Tirage au sort, Déclaration universelle des droits de l’homme, &
Mon message 6081 est sorti tronqué dans un premier temps. Déhel et AJH (6082, 6083) s’y sont référés sans avoir le texte complet : une bonne partie des réponses se trouvent dans le message reconstitué.
Juste quelques remarques complémentaires.
[b]AJH,
[/b]Il n’est pas logique de dénigrer la Déclaration universelle parce qu’elle n’est pas toujours appliquée. C’est comme si vous critiquiez le code pénal sous prétexte qu’il interdit l’assassinat mais qu’il y a encore des assassins.
Vous ne voyez toujours pas pourquoi le tirage au sort serait contraire « à ces déclarations de toute façon peu appliquées ». C’est parce que ces déclarations, appliquées ou pas, disposent que tout personne a le droit de participer à la direction des affaires publiques « directement ou par ses représentants » ; qui dit représentant dit personne désignée en connaissance de cause, et par définition les tirés au sort ne sont pas des représentants puisque justement ils sont désignés « en ignorance de cause » - par le sort. Le tirage au sort ne satisfait donc pas aux conditions de la Déclaration.
Votre argument que si le peuple décide d’instaurer le tirage au sort je (JR) n’y pourrais rien, ça rime à quoi ? Et si le peuple décide de rejeter le tirage au sort, qu’est-ce que que vous y pourrez ? Restons rationnels, svp.
Déhel,
Votre système de comités techniques (juristes, historiens, etc) et de l’assemblée constituante « multiple » me paraît bien trop compliqué. L’intérêt d’une assemblée constituante est qu’elle soit composée de citoyens venant d’horizons les plus divers possibles. Les comités spécialisés sont nécessaires, mais doivent être composés de membres de l’assemblée constituante, sans aucune condition de diplôme, car dans ce contexte même un illettré a autant à apporter qu’un docteur en droit. Ce sont le bon sens, la confrontation des idées et la force de persuasion qui comptent.
Naturellement, si l’assemblée est désignée par l’élection, ses membres auront dû faire campagne, exposer leurs idées, et il y aura de bonne chances que les constituants soient plus compétents que si l’assemblée avait été composée par tirage au sort…
C’est ou ce devrait être l’un des principes de base de la procédure référendaire qu’on ne soumet pas à un même référendum plusieurs projets ou plusieurs options, parce que c’est introduire des variables que le suffrage universel n’est pas en mesure de traiter. La réponse à un tel référendum n’est jamais claire. Si le projet soumis au référendum est rejeté, on en prépare un autre en tâchant de tenir compte des raisons du premier rejet. C’est ce qui a été fait en 1946 en France : un premier projet de constitution a été rejeté en mai, suivi d’un deuxième projet adopté en octobre.
La Déclaration universelle des droits de l’homme n’a pas pour but « d’assurer la pérennité au sein d’une population de valeurs humanistes » mais de définir précisément les droits qui s’attachent à tout être humain fonctionnant en société et que la loi doit garantir.
Je maintiens que les atteintes les plus notoires aux droits fondamentaux proviennent de sociétés tribales, dictatoriales et intolérantes. Tout en ayant infiniment de respect pour Claude Lévi-Strauss, je ne suis pas anthropologue et me réserve le droit d’utiliser les mots dans le sens et avec leur affect ordinaires. Je n’ai pas visité le rayon des « Inutiles » de CLV. J’utilise le mot tribal comme l’adjectif de « tribu » dans le sens donné par le Petit Larousse : « groupement de familles de même origine, vivant dans la même région ou se déplaçant ensemble, et ayant une même organisation sociale, les mêmes croyances religieuses et, le plus souvent, une langue commune » - soit la recette même de l’enfermement social, très peu favorable au développement de la personne humaine et de ses droits inhérents.
Je vous crois de bonne foi, mais votre citation concernant le droit de propriété est incomplète. L’Article 17 de la Déclaration universelle des droits de l’homme dit : "1. Toute personne, aussi bien seule qu’en collectivité, a droit à la propriété. 2. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa propriété". Le deuxième paragraphe, que vous oubliez de citer, contient a contrario le remède des abus que vous croyez détecter dans le premier.
Et puis, comme AJH, vous tirez injustement argument du fait que la Déclaration n’est pas bien appliquée pour laisser entendre qu’elle serait sans importance. Mais les mêmes dispositions se trouvent dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui lui est un traité ratifié par tous les États membres de l’Union européenne, et donc partie du droit de chacun de ces États et du droit de l’Union. Il y a aussi, à Strasbourg, une Cour européenne des droits de l’homme chargée de faire respecter, en substance, les mêmes principes. Vous comprendrez que pour ma part je préfère des droits bien définis et garantis par la loi à des « valeurs humanistes ». Je me méfie d’ailleurs du mot « valeur » , qui permet de faire et penser tout et n’importe quoi. JR