Nous avons soulevé le problème des mots à l'envers ; il y a aussi le problème des mots rapés, qui n'ont plus aucun sens, tant ils sont polymorphes. Libéralisme est de ceux là. Capitalisme aussi. Il y aurait je pense un certain travail à accomplir de réanalyse des fonctionnements du genre humain, car tout a changé en un demi siècle.
L'être humain, en tant que bidule à deux pattes, avec une tronche et des mots, n'est plus aux commandes de son destin : il a sécrété des entités qui le gouvernent, le manipulent ; les entreprises, les banques, les médias, tout ce qui a un statut juridique de personne libre sans être pourtant une personne ; il (l'être de chair) n'est plus tout au plus que neurone de ces machins bizarres qui décident à sa place. N'oublions pas qu'on a inventé l'expression "ressources humaines" -> à quel léviathan appartiennent elles, ces ressources humaines ?
C'est vrai.
Mais à la différence du libéralisme qui est une philosophie, le capitalisme est un mode d’organisation des entreprises bien identifié juridiquement. Le capitalisme consiste à partager le pouvoir de décision proportionnellement à la part détenue du capital de l’entreprise.
Il est ici le coeur du problème.
Il a été bien identifié par les premiers socialistes.
Et depuis 200 ans, les idées pour dépasser ce type d’organisation ( pour en finir avec le capitalisme varient ), mais toutes ont plus ou moins en commun une remise en cause de la propriété des entreprises ainsi instituée dans nos lois.
Personnellement je défends l’idée que la propriété d’une entreprise n’a pas de sens. La propriété est par définition un pouvoir absolu sur ce qui fait l’objet de la propriété et une entreprise est un lieu social, c’est pour cela que l’on parle de « société ».
Les interactions entre les humains qui y travaillent ne peuvent pas être régit par un pouvoir absolu, notre civilisation ne supporte plus l’injustice qui découle de ce type de relations, menant systématiquement à des abus de pouvoir.
Et d’ailleurs, par la force des choses, avec le droit du travail, les conventions collectives etc … On voit bien que petit à petit il est mis en place des droits pour limiter le pouvoir donné aux détenteurs du capital d’une entreprise.
Je pense qu’il faut aller jusqu’au bout de l’idée, et comme au niveau de notre régime politique national, il faut étendre les principes démocratiques au fonctionnement des entreprises ( et de toute association humaine d’ailleurs ).
Imaginons une entreprise où une femme et un homme postulent à un emploi. Le 2ème étant plus qualifiée pour le poste, la DRH voulait dans un premier temps choisir le gars. Mais le patron trouvant la femme à son gout intervient et lui dit de l’embaucher plutôt que le gars.
Une fois embauchée, au bout de quelques jours, le patron lui fait des avances devant tous les autres employés. Celle-ci ne sait pas quoi faire, si elle refuse ses avances et risque de perdre son boulot. Bien sur personne ne veut intervenir par peur eux aussi de perdre leur boulot.
Elle refuse finalement ses avances et elle est licenciée.
Voilà ce qui peut se passer dans une entreprise capitaliste.
Imaginons maintenant une entreprise où l’ensemble des personnes qui travaillent dans l’entreprise prennent les décisions.
On voit bien que tous ces abus de pouvoir ne pourraient pas arriver.
Non seulement la personne embauchée aurait été la personne la mieux qualifiée.
Ensuite quelqu’un serait forcément intervenu en cas de harcèlement sexuel sans avoir peur de perdre son emploi.
Et la personne aurait pu refuser les avances pareil sans risquer de perdre son boulot.
Personne n’aurait été licencié abusivement.
Ce que défend le libéralisme, ce n’est pas la liberté d’entreprendre comme ils le prétendent, mais la propriété de l’entreprise.