstituante.fr/spip.php?article417.
Tu es mon ami, et ce qui nous oppose aujourd’hui n’est qu’une idée, une simple controverse sur l’organisation de la cité, évidemment sujette à débat (quels représentants voulons-nous ? Des experts ou nos semblables ?). Je n’oublie pas que tu cherches la même chose que moi, la justice sociale ; je n’oublie pas l’essentiel.
À mon avis, l’erreur de tous les militants de gauche —et je le dis sans agressivité ni condescendance car j’ai commis moi-même pendant cinquante ans ce que je considère aujourd’hui comme une erreur, et tout le monde peut se tromper — TOUTE L’ERREUR DE LA GAUCHE SINCÈRE, DONC, TIENT DANS TA PREMIÈRE PHRASE :
[bgcolor=#FFFF99]« La démocratie représentative postule la désignation de représentants. »[/bgcolor]
- Cette introduction forte que tu choisis pour fonder ton raisonnement, ce socle de ton argumentation est CONTRADICTOIRE DANS LES TERMES.
C’est comme dire : « l’honnêteté mensongère postule le mensonge. » …
OK, c’est tout à fait VRAI, mais c’est aussi tout à fait ILLÉGITIME.
- Tu ne crois pas si bien dire : POSTULER, C’EST AFFIRMER SANS AVOIR À DÉMONTRER, c’est la définition du mot.
Est-ce acceptable en l’occurrence ? Je ne le crois pas.
- Et puis QUI POSTULE ? La « démocratie représentative » elle-même ? Mais qui c’est, ça ? Est-elle légitime pour postuler quoi que ce soit ? D’où vient ce régime ? Qui l’a voulu au départ ?
Qui peut postuler légitimement l’organisation (et le contrôle !) des pouvoirs, en dehors du peuple lui-même ?
*****
Autrement dit, si la démocratie c’est le pouvoir du peuple par le peuple pour le peuple, alors la représentation (qui prend le pouvoir au peuple pour le donner à des représentants) consiste, PAR DÉFINITION, à RENONCER à la démocratie.
Autrement dit, l’expression « démocratie représentative » est un OXYMORE, un assemblage de mots contradictoires, une erreur pour les gens de bonne foi qui ne réalisent pas les ravages de cette contradiction, et une ESCROQUERIE pour ceux qui le savent et qui s’en servent pour prendre le pouvoir eux-mêmes.
[bgcolor=#FFFF99]ON NE PEUT PAS DIRE UNE CHOSE ET SON CONTRAIRE.[/bgcolor]
IL FAUT CHOISIR :
- SOIT LA DÉMOCRATIE,
- SOIT LE GOUVERNEMENT REPRÉSENTATIF.
Or, le gouvernement représentatif a été choisi, voulu, préféré par des gens finalement assez peu recommandables du point de vue populaire, des penseurs politiques très élitistes, très méprisants à l’égard de « la populace » : Sieyès, Benjamin Constant, Tocqueville, et puis toutes les authentiques crapules, comme Napoléon premier et Napoléon III, Thiers, et tous les assassins élus qui ont envoyé leur peuple à la guerre, après l’avoir exploité et volé.
SIEYÈS (un abbé) avouait en 1789 : « LES CITOYENS QUI SE NOMMENT DES REPRÉSENTANTS RENONCENT ET DOIVENT RENONCER À FAIRE EUX-MÊMES LA LOI ; ILS N’ONT PAS DE VOLONTÉ PARTICULIÈRE À IMPOSER. S’ILS DICTAIENT DES VOLONTÉS, LA FRANCE NE SERAIT PLUS CET ÉTAT REPRÉSENTATIF ; CE SERAIT UN ÉTAT DÉMOCRATIQUE. LE PEUPLE, JE LE RÉPÈTE, DANS UN PAYS QUI N’EST PAS UNE DÉMOCRATIE (ET LA FRANCE NE SAURAIT L’ÊTRE), LE PEUPLE NE PEUT PARLER, NE PEUT AGIR QUE PAR SES REPRÉSENTANTS. »
C’est clair non ?
