1789-1948-1984
J’adhère pleinement, à ce jour, à l’introduction d’Étienne.
Je compte réagir en priorité sur les articles scandaleux II-111 et II-112-2 (et II-112.1 également), qui à eux seuls privent si franchement le T"C"E de son caractère constitutionnel. qu’ils méritent d’être commentés pour fixer des BONS grands principes.
Je soulignerais qu’à mon sens, on a là une problématique d’interface entre « Grands principes » d’un préambule de constitution et Droits fondementaux (Charte européenne).
Si on doit évidemment avoir indépendance de la Charte, de la Constitution, des Traités européens (et Traités internationaux dans lesquels l’Europe et les Etats-membres sont partis) il semble impératif que le siège de l’autorité légitime ainsi que la hiérarchie qui affirme la primauté du Droit fondemental sur les lois internes et traités extérieurs soient explicitées, accessibles… et que l’on trouve dans la Charte et dans la constitution l’interface, et la mise en cohésion
J’ajouterais enfin (voir commentaires ci-après) que les notions liées de « siège de l’autorité légitime », de « cadre dans lequel les individus peuvent prendre part à la vie politique, se constituer en syndicats », sont, dans le contexte présent, au coeur de l’idéologie « néo libérale » qui, pour beaucoup, constitue désormais un nouveau fondement « totalitaire », exprimé suivant une conception moderne (non explicitée dans le discours) de l’ « Etat » et du « pouvoir politique ». Aussi, il me semble que cet aspect doit être pris en compte dans la discussion autour du principe élémentaire « une constitution ne doit pas définir, imposer, interdire… de politique économique » (la notion d’idéologie, au sens marxien (pas « marxiste ») étant directement liée à l’émanation dans le discours politique DOMINANT d’un équilibre de pouvoirs économiques en place - son caractère tyrannique étant nécessairement lié à son développement hors du domaine de l’Etat de droit.
Sur la mention : « La référence explicite à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, en tant que norme supérieure, devrait être conservée. »
Mention sur laquelle J. Roman est revenu (« En matière de droits fondamentaux, l’instrument suprême à invoquer (surtout, évidemment, dans le contexte d’une constitution européenne), ce n’est pas la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, mais la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948. »)
Voilà ma première réponse : si la seconde n’enlève rien à la première, je suis a priori d’accord avec J. Roman. Or, à mon sens, ce n’est pas le cas. Du moins, il y a nécessité de redéfinir, expliciter et rendre accessible DANS LA CHARTE, les éléments suivants :
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LE SIEGE DE L’AUTORITE LEGITIME DOIT ETRE REDEFINI CLAIREMENT. TOUTE SUBSIDIARITE DOIT ETRE EXPLICITEE, DE MANIERE ACCESSIBLE
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La reconnaissance de la société civile comme porteur, défenseur du Droit fondemental devrait-être mentionnée explicitement. La distinction entre lobbies et acteurs de la société civile (« advocacy groups ») devrait être clairement posée.
Commentaires :
- Reconnaissance du « droit de résistance à l’oppression ».
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1789 – Article 2 - « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression. »
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1948 – Extrait du Préambule : « Considérant qu’il est essentiel que les droits de l’homme soient protégés par un régime de droit pour que l’homme ne soit pas contraint, en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l’oppression ».
Justement, il n’y a pas d’article (1948) consacré à un éventuel droit fondamental de résistance à l’oppression, celui-ci reste une « bouée de secours démocratique laissé à l’usage de l’individu » mais il semblerait que l’on ait voulu écrire, sans doute en voulant bien faire : « on s’en charge ».
La résistance serait-elle devenue « officiellement superflue »… « maintenant qu’on est en démocratie » ?
C’est en 1948 qu’on a pondu ça ? II a dit quelque chose, de Gaulle ?
Comment vieillissent ce genre de bonnes intentions, là est la question ?
On vient de me dire : aujourd’hui, plus besoin de le préciser, ce droit.
Parlons-en.
La notion d’ « association politique » se serait-elle réduite à la « politique professionnelle » ?
Le droit est-il encore officiellement « en vie » dans la société civile ? S’est-il réduit aux institutions parlementaires, judiciaires ?
J’y reviendrai. Je lance juste ce mot, sans doute un peu caricatural (j’espère) :
La désobéissance civile (civique) est encore un droit (un devoir)…
Reste à savoir comment elle est perçue, et joue. Si la jurisprudence fonctionne bien, OK.
Avec la « subsidiarité »… à voir.
Deuxième chose : Évolution du siège de l’autorité légitime.
J’ai tenté ce titre (1789-1948-1984) car dans la troisième date du titre, il y a une allusion à ces trois notions qu’à ce jour j’ai du mal à découpler : « Fin de l’Histoire », « Totalitarisme », « avènement du capitalisme financier dans la société mondialisée ».
Évoquons la question de la distinction sur le siège de l’autorité :
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1789, « nation souveraine » (Article 3 - « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément. »)
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1948, (Article 21) : « pays » (paragraphes 1 et 2), représentation élue régulièrement (mode, fréquence) par le « peuple », obéissant à la « volonté du peuple » (paragraphe 3).
On a clairement ouvert la question des institutions internationales (Préambule ; articles 11, 22, 26, 29… « nations unies », « droit international »…)
La « souveraineté des nations » n’est plus posée, mais le « droit des peuples à disposer d’eux mêmes » reste affirmé dans la synthèse des Droits fondementaux (Charte), et reste fondée sur une CONCEPTION DE LA DEMOCRATIE REPRESENTATIVE EXERCEE AU SEIN DU « PAYS ».
- « 1984 » - ? au plan international (universel - ONU) – Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, de ne pas être dépossédés de leurs richesses, y compris naturelles, et même de disposer d’un environnement sain, sont reconnues par l’ONU.
Parlez-en à l’OMC, ou aux 16 société transnationales qui comptent, avec 84 États, parmi les 100 premières entités économiques mondiales.
Depuis 1948, le siège de l’autorité et, parralèlement, la hiérarichie entre le Droit fondemental (universel) et les lois, décrets, agissant au niveau des « pays », issus des accords économiques, ont bien évolué DANS LES FAITS, avec la mondialisation économique, « la chute du mur », …, « les grands débuts de la mondialisation économique », la fin du communisme, et sans doute le « début de la fin » du socialisme, avec la perte d’efficience du syndicalisme hiostorique, lié à la modification franche du mode d’investissement, et la dissolution du lien historique entre capital et entreprise.
Bref. 1984. Une convention sur la date, mais un tournant majeur, qu’on ne peut ignorer si on s’attelle aujourd’hui à un pareil projet… Et qui rappelle certain roman, qui bien que très différent de ce qu’on voit aujourd’hui, trouve certaines caractéristiques communes : la Fin de l’Histoire, une guerre devenue gratuite, une aristocratie de forme nouvelle, une rationalité fortement paradoxale qui semble pouvoir maintenir un pouvoir pour des lustres…
[i]Partie que j’entends déplacer, sans doute en dispatchant :
- sur la page « une constitution de définit pas de politique économique »
- un volet « Grands principes - quel patriotisme européen ? » ?[/i]
En termes idéologiques, le néo libéralisme concilie la remise en cause de deux choses pourtant essentielles en démocratie, même dans le modèle libéral : le primat du pouvoir politique (autorité légitime) sur les pouvoirs économiques ; la solidarité, au sein de l’Etat, entre individus, collectivités locales, entreprises, investisseurs, solidarité fondant tout « patriotisme économique »…
… fut-il « pacifiste » vis à vis des autres Etats (voir la notion de "promotion de « relations amicales » entre nations, posée comme idéal dans la Déclaration de 1948). N’est-ce pas là qu’il faut situer le fondement de toute « mondialisation juste », où l’harmonisation se ferait par le haut, que la promotion du progrès social soit réellement traduite sur le plan des rapports économiques.
L’ « idéologie totalitaire » ne se combat pas avec des mots, mais par des mesures de protection contre la domination de pouvoirs économiques particuliers. En l’occurence (dans le contexte présent), on ne peut poser des voeux pieux (« relations amicales entre nation », « promotion du prorès social », « Egalité au sein des nations ») dans les grands principes, et permettre qu’un flou total dans le cadre géographique de la solidarité, de l’autorité politique, du garant du droit, ainsi que la prédominance des indices basés sur une lecture des « moyennes nationales » conduise un leitmotiv désuet mais toujours exprimé de « compétition entre nations » à ces dérives combinées : favoriser les impérialismes ; engendrer l’harmonisation entre nations des niveaux de vie (moyennes nationales) par le bas ; faire exploser les inégalités économiques au sein des nations…
Pour répondre à J. Roman ("(3) Siège du pouvoir. […]"), en reprenant mon message :
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il s’agira de s’assurer au niveau européen et au niveau des Etats membres, que c’est l’ONU qui prime sur l’OMC, et qu’AUCUNE PRESCRIPTION, MESURE DE SANCTION, émanant de l’OMC, du FMI… ne sera appliquée sans qu’il soit établi qu’elle est conforme au Droit international.
- s’agissant des « GRANDS PRINCIPES » de la constitution (non pas de la Charte) il faudra sans doute que soit imposés (je propose ces lignes, et imagine bien qu’il y a nécéessité de nuances. Palons en donc) :
- une forme de domiciliation, identification, des investisseurs, qu’ils soient personnes physiques ou morales
- pour un « patriotisme économique pacifiste et promouvant l’harmonisation pas le haut », imposer que toute ACTION ECONOMIQUE CONDUITE A L’EXTERIEUR DE L’UNION par des individus et personnes morales comptant des ressortissants européens sera soumise à la règlementation de l’Union.
- on pourrait ajouter que l’Union se donne pour principe de ne pas retenir les biens d’individus ou personnes morales qui refuseraient de se soumettre à sa règlementation, du moment que ceux-ci décideraient de renoncer à leur domiciliation juridique, nationalité européenne, pour une autre, se privant alors d’agir comme investisseurs et entrepreneurs sur le territoire de l’Union
- Sans évoquer ici la question des paradis fiscaux. On pourrait également imposer l’usage de l’Euro aux individus et personnes morales ressortissantes de l’Union, et réglementer son usage à l’intérieur comme à l’extérieur, en l’associant au respect des règlementations européennes.
Pour reprendre le problème des « frontières du patriotisme économique » :
Si le « néo libéralisme » prend une nature « totalitaire », au sens de « anti-démocratique », et si cela renvoie à la question d’un flou croissant dans le lieu de siège de l’autorité, de la légitimité, à une « subsidiarité » qui s’exerce dans les faits mais ne trouve pas d’image rationnelle dans le discours (*), le paradoxe est que ce « totalitarisme » ne s’exprime plus au sens de l’État tel qu’on l’appréhende encore : si refondation totalitaire il y a, c’est que le siège de l’État, comme celui du pouvoir politique, a changé.
(*) Rappelons que la légitimité du pouvoir politique est indissociable de sa capacité à donner sens aux discours, événements de la sphère publique. Je reviendrai à cette notion essentielle dans l’autre message, consacré au Droit fondamental et au contre exemple des articles II-111 et II-112 du T"C"E.
Notre ère voit un pouvoir politique apparemment très faible (d’autant plus paternaliste, sans doute, l’autoritarisme compensant la capacité à donner du sens, mais impuissant : effacement de l’État politique, face aux pouvoirs économiques). Le mode néo libéral combine cela avec un effacement de l’État économique (perte du sens de la solidarité au sein de la nation, perte d’intérêt commun à financer des services publics), un phénomène qui semble auto entretenu, mais qui apparait aussi comme leitmotiv dans le discours dominant
Menace pour l’Égalité et menace pour la Fraternité-Solidarité.
L’affaissement de l’État politique a été vécu - et le reste - comme un bien au sens du libéralisme. Outre qu’il y là réminiscence d’une lutte féroce contre l’étatisme socialiste, ennemi historique, il y a source de confusion permanente – effectivement entretenue chez les individus, à commencer par nombre de « libéraux », avec l’affaiblissement toujours souhaité du poids des services publics, qui n’est pas a priori une prescription dans le modèle libéral.
Le paradoxe autour du patriotisme économique est écrasant. S’ajoutant à (se déclinant en) d’autres que l’on peut expliciter, sur le mode libéral, il fonde une « rationalité économique [qui] a réponse à tout » (pour citer Jospin). Et cette assise idéologique basée sur des paradoxes forts est elle-même une caractéristique totalitaire. Elle aliène, divise pour mieux faire régner qui règne…
On a gardé largement la rationalité du mode de la démocratie libérale, d’avant mondialisation, rationalité qui suppose ce patriotisme économique. Mais celui-ci est devenu insensé.
Sans prononcer le terme de « patriotisme économique », on justifie toujours la compétition - entre nations - au nom d’une solidarité à l’intérieur de la nation (entre individus, travailleurs, entreprises, entrepreneurs, actionnaires, collectivités locales…) alors que celle-ci ne cesse de perdre son sens. Parmi les symptômes, la décomposition du syndicalisme. Un syndicalisme devenu inefficient à mesure que prime la compétition entre actionnaires abstraits, apatrides, désimpliqués… et la survie de l’entreprise elle-même, non pas seulement les intérets des travailleus, le syndicalisme historique supposant une solidarité de principe entre capital et entrepreneurs. Mais l’actionnariat abstrait, apatride a remplacé l’investisseur domicilié. Le libéralisme ne pose-t-il pas que c’est au nom du bien commun que l’on prône le droit d’entreprendre ?
Un double symptôme, lié au même phénomène d’abstraction et de « désimplication » du capital est le développement rapide d’un management bien peu moral, combiné à l’explosion des différences de salaires entre cadres supérieurs et cadres écécutants (plus encore qu’entre ces derniers et « bas de grille »), l’explosion des rémunération de cadres supéreiurs en stock-options…
Sur la scène politique, et parmi les « polititologues complaisants », certains, plus actifs s’agissant de promouvoir les arguments de l’idéologie (les seuls pour qui on peut parler de « néo libéral » comme courant politique, en fait) vont jusqu’à rejeter, ringardiser ouvertement la notion de « patriotisme économique »… avec d’autant plus de mauvaise foi, puisqu’ils fondent leurs appels à la guerre économique, plus marqués encore que les « pragmatiques » agglutinés autour d’un centre proéminent, sur la même notion de solidarité nationale fondant le modèle libéral historique.
Pour en reparler, poursuivre, colorer un peu… et sans doute épurer un peu ce long message.