15 Divers aspects de politique étrangère

L’affaire ukrainienne (suite)

La Crimée ayant été ré-attachée à la Russie comme prévu (voir mon 172), on peut parier que la négociation à venir portera sur des garanties concernant une certaine forme de neutralité de l’Ukraine (ce qui ne devrait pas l’empêcher de s’associer à l’UE et à la Russie si elle le souhaite mais devrait lui interdire de faire partie de l’OTAN) et sur la renonciation à toute implantation d’armements nucléaires par l’OTAN (ou les ÉUA – c’est la même chose) qui viserait à encercler l’ancienne Union soviétique.

Poutine est très bien placé pour avancer ses pions : même si c’est à mon avis un dangereux autoritariste et un dictateur en puissance, on doit constater qu’en la circonstance il défend les intérêts légitimes de la Russie.

Il est clair qu’à court terme l’UE n’est pas en mesure de jouer un rôle significatif dans cette affaire, non plus d’ailleurs que ses pays membres (l’Allemagne n’est guère mieux placée que le Luxembourg à cet égard), faute des moyens nécessaires : militaires, politiques, et aussi moraux (étant donné qu’avec les Américains nous avons utilisé au Kosovo, en Libye et au Soudan des procédés semblables à ceux que nous reprochons maintenant aux Russes).

Les ÉUA (qui s’intéressent beaucoup moins à l’Europe qu’il y a quelques années) ont déjà entrepris de tirer les marrons du feu au détriment de l’Europe en jouant sur les « sanctions ». Ils envisagent maintenant de prendre le relais pour l’approvisionnement énergétique des pays européens (assuré à 30% environ par la Russie à l’heure actuelle), ce qui pousserait les Russes à réorienter leurs exportations énergétiques vers l’Inde ou la Chine : ainsi, au bout du compte, les ÉUA auraient barre sur l’UE, leur principal concurrent économique et commercial, en particulier au moment de négocier le futur partenariat transatlantique, et éviteraient la mise en place d’une entente Russie-UE qui risquerait de faire ombrage au fameux « leadership ».

L’UE et plus généralement l’Europe ne doivent pas oublier que la Russie et les autres pays européens partagent dansla logique des choses un même destin solidaire et ont donc tout intérêt à s’entendre pour régler la question ukrainenne. Ce qui devrait être possible une fois passées les secousses actuelles.

C’est ici où l’on voit combien une vraie fédération européenne fait défaut et combien les politiques nationalo-souverainistes qui prétendent la remplacer sont futiles au regard des vrais enjeux. JR

Souveraineté nationale, Jacques Roman ?

En quoi voir les chars soviétiques entrer à Prague en 1968 est-elle une bonne situation ?

En quoi voir les États-Unis fomenter un coup d’État au Chili en 1973 est-elle une bonne action ?

En quoi voir certains pays africains soumis à la Françafrique est-elle une situation acceptable ?

En quoi voir un pays soumis par la perte de l’initiative de ses lois, de ses contres-pouvoirs, de la capacité à décider de son budget, à gérer sa monnaie est-il acceptable ?

Par les conséquences des mesures précédentes, en quoi voir en Grèce les cancéreux mourir faute d’argent dans les hôpitaux à la suite des mesures d’austérité UE-FMI-BCE est-elle une bonne chose ?

http://www.greekcrisis.fr/2014/02/Fr0325.html

En quoi voir un pays soumis est-il acceptable pour vous, expliquez-moi ?

Est-il davantage acceptable de voir des millions de personnes mourir de faim en Corée du Nord, qui dispose pleinement ou presque de sa souveraineté nationale vu son quasi total isolement ?

L’absence supposée de souveraineté nationale n’a pas grand-chose à voir avec la situation des cancéreux grecs, et tout à voir avec les politiques voulues par les gouvernements – individuellement ou collectivement – politiques directement ou indirectement approuvées par la majorité des électeurs lors d’élections nationales libres : en particulier, je crois me rappeler que des élections législatives ont eu lieu en Grèce relativement récemment, et que leur principal enjeu était, justement, l’acceptation ou le rejet des politiques européennes des candidats.

Ce sont le gouvernement et les électeurs grecs qui sont responsables de ces politiques, pour le pire comme pour le meilleur : pas l’UE elle-même, qui n’en est que l’exécuteur sous la supervision des gouvernements et du Conseil et du Parlement européens. JR

Pourquoi aller toujours chercher comme argument la politique menée par le gouvernement de la Corée du Nord dont personne sur ce forum ne se réclame ? L’Islande, la Norvège, la Suisse pour aller moins loin, déjà c’est mieux que votre UE.