Par quelles pirouettes intellectuelles en est-on arrivé à désigner « démocratie » ce qui avait été PENSÉ DÈS L’ORIGINE COMME SON STRICT CONTRAIRE ?
Et par quelles pirouettes intellectuelles en vient-on, encore aujourd’hui, à prétendre que ce régime volontairement et expressément antidémocratique est… « la démocratie » ?
ALEXIS DE TOCQUEVILLE, cet aristocrate passionnant (honnête mais antidémocratique), avouait très tôt que les élites savaient très bien, elles, qu’elles n’avaient rien à craindre de l’élection, lui qui disait : « JE NE CRAINS PAS LE SUFFRAGE UNIVERSEL : LES GENS VOTERONT COMME ON LEUR DIRA ».
Et il avait raison, Raoul : tu vois bien que ça se passe comme ça, encore aujourd’hui, non ? Les gens votent comme on leur dit. Et quand Raoul se présente à une élection, il ne gagnera jamais ; non pas parce que Raoul n’est pas le meilleur pour le peuple — il EST objectivement le meilleur pour le peuple —, mais parce que l’élection ne porte pas au pouvoir les meilleurs, mais très souvent les pires (du point de vue du peuple).
Donc, pour ma part, je préfère mille fois cette pensée de ROBESPIERRE :
« LA DÉMOCRATIE EST UN ÉTAT OÙ LE PEUPLE SOUVERAIN, GUIDÉ PAR DES LOIS QUI SONT SON OUVRAGE, FAIT PAR LUI-MÊME TOUT CE QU’IL PEUT BIEN FAIRE, ET PAR DES DÉLÉGUÉS TOUT CE QU’IL NE PEUT FAIRE LUI-MÊME. »
Je la trouve parfaite.
Cette conception de Robespierre, l’incorruptible Robespierre, fonde non pas la représentation en toute matière, mais DANS LES SEULS CAS où le peuple ne peut pas s’occuper lui-même de ses affaires, ET SOUS SON CONTRÔLE PERMANENT.
J’évolue moi-même, en réfléchissant à tout ça avec toi, et je réalise finalement que [bgcolor=#FFFF99]JE NE VEUX PLUS DE REPRÉSENTANTS : JE VEUX LA DÉMOCRATIE.[/bgcolor]
Ce pourrait être le mot d’ordre des peuples du monde entier :
[bgcolor=#FFFF99]NOUS VOULONS ÉCRIRE NOUS-MÊMES NOTRE CONSTITUTION.[/bgcolor]
Tu proposes toi-même que la démocratie soit directe au niveau local : je te prends au mot, parce que moi-même je ne veux pas autre chose.
À l’image de ce que propose Proudhon, avec sa FÉDÉRATION DE COMMUNES, je suggère que chaque commune gère directement ses affaires, comme à Athènes (c’est la même taille), et que seules les affaires nationales soient soumises à l’Assemblée Nationale, à DES DÉLÉGUÉS PLACÉS SOUS LE CONTRÔLE PERMANENT DU PEUPLE QUI LES DÉLÈGUE, et qui peut les révoquer à tout moment.
*****
Raoul, je te connais, j’admire ton courage et ta générosité intransigeante, je sais que tu cherches la justice sociale, comme moi. Pourtant, aujourd’hui, dans l’état actuel de notre réflexion à tous les deux, nous sommes apparemment en contradiction :
-
Tu as peur que mon idée de tirage au sort des représentants prive le peuple de son pouvoir en lui retirant sa seule arme politique que serait l’élection (*).
-
J’ai peur que ton idée d’élection des représentants prive le peuple de son pouvoir en lui retirant sa seule arme politique que serait le tirage au sort.
On ne peut pas avoir complètement raison tous les deux : soit l’un d’entre nous a complètement raison (et l’autre a complètement tort), soit, beaucoup plus vraisemblablement, chacun de nos points de vue contient à la fois du vrai et du faux.
JE TE PROPOSE DEUX FAÇONS DE RAPPROCHER NOS POINTS DE VUE :
1) PRÉCISER DE QUOI ON PARLE,
ET RÉFLÉCHIR CAS PAR CAS PLUTÔT QU’EN BLOC :
Comment désigner
• l’Assemblée Constituante,
• le Conseil Constitutionnel,
• l’Assemblée Législative,
• l’Exécutif (je n’utilise plus le mot « gouvernement » qui porte en lui la confusion des pouvoirs et une dérive tyrannique),
• les Chambres de Contrôle des acteurs publics,
• les hauts fonctionnaires,
• les Juges,
• les Policiers,
• les sondeurs et autres statisticiens,
• les patrons de médias,
• les journalistes,
• les Assemblées Communales (et Régionales) ?
Nos réponses ne seront pas toujours opposées dans tous les cas ; et le fait de trouver les points d’accord sur certains niveaux de pouvoir nous permettra d’ESSAYER ce qui paraît aujourd’hui incongru et s’avérera peut-être génial.
2) PANACHER LES MÉTHODES :
TIRER AU SORT PARMI DES ÉLUS SANS CANDIDATS :
J’attire ton attention sur une idée formidable qui devrait, je trouve, rassurer tout le monde (sauf les voleurs de pouvoir, bien entendu) :
IMAGINE QUE CHACUN D’ENTRE NOUS SOIT APPELÉ À DÉSIGNER AUTOUR DE LUI, LIBREMENT — sans qu’aucun parti ne lui impose des candidats (ceci est important, absolument décisif) — UNE (OU PLUSIEURS) PERSONNES QU’IL CONSIDÈRE COMME DES « HONNÊTES GENS » (je préfère ce vocable à celui de « valeureux » que j’utilisais jusqu’alors, mais il faut en discuter).
On pourra, par exemple, apprécier ce voisin qui n’a pas peur de parler en public, cet ami qui lit beaucoup et qui est nuancé dans ses appréciations, ce collègue qui se dévoue déjà à la politique de façon désintéressée, cette femme qui sait écouter sans se mettre en colère et qui est capable de changer d’avis, cet autre qui a un fort sens pratique et qui ne s’en laisse pas accroire par un beau parleur, celui-là qui est un diplomate aimant apaiser les conflits, tel autre qui réfléchit déjà aux rapports entre l’argent, la politique et le droit, etc. Chacun réfléchira librement aux qualités qui lui semblent utiles pour débattre du bien commun.
Les Honnêtes Gens ainsi élus sans avoir cherché à l’être pourraient refuser cette désignation, bien sûr, mais je pense qu’ils ne refuseraient pas tous : beaucoup de gens normaux — n’ayant aucun appétit pour le pouvoir — accepteraient d’exercer temporairement un certain pouvoir, par dévouement, « pour rendre service » si tout le système fonctionne comme ça.
ON POURRAIT ENSUITE TIRER AU SORT PARMI CES HONNÊTES GENS, LIBREMENT CHOISIS PAR LE PEUPLE.
On aurait ainsi le meilleur des deux méthodes : on n’aurait pas n’importe qui (on aurait choisi librement « les meilleurs »), et on écarterait beaucoup d’intrigues et de corruptions en laissant une forte place à cette procédure égalitaire et incorruptible qu’est le tirage au sort.
Cher Raoul, je redoute cette controverse naissante qui pourrait, au lieu de nous pousser tous les deux à progresser comme peuvent le faire les meilleurs débats contradictoires, nous conduire insensiblement à des violences verbales (involontaires au début) et finalement à une inimitié. Je redoute cela plus que tout.
[bgcolor=#FFFF99]Je vis la mise en ordre de bataille d’ATTAC (je devrais plutôt dire de ses chefs, ce qui est différent) contre le tirage au sort comme une catastrophe, un cauchemar : les gens les plus gentils, les plus humains, les plus généreux, les plus altruistes, se mobilisent —bientôt ardemment ?— contre quoi ? contre le pilier même de la démocratie, sa condition de faisabilité, son fondement…
C’est un cauchemar.
