[size=12]Sortir de l’Union Européenne I
Tiré de la retranscription d’une émission « Des sous et des hommes » http://dsedh.free.fr/emissions_passees.htm
[color=#C91EFF]Pascale Fourier[/color] : Et notre invité aujourd'hui sera [color=#8b8303]Jacques Nikonoff[/color] , porte-parole du Mouvement Politique d'Education Populaire. M'PEP.Alors, le 13 juin 2008 les résultats sont tombés : le peuple irlandais a voté non au traité de Lisbonne. Normalement le traité est caduc, mais les gouvernements des pays européens semblent vouloir le faire passer en force. C’est parce qu’il est essentiel de préserver l’Europe… C’est en tous les cas ce qu’on dit…
Jacques Nikonoff: Écoutez, il faut d’abord voir les choses sur le plan juridique. Le projet de traité de Lisbonne, comme tous les traités internationaux prévoit que son adoption se fait avec tous les pays, évidemment. Dès lors qu’il y en a un qui manque, le traité devient caduc. Donc sur le plan juridique, il n’y a aucun doute, ce traité est caduc. Mais on a entendu des déclarations du président de la Commission européenne, des gouvernements, des chefs de gouvernements, indiquant que le processus de ratification allait continuer. C’est-à-dire que, en réalité, ces gens-là considèrent que le traité n’est pas caduc. Alors, ça revient un petit peu à faire comme si le Conseil Constitutionnel, après l’élection présidentielle en France, disait : « Eh bien, oui, Sarkozy est arrivé en tête mais, finalement, on préfère Royal. Les gens ont voté Sarkozy mais, finalement, Royal, c’est mieux. Donc on va mettre Royal. » ou « On va organiser une nouvelle élection présidentielle parce que, manifestement, on ne peut pas avec Sarkozy. » Donc, voilà, ça revient exactement au même, c’est-à-dire que, aujourd’hui, un certain nombre de gens, se sont non seulement acclimatés à la renonciation à la démocratie, c’est-à-dire au suffrage universel, mais considèrent que le suffrage universel ne doit plus être une marque de la démocratie. Voilà la conclusion qu’il faut en tirer. Ces gens-là sont donc extrêmement dangereux. Il y a des braves gens qui considèrent que, finalement au motif de l’impératif européen supérieur, il faudrait retirer le droit au suffrage universel des peuples: ils ne sont pas suffisamment compétents, manifestement, puisqu’ils ne votent pas convenablement, donc nous en sommes là. Et cette seule situation démontre combien il faut sortir de ce système de plus en plus monstrueux.
Pascale Fourier : Et sortir de ce système par quel moyen ?
Jacques Nikonoff : Tout simplement en activant le droit de retrait qui figure dans le projet de traité de Lisbonne. Tout traité international peut être réversible, c’est évident. Quand on passe un accord avec d’autres pays, on peut changer d’opinion, ou la situation peut évoluer, et on peut donc se retirer de cet accord international. Il s’agit donc tout simplement de faire jouer ce droit de retrait. Mais la propagande est telle, depuis des décennies, que cette idée - cette idée pourtant évidente, logique - n’est pas accessible immédiatement. Il faut donc expliquer, patiemment, qu’il est naturel, logique, et tout à fait conforme au droit, de se retirer d’un traité international, c’est-à-dire de se retirer de l’Union Européenne. Et chaque pays peut le faire selon ses lois propres. Ça peut être une décision du Parlement, ça peut être un référendum. Il semble qu’en France, la Constitution l’autorisant, c’est par un référendum que le peuple français devrait être consulté pour savoir s’il faut rester dans ce système monstrueux - comme je disais tout à l’heure - ou s’il faut sortir de ce système du nœud coulant qui étrangle, petit à petit, les salariés, les travailleurs, les gens de tous les jours.Pascale Fourier : Certains vous diraient : « Oui, peut-être que l’Europe n’est pas actuellement idyllique, mais elle le sera plus tard. Il faut continuer la construction européenne. ».
Jacques Nikonoff[color=#111100] :Oui, c’est assez habituel. Ça, c’est valable pour l’Union Européenne, c’est valable dans chaque pays, où on nous dit depuis des décennies : « Il faut se serrer la ceinture, et ça ira mieux demain. » Il n’y a rien de neuf. Sauf que ça fait quand même plusieurs décennies que les mêmes politiques sont appliquées, que les mêmes promesses sont faites. Et on voit qu’à l’échelle européenne, non seulement sur le plan social il n’y a aucune amélioration mais que la situation est pire, et que l’Union Européenne sert finalement les grandes sociétés capitalistes à développer leurs marchés et à museler les salariés. La réalité est là.
Et d’ailleurs la semaine où il y avait ce vote, il y avait cette directive sur le temps de travail, qui est un exemple tout à fait symbolique du sens qui est pris par ce type de construction européenne, qui casse les protections sociales, qui, non seulement prétend protéger contre la mondialisation, mais qui, au contraire, insère l’Union Européenne dans la mondialisation sans aucune protection, et s’est fait l’allié des États-Unis dans sa politique étrangère. Donc, non seulement ce n’est pas la paix, mais c’est la guerre. Et c’est la destruction systématique des systèmes de protection sociale. Alors on ne voit pas, évidemment, en 20 ans, depuis l’Acte Unique principalement, qui a été un tournant important… Les promesses, eh bien les gens n’y croient plus, et ils ont parfaitement raison. C’est la carotte pour faire avancer l’âne.[/color]
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