Un référendum sur la politique d’austérité UE-BCE-FMI proposé par le Premier ministre Papandréou a été refoulé par le changement* des conditions de prise en pension par la BCE des titres présentées en garantie par la Banque de Grèce, ce qui a asphyxié le financement à court terme du déficit du budget de l’État grec avec un risque de défaut imminent.

  • Politique de « Risk Control Framework » par la BCE :

http://www.craigwilly.info/2013/01/05/francais-le-risk-control-framework-loutil-secret-que-la-bce-utilise-pour-controler-leurope-traduction-de-forbes/?lang=fr

À part un théâtre de marionnettes, que valent les partis politiques qui acceptent de perdre l’initiative des lois, la capacité à décider du budget de l’État, la gestion de la monnaie ?

Ce qui pêche en Corée du Nord comme dans tout régime communiste, c’est l’embargo! A.H.

@Gilles

En pratique, la Suisse fait partie de l’UE par la voie des accords bilatéraux

L’Islande est si peu sûre de vouloir rester en dehors de l’UE, vu sa situation économique et financière, que son gouvernement de droite, favorable au statu quo, n’ose pas soumettre la question au référendum. S’il n’y avait pas cette question de morue, les Islandais se seraient peut-être prononcés depuis longtemps en faveur de l’UE.

La Norvège est (encore) riche grâce à son pétrole, mais du point de vue social et économique le Danemark, la Finlande et la Suède, qui font partie de l’UE (et la Finlande de la zone euro), ne me semblent pas si désavantagés que ça par rapport à elle.

Pour ce qui est de la Grèce, la tentative de référendum dont vous parlez s’est produite avant l’élection législative du 17 juin 2012 par laquelle les Grecs ont maintenu de fait une politique gouvernementale pro-UE.

Dans tout cela, où sont les arguments en faveur d’un retrait de l’UE ?

Pourquoi ne pas parler plutôt des moyens de démocratiser celle-ci tout en la rendant plus efficace et moins bureaucratique (moins intergouvernementale) ?

Par exemple, pourquoi ne pas essayer d’envoyer au prochain parlement européen des députés décidés à faire modifier le mandat de négociation de la Commission européenne en vue d’un partenariat commercial transatlantique conforme aux intérêts de l’Union ?

Mais pour cela, il faut voter !

@AH

Il est vrai que l’embargo est pour quelque chose dans la situation de la Corée du Nord, mais la bonne explication est ailleurs. JR

La suisse que vous évoquez vient quand même de désavouer son gouvernement par referendum et ce en remettant en cause un traité bilatéral signé avec l’UE au sujet de l’immigration.
Je pense que l’UE ne pourrait tolérer de telles pratiques en son sein, les États non plus d’ailleurs.

Par quelle marge et avec quel taux d’abstention les Suisses ont-ils pris leur récente décision ?

Est-ce que les Français et les Néerlandais n’ont pas désavoué le TCE, traité multilatéral pourtant signé par tous les membres de l’UE et donc approuvé par tous leurs gouvernements ? En quoi sommes-nous moins libres que la Suisse (surtout à partir du moment où le nouvel article 11 de la constitution sur le référendum d’initiative parlementaire-citoyenne sera en vigueur) ?

Qui vous dit que l’UE tolèrera la tentative suisse de supprimer la liberté de mouvement des personnes tout en continuant de profiter (et combien !) de la liberté de mouvement des marchandises et des capitaux ?

Seriez-vous tellement surpris si une initiative populaire tendant à intégrer la Suisse à l’UE réussissait dans les années qui viennent ? Moi pas : quand on a vu l’Église romaine abandonner le latin et l’Union soviétique s’éclipser en moins de deux ans… et ce qui s’est passé pour le fameux secret bancaire et l’échange automatique des données fiscales…

La Suisse fait partie de l’UE à peu près autant que la France, sauf qu’en l’état actuel des choses elle ne participe pas (ou très peu) à la prise de décision – situation pas vraiment satisfaisante. JR

En fait je comprend mieux pourquoi les décisions issues de référendums sont directement inscrites dans la constitution suisse, ainsi et selon la hiérarchie des normes, ces desicions ont une valeure supérieure aux traités.

Il est exact qu’une disposition inscrite dans la constitution, quelle que soit sa nature, a une force supérieure à la loi et (dans le cas de la France) aux traités, suivant la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Mais remarquez bien que pour ce qui est de la Suisse l’initiative populaire fait l’objet d’un contrôle de constitutionnalité dès le stade de la proposition, et que ce contrôle porte sur la conformité au droit international (donc aux traités, aux moins normatifs, sinon aux traités-contrats), et que dans le cas de la France on modifie la constitution avant de ratifier un traité qui lui serait contraire.

Voyez :

[i]Article 139-3 de la Cosntitution suisse :

Lorsqu’une initiative populaire ne respecte pas le principe de l’unité de la forme, celui de l’unité de la matière ou les règles impératives du droit international, l’Assemblée fédérale la déclare totalement ou partiellement nulle.[/i]

En Suisse, une fois le contrôle constitutionnel effectué, la mesure (quelle que soit son objet – par exemple : la protection des sentiers pédestres, ça vous fera certainement plaisir) est mise dans la constitution et a dès lors la même force juridique qu’une disposition constitutionnelle concernant, par exemple, la révision de la constitution. C’est étrange parce que ça transforme la constitution en un fourre-tout volumineux, mais c’est logique parce que lorsque le souverain (le peuple) se prononce sur quelque question que ce soit, sa décision doit s’imposer à tout le monde.

Le système suisse présente le risque d’arbitraire de la majorité (comme dans le cas de l’interdiction de la construction de nouvelles mosquées. PS : il y a eu lapsus de ma part : je voulais dire « minarets ») : en d’autres termes, d’atteintes à l’état de droit (même lorsque la proposition a été jugée conforme à la constitution). C’est pourquoi (à mon avis) il est impératif de mettre au point un système conciliant souveraineté du peuple et préservation des libertés individuelles. Une fois un tel système approuvé référendairement, on a les deux principes d’une bonne république : démocratie, état de droit. JR

Il est sain que le peuple puisse désavouer des traitès passés par le gouvernement. En ce qui concerne les libertes individuelles ma position est que le rôle du gouvernement n’est pas de gouverner les individus mais de gérer les biens communs. La constitution ne devrait pas confier a un organisme politico administratif le pouvoir de légiférer sur les domaines qui relèvent de la sphère privée ( éducation, sexe, religion ect ). Pour la suisse ce n’est pas les mosquées mais les minarets qui ont fait l’objet d’un referendum, soyons précis sur ce sujet sensible s’il vous plait.

Gouverner, ç’est gérer les biens communs.

Je pense comme vous que le gouvernement (c’est-à-dire le peuple aussi quand il se transforme en organisme politico-administratif dans le cadre de la démocratie directe, ou bien les représentants choisis – c’est-à-dire élus - par lui pour gouverner) ne devrait pas intervenir dans les domaines qui relèvent de la sphère privée ou, pour dire autrement, de l’autonomie personnelle .

Vous avez bien sûr parfaitement raison : dans l’exemple référendaire suisse que je citais, il s’agissait des minarets, pas des mosquées : lapsus de ma part, que je me suis permis de corriger dans mon message antérieur (bien que cela ne change rien à mon argument que même un référendum peut enfreindre l’état de Droit).

Le désaveu éventuel des traités passés par le gouvernement doit intervenir au stade de la procédure de ratification : dans le cas des traités qui entraîneraient une modification de la constitution ou de son application), la ratification devrait se faire par référendum.

Mais une fois qu’un traité a été constitutionnellement ratifié, le principe de l’état de Droit fait que (peuple ou pas) on ne peut revenir dessus que dans les conditions prévues par le traité lui-même ou par le droit international général. Les peuples ne sont pas isolés ; il leur faut tenir compte des droits et des intérêts de tous les peuples, que justement le droit international sert à concilier, et respecter leurs engagements ; étant souverains, ils peuvent ne pas le faire, mais alors ils se mettent dans leur tort.

Du reste, pratiquement tous les traités sont ouverts à la possibilité de dénonciation ou de retrait (cas des traités européens par exemple).

Par contre, les gouvernements doivent avoir toute latitude pour conclure (autrement dit : rédiger et signer – ce qui ne signifie pas ratifier) tout traité qu’ils peuvent juger utile et qui sera ensuite soumis à la rarification directe du peuple ou à celle du parlement : c’est là une des principales fonctions d’un gouvernement. JR

Pour moi un contrat ou un traité n’engage les contractants que durant le temps où ils en sont satisfait.
Si l’or de la signature d’un traité il était spécifié que le peuple pouvait rompre celui ci sur RIC, les co contractants seraient honnêtement avertis des conditions.

Quelqu’un a dit ça autrement : les traités (et les contrats) ne sont que des « chiffons de papier ». Les respecte qui veut.