Les révoltés du monde entier cherchent la vraie démocratie. ATTAC et la vraie gauche (pas les traîtres du parti soi-disant socialiste) devraient leur offrir l’idée géniale de la fédération de communes et de la démocratie directe, alimentée et garantie naturellement, mécaniquement, par le tirage au sort ; et au lieu de ça, ATTAC se prépare à servir au peuple le catéchisme républicain de l’élitisme électoral… C’est à pleurer. Pourvu qu’ils changent d’avis, pourvu pourvu…[/bgcolor]
*****
Entends-moi Raoul : je cherche la même chose que toi, je peux me tromper, mais je ne suis pas ton ennemi : 200 ANS DE FAITS HISTORIQUES montrent que l’expérience de L’ÉLECTION DES REPRÉSENTANTS POLITIQUES N’A JAMAIS APPORTÉ LA JUSTICE SOCIALE, jamais. Ou les exceptions sont si rares et si fragiles qu’elles ne permettent pas de valider raisonnablement ce mythe.
C’était une idée, mais ce n’était pas une bonne idée. On n’est pas obligé de s’enferrer dans une mauvaise idée, non ?
Même Léon Blum, cette icône, avait promis en secret à François de Wendel de ne pas laisser filer les salaires ! L’élu du peuple, son champion, avait promis en coulisse au pire ennemi du peuple, au patron des industriels et des banquiers, de ne PAS défendre les intérêts populaires essentiels. Je trouve ça emblématique : l’élection de représentants au suffrage universel comme moyen d’émancipation populaire est un mythe qui n’a jamais tenu ses promesses, c’est une procédure qui a été pensée dès le départ par une élite contre le peuple, contre la démocratie.
Et elle fonctionne parfaitement.
Mais pas dans l’intérêt du peuple :
TOUJOURS ET PARTOUT,
L’ÉLECTION DONNE UN POUVOIR POLITIQUE ABSOLU AUX RICHES.
[bgcolor=#FFFF99]AVANT L’AVÈNEMENT DU SUFFRAGE UNIVERSEL, LES RICHES N’AVAIENT PAS TANT DE POUVOIR QUE CELA : LES RICHES DEVAIENT COMPOSER AVEC D’AUTRES POUVOIRS DE L’ANCIEN RÉGIME, LES PRINCES, LES NOBLES, LE CLERGÉ…
MAIS LE SUFFRAGE UNIVERSEL LEUR A DONNÉ LE MOYEN DE PRENDRE COMPLÈTEMENT LE CONTRÔLE DE L’ÉCRITURE DU DROIT (en finançant la campagne électorale des élus du Parlement, ce qui fait des députés leurs obligés), ce qui a permis, je le crois aujourd’hui, l’avènement de capitalisme, rien que ça.
Parce que LE CAPITALISME A BESOIN DU DROIT POUR RÉGNER —ET POUR PERDURER—, IL A BESOIN D’UN DROIT TRÈS PARTICULIER pour s’étendre partout sur terre : un droit qui donne le plus possible aux propriétaires et le moins possible aux travailleurs.
CE DROIT NE PEUT ADVENIR QUE GRÂCE AU CONTRÔLE (FINANCIER) DES ACTEURS POLITIQUES PAR LES PUISSANTS ÉCONOMIQUES : ce contrôle, il me semble que c’est l’élection de représentants au suffrage universel qui l’a donné aux capitalistes. [/bgcolor]
Ainsi, en défendant l’élection de REPRÉSENTANTS au suffrage universel — au lieu de défendre le suffrage universel DIRECT à l’Assemblée du peuple — nous défendons nous-mêmes le meilleur outil d’oppression politique jamais imaginé par nos pires ennemis… Nous mettons toute notre fierté à nous montrer les plus ardents défenseurs de ce qui scelle notre lamentable impuissance politique depuis deux cents ans.
Sacré paradoxe quand même, non ?
Mais ce n’est pas que la faute des autres. C’est bien de la nôtre aussi.
C’est mon message.
