Référendums d’initiative citoyenne (RIC) : seuil de déclenchement
Pour répondre à la remarque de Téhach dans son message 54 :
C’est un fait que la majorité des partisans du RIC estiment qu’un seuil de déclenchement de 10 % est trop élevé.
(Incidemment, 10 %, c’est le seuil retenu dans le nouvel article 11 de la constitution française pour le déclenchement du référendum d’initiative parlementaire (un tel référendum doit avoir l’appui de 10 % des électeurs). C’est également le seuil retenu dans la très démocratique constitution de 1793.)
Ce seuil ne peut paraître excessif que si l’on envisage l’initiative populaire comme un moyen de débat public permanent, alors que (selon moi) la fonction d’un véritable référendum est de permettre au peuple souverain de trancher une question d’intérêt général qu’il juge importante lorsque ses représentants n’y arrivent pas, ou si ses représentants ne prennent pas la décision attendue par la majorité des citoyens.
L’accessibilité générale des moyens électroniques (l’Internet) a changé complètement la donne en ouvrant à tous, à tout moment, le débat et le vote. On pouvait se contenter d’un seuil de déclenchement beaucoup plus faible quand il fallait se rendre dans des bureaux de vote ou faire signer des pétitions dans la rue ou à domicile. Ce ne doit plus être le cas de nos jours en ce qui concerne le RIC puisque tout indique que le fonctionnement fiable, sécurisé, anonyme, et surtout contrôlable par tous, des moyens électroniques n’est plus une utopie (les Suisses ont fait des essais en grandeur nature apparemment concluants). Au besoin, bien sûr, on pourra toujours compléter les moyens électroniques par les moyens classiques (réunions publiques, débats télévisés. journaux).
C’est particulièrement vrai au niveau du débat substantiel et si besoin prolongé (six mois au moins ?) qui devrait précéder toute soumission effective d’un projet de loi au RIC.
Pour la France, ce seuil de 10 % signifie que moins de cinq millions de citoyens auraient le droit de décider qu’une question d’intérêt général doit être soumise à référendum.
Si ce seuil ne peut pas être atteint très rapidement, c’est que la proposition n’a pas l’importance que les proposants lui attribuent et n’aurait aucune chance d’être acceptée lors du référendum lui-même.
Or, un référendum coûte cher : d’après certains calculs, seulement l’impression et l’envoi aux électeurs du texte du fameux TCE (le traité constitutionnel européen), en 2005, a bien dû coûter dans les 500 millions d’euros à 10 euros par exemplaire (naturellement, tous les documents ne sont pas aussi volumineux que le TCE). Cela veut dire qu’il n’est pas question d’organiser des référendums à tout moment, ou même péridiquement comme on le propose parfois, ni d’organiser des concours de beauté pour désigner les questions les plus intéressantes parmi celles qui peuvent passer par la tête des associations de citoyens.
N’oublions pas que même le système suisse, tout entouré qu’il est de garde-fous, aboutit à neuf dixièmes de rejets. Le débat public préalable sur l’Internet et le seuil de 10 % d’acceptations en vue de la soumission effective au référendum sont là pour éviter les excès prévisibles. Reste, à mon avis, que même avec ce seuil que je juge encore très modéré, toute proposition de loi réellement importante passerait facilement le cap de la première acceptation.
Pour les autres questions, la sagesse commande de s’en remettre à nos représentants : c’est pour ça qu’ils sont élus, afin de ne pas avoir à déranger les citoyens inutilement. JR