C’est une façon de voir les choses.

Est-ce que vous accepteriez que les autres vous l’appliquent ? Par exemple que votre locataire cesse de vous payer si ça lui chante, ou que votre propriétaire vous mette à la porte demain ? JR

On ne peut transposer la question ainsi, ce n’est pas un rapport de propr propriétaire a locataire mais plutôt une coopération entre deux personnes indépendantes , toujours volontaire.
L’organisme politico administratif ne peut se prétendre tuteur d’un peuple irresponsable .

Je ne vois pas la différence.

Il n’est pas question ici de « tutelle d’un peuple irresponsable par un organisme politico-administratif », mais du respect d’engagements internationaux dûment ratifiés conformément à des dispositions constitutionnelles directement approuvées par le peuple. JR

Je n’ai rien ratifié.
Mais je ne comprend pas l’obstacle a ce que les traités internationaux puissent être dénoncés par procédure référendaire.

Je suis d’accord Stéphane, un référendum permet de sortir d’un traité calamiteux avec la prise en compte de l’avis du peuple = démocratie.

à Jacques Roman, à propos de votre opinion selon laquelle les traités doivent gravés dans le marbre, même si il sont néfastes. Parlons un peu du Traité de Versailles dont nous savons maintenant jusqu’à quel point il a été calamiteux dans sa volonté de faire payer l’Allemagne jusqu’à provoquer la misère et les troubles qui ont amenés Hitler au pouvoir, vous auriez peut-être fait partie des juristes jusqu’au boutistes qui n’ ont pas voulu passer à autre chose et reconstruire les relations internationales sur une autre base. Vous seriez-vous opposé au Plan Young ?

https://fr.wikipedia.org/wiki/Plan_Young

Ou auriez-vous pensé que seuls les imbéciles ne changent pas d’avis ?

Je n'ai rien ratifié. Mais je ne comprend pas l'obstacle a ce que les traités internationaux puissent être dénoncés par procédure référendaire.
Il y a malentendu.

ll n’y a aucun obstacle à ce que les traités soient dénoncés et ratifiés par référendum : nous parlons de la procédure institutionnelle INTERNE, qui est l’affaire de chaque pays – certains passant par la voie parlementaire, d’autre par la voie référendaire, certains (comme l’État du Vatican ou la Corée du Nord) par d’autres voies.

Par contre, une fois que les « instruments de ratification » ont été échangés avec les autres pays, cela signifie que des engagements réciproques ont été pris. Comme dans un contrat de bail (les traités sont des contrats), on ne peut pas décider unilatéralement de ne plus appliquer telle ou telle clause : il faut suivre les procédures indiquées dans le traité, que le traité ait été approuvé par voie référendaire ou par voie parlementaire.

Je vous donne un exemple : la France est partie au protocole du Conseil de l’Europe abolissant la peine de mort. Ce protocole impose un préavis de dénonciation de (si je me rappelle bien) quatre ans. Supposons que les Français décident par référendum de rétablir la peine de mort immédiatement, sans respecter le préavis, cette décision serait contraire au traité, donc contraire au principe de l’état de Droit, et si les Français passaient outre ils seraient dans l’illégalité internationale.

Les décisions du peuple [de la majorité) doivent être soumises comme les autres au principe de l’état de Droit ; une démocratie sans état de Droit est tout sauf la république. Sortez du principe et vous sombrez dans l’injustice et au bout du compte dans la dictature, l’anarchie ou la guerre civile, ou les trois à la fois.

Si « vous n’avez rien ratifié », ça peut s’expliquer de trois manières :1) Vous avez voté contre et la majorité a voté pour ; 2) vous vous êtes abstenu ; 3) vous n’aviez pas à voter parce que la constitution adoptée par le peuple directement ou indirectement prévoyait d’autres procédures.

Dans le premier cas, il y a eu application des règles de vote démocratiques ; 2) dans le second, vous vous en êtes remis aux autres ; 3) dans le troisième, la constitution ne prévoyait pas que vous votiez : si ça ne vous plaît pas, il faut la faire changer, ce qui est possible directement ou par vos représentants élus à condition que la majorité des votants soient de votre avis.

Si vous voyez un autre moyen de procéder, merci de le signaler. JR

Et bien suivant les principes que je défend la France n’aurait pu signer ce traité concernant la peine de mort parce que il lui aurait été interdit d’aliéner la volonté du peuple pour une quelconque durée.
Les traites doivent durer tant que les parties ( les peuples representès ) en sont content.
Cela aura le merite d’inciter a la prudence les contractants.