[bgcolor=#FFFF99]LE SEUL SUFFRAGE UNIVERSEL QUI VAILLE, C’EST LE VRAI SUFFRAGE UNIVERSEL, DIRECT : LE SUFFRAGE DU PEUPLE EN CORPS[/bgcolor] (tous ceux qui le désirent viennent, et il n’y en aura pas tant que ça ; et s’il n’y a plus de place, revenez demain) à l’Assemblée Communale ou à l’Assemblée Nationale.
*****
Mais soyons concrets : cessons de parler du tirage au sort généralisé, qui est forcément éloigné, immédiatement inaccessible, et qui fait peur à tout le monde puisque personne n’en parle à l’école et que personne ne s’est encore préparé à cette idée pourtant fondatrice ; et [bgcolor=#FFFF99]CONCENTRONS-NOUS SUR L’ASSEMBLÉE CONSTITUANTE[/bgcolor] qui est à la source de tous les pouvoirs (et de tous les abus de pouvoir si le peuple ne s’en charge pas lui-même) et QUI DOIT ABSOLUMENT ÊTRE >DÉSINTÉRESSÉE< POUR QUE LES CHOSES CHANGENT, POUR QUE LE PEUPLE SORTE DE SON IMPUISSANCE POLITIQUE CHRONIQUE : IL NE FAUT PAS QUE LES MEMBRES DE L’ASSEMBLÉE CONSTITUANTE ÉCRIVENT DES RÈGLES POUR EUX-MÊMES.
CE N’EST PAS AUX HOMMES AU POUVOIR D’ÉCRIRE LES RÈGLES DU POUVOIR.
Ce n’est pas aux Parlementaires, ni aux Ministres, ni aux Présidents, ni aux Juges, ni même aux Hommes de Partis (qui se destinent au pouvoir), d’écrire ou de modifier la Constitution dont la raison même est d’affaiblir leur pouvoir.
[bgcolor=#FFFF99]La grande difficulté en cette matière est de trouver les hommes politiques assez désintéressés, assez hautement soucieux du bien commun, pour comprendre la situation de CONFLIT D’INTÉRÊTS dans laquelle ils se trouvent quand ils se mêlent d’écrire la constitution. Il faut un sens de l’honneur sacrément développé pour être un politicien et dire : « je veux exercer le pouvoir pour améliorer le monde et servir l’intérêt général, mais le fait même d’exercer le pouvoir, objectivement, me rend dangereux pour les autres : il est donc essentiel que des règles limitent mon pouvoir, et ce n’est surtout pas à moi d’écrire ces règles ».[/bgcolor]
Certains élus d’aujourd’hui ont-ils cette hauteur de vue ? Je l’espère, mais les premières réactions d’élus, très hostiles à cette thèse du tirage au sort des membres de l’Assemblée Constituante, montrent plutôt le contraire.
Espérons que le fait de s’être déclaré publiquement d’une opinion ne les enferme pas dans cette opinion (effet de gel et escalade d’engagement). Pour ma part, je n’ai pas peur de changer d’avis : l’essence du débat, c’est de comprendre les autres points de vue et de se rapprocher petit à petit du meilleur jugement, donc de changer progressivement de point de vue, en mieux.
Très amicalement.
10 juin 2011.
Étienne Chouard.
(*) Les réponses à tes craintes se trouvent déjà dans ma conférence de Marseille : http://dai.ly/mG9ZO3
Dans les grandes lignes : [bgcolor=#FFFF99]le tirage au sort ne sert pas du tout à confier un grand pouvoir à n’importe qui, évidemment : le tirage au sort sert à confier à des amateurs les seules tâches (volontairement morcelées) que l’Assemblée ne peut pas assumer elle-même (parmi lesquelles la police et la justice pour exécuter les décisions collectives), mais en GARANTISSANT UNE RÉELLE ROTATION DES CHARGES ET UNE SÉVÈRE REDDITION DES COMPTES, POUR QUE JAMAIS LES SERVITEURS DU PEUPLE NE DEVIENNENT SES MAÎTRES.
Et je trouve que cet objectif central du tirage au sort est profondément… DE GAUCHE.[/bgcolor]