2A3 Le Parlement doit pouvoir légiférer souverainement et contrôler les institutions, notamment le gouvernement

Bonsoir

Pourquoi ne pas réfléchir sur une élection « gouvernementale » d’où serait élu le gouvernement (une liste définie ou un chef de gouvernement qui nomme…) et une assemblée nationale, peut-être élue à la proportionnelle .

Le président n’existant plus dans ce cas… oui, je sais, j’insiste lourdement.

au revoir

Dans un régime parlementaire, le gouvernement pourrait-être révoqué, mais laisser sa désignation dépendre du suffrage populaire semble séduisant.
Le risque est alors la lassitude des électeurs voulue par les partis afin de « reprendre la main » au moyen de votes à répétitions, en défaisant souvent les gouvernements.
Le fait que, s’il y a deux chambres, elles doivent approuver ne va pas beaucoup influencer les choses.
À moins que la deuxième chambre ne soit plus le Sénat actuel (ce que je souhaite).
L’avantage de l’élection directe du gouvernement est sa légitimité intrinsèque.
Et ainsi n’est pas élu un irresponsable, politiquement parlant, bien sûr.

J’arrête de me répondre …

[b]Régime des partis[/b]

Le régime des partis est le régime d’assemblée dans lequel le gouvernement peut être nommé, changé et renvoyé à tout moment par de simples votes du parlement, c’est-à-dire par les partis représentés au parlement, en dehors de toute consultation électorale. C’est le gouvernement des partis, qui changent la composition du gouvernement et de la majorité parlementaire — et donc la politique du pays — quand ça leur chante (une fois par an en moyenne), sans consulter personne que les appareils de parti. C’est le régime de la IVe république et c’est apparemment celui que vous proposez (M. Montebourg aussi, j’en ai peur).


Excusez-moi mais ce qu’on a pu voir ces 5 dernieres années, c’est nombre de remaniement ministériels, nombre de changements au gouvernement

Il me semble quand même évident que, même si Chirac a gardé le contrôle parcequ’il nommait lui même le premier ministre, le reste des ministres dépendait clairement des choix de l’ensemble du parti de l’ump ; le fait que Sarkozy soit nommé numéro 2 du gouvernement et ministre de l’intérieur n’est quand même pas indépendant du fait qu’il soit devenu chef de l’ump.

Alors, le rôle du parti politique majoritaire est toujours aussi important.

Et puis, franchement, cela ne vous gêne pas que le 1er ministre serve de fusible au président ???

Je suis désolé mais un régime parlementaire permettrait :

  1. de ne plus avoir de pb de cohabitation
  2. de limiter justement les changements de politique et les remaniements ministériels, vu qu’ils ne seraient plus arbitraires sur la décision d’un président tout puissant, aussi élu au suffrage universel qu’il soit, mais obtenus uniquement par un vote
  3. les ministres auraient une légitimité qu’actuellement ils n’ont absolument pas
  4. l’exécutif au niveau du président serait réellement indépendant, alors qu’actuellement rien n’est réellement indépendant
  5. la personnalisation serait moindre, on y gagnerait énormément en qualité du débat politique

Alors, effectivement, je n’ai pas connu la 4ème république, mais il me paraît évident que c’est un régime parlementaire qu’il faut mettre en place, car c’est au parlement qu’est le mieux représenté le peuple.

Évidences

Sandy (2291).

Il devrait vous sembler évident aussi que même si les gouvernements ont été assez souvent remaniés ou changés sous la Ve république, c’est toujours dans la majorité portée au pouvoir par les électeurs qu’ont eu lieu ces changements.

Alors que sous la IVe république les partis représentés au parlement avaient tout pouvoir de se recombiner comme ils le voulaient sans intervention d’une autorité supérieure (le président élu par le peuple), et de modifier le gouvernement.

Et il me semble évident, à moi, que le régime parlementaire n’est pas, loin de là, une garantie de représentation optimale du peuple : voyez ce qui s’est passé au Royaume-Uni avec l’affaire d’Iraq : le parlement approuvant la guerre, et (selon les sondages) le peuple la désapprouvant. Et voyez aussi ce qui s’est passé pour la constitution européenne. JR

La quatrième valait mieux que la cinquième : mieux vaut un vrai débat au prix d’une certaine instabilité que l’assassinat du débat pour garantir la stabilité :confused:

La quatrième République sert d’épouvantail pour nous refuser la proportionnelle et nous imposer, de fait, un autre régime de parti, sans débat réel, celui-là : le régime du parti majoritaire.

Pourtant, l’argument ne tient pas, à mon avis : si la quatrième était effectivement instable, rien ne prouve, cher Jacques, le lien de causalité entre la responsabilité du gouvernement devant le Parlement et l’instabilité de ce gouvernement. Presque toutes les démocraties du monde sont des régimes parlementaires où le gouvernement est responsable devant le parlement sans pour autant déclencher d’instabilité notable. Je pense plutôt que la vraie cause de l’instabilité de la quatrième, dans un contexte extérieur difficile, était la proportionnelle intégrale qui morcelait les groupes politiques au point de donner aux petits partis, —nécessaires pour constituer des majorités—, un pouvoir excessif par rapport à leur poids électoral (d’où un chantage permanent).

Il est commode, — mais peu convaincant —, de se servir de la quatrième comme d’un chiffon rouge pour nous priver, —concrètement—, de toute réforme du mode de scrutin.

Le mode de scrutin de la cinquième République est INIQUE. C’est vrai qu’en bâillonnant totalement toutes les petites voix dissidentes, on a un régime plus « stable », un peu comme celui des Chinois, mais [bgcolor=#FFFF99]la stabilité n’est pas bonne en soi ; elle n’est en tout cas pas du tout prioritaire sur le débat[/bgcolor], à mon avis.

Mais nous en parlons depuis longtemps, avec Jacques, et chacun semble sourd aux arguments de l’autre :confused:

Amicalement.

Étienne.

Uninominale/proportionnelle/partitocratie

Etienne (2293).

D’accord que le scrutin uninominal à deux tours présente des inconvénients : il a néanmoins pour lui le principe démocratique (la moitié des voix + 1), et on ne peut le considérer comme inique que si l’on rejette ce principe.

Si l’on passe à la proportionnelle, un seul système est acceptable démocratiquement parlant : la proportionnelle intégrale sur la base « un député par X électeurs ». La proportionnelle partielle est (démocratiquement parlant) inacceptable dans son principe. En effet, supposons qu’on fixe la barre à 5 % : comment justifier en démocratie que la voix d’un électeur appartenant à un groupe 4, 99 % ne sera pas comptée alors que celle d’un électeur appartenant à un groupe 5 % le sera ? Ou alors, on en viendra aux apparentements (comme sous la IVe république), avec les résultats qu’on sait.

D’ailleurs, la proportionnelle partielle ne diffère pas de l’uninominal à deux tours dans son principe : il s’agit dans les deux cas de dégager plus ou moins facilement (moins facilement avec la proportionnelle partielle) une majorité de gouvernement.

Je crois que le système de la Ve république représente dans l’ensemble un excellent équilibre : il y a un président élu sur la base de grandes orientations : faute de mieux, disons plutôt à gauche ou plutôt à droite - c’est-à-dire selon une distinction très claire parfaitement comprise de l’électorat. Toutefois, je modifierais la constitution pour expliciter que le président, une fois élu, ne représente plus la majorité de l’électorat mais l’ensemble des Français, et qu’il doit lui être interdit de se conduire en chef de majorité, même si son rôle devrait consister à maintenir les orientations générales sur lesquelles repose son élection : sachant que c’est le gouvernement qui gouverne, et que le président de la Ve république n’a jamais été un monarque - même sous de Gaulle, malgré son énorme influence.

L’élection législative permet au peuple de corriger ou d’équibrer ces orientations par une politique gouvernementale qui peut, on l’a souvent vu, ne pas correspondre à la sensibilité politique du président. La possibilité de cohabitation est à cet égard une avancée majeure de la Ve république : elle donne la possibilité aux deux tendances majoritaires d’être représentée simultanément au double exécutif président-gouvernement. D’autre part, la possibilité de dissolution du parlement permet d’éviter les blocages du système présidentiel classique (celui des EUA par exemple).

Donner toutes les responsabilités politiques et institutionnelles au chef du gouvernement issu du parlement serait, je le maintiens, revenir à la partitocratie de la Ve république.

Peut-être que la solution du problème représentatif tient à une réforme du Sénat, qui serait élu, lui, au suffrage universel intégralement proportionnel sur une base régionale avec des pouvoirs législatifs permettant de compenser l’élection uninominale à l’assemblée.

Cordialement. JR

PS : Étienne, vous écrivez : « La quatrième valait mieux que la cinquième : mieux vaut un vrai débat au prix d’une certaine instabilité que l’assassinat du débat pour garantir la stabilité ». "

Vrai débat", sous la IVe ? Oui, entre partis représentés à l’Assemblée - mais le peuple français était laissé complètement à l’écart des jeux politiciens : par exemple, il est allé se battre en Algérie (et auparavant en Indochine) sans qu’on lui demande vraiment son avis. Sans doute faut-il l’avoir vécu soi-même pour en être convaincu : on a raison de dire que les expériences personnelles sont incommunicables !

Enfin, rien n’empêche de réformer la constitution de la Ve de manière à rendre le Parlement plus autonome dans ses débats.

[bgcolor=#FFFF99]Contre les Phonographes Haut-Parleurs : une assemblée qui ne se réunit pas[/bgcolor]

Alain est un étonnant philosophe, vraiment. Inépuisable. J’en retranscris progressivement certains « Propos » sur la partie Blog de ce site.

Je vous livre ici un Propos qui défend une idée admirable — quoique contestable, peut-être : le régime de tumulte qui règne dans les assemblées conduit le penseur à imaginer une assemblée qui ne se réunit pas.
« La raison ne mûrit ses arrêts que dans le silence », dit Alain.
Un texte passionnant pour exciter notre réflexion.

[color=black]« [b]La liberté de parole, dans les assemblées, se nie aussitôt elle-même[/b], et nous voyons s'organiser, si l'on peut dire, [b]un régime de tumulte[/b] qui n'est qu'un nouveau jeu de la force. C'est le plus redoutable de tous peut-être, parce qu'[b]il agit directement contre la pensée[/b], qui est chose flexible, et qui s'offense même en solitude, si l'on n'y prend garde. Et le mal n'est pas seulement qu'on ne puisse exprimer une opinion ; [b]le pire mal c'est qu'on n'en peut plus former aucune[/b] ; il faut se tendre et s'irriter en quelque sorte par précaution. Un seul homme, ainsi, dès qu'il a compris la puissance des passions, devient le maître d'une assemblée, piquant les uns et les autres à la manière des mouches bovines. Par ce moyen tous les hommes sont jetés aux extrêmes, et les modérés à l'extrême des modérés, qui est un état violent, comme on l'a dit.

Je pensais là-dessus que les assemblées devraient perdre leur importance, dans un temps où tout ce qu’il faut savoir finit par être imprimé. Et si le vote d’arrondissement ne peut nous sauver, nous trouverons peut-être mieux. L’idée d’un Sénat conservateur est par elle-même bonne ; mais tout est perdu par le lieu commun, qui s’établit d’abord par les conversations et règne finalement par le discours public. [/color]La raison ne mûrit ses arrêts que dans le silence. Aussi l’on inventera peut-être quelque Sénat d’hommes [bgcolor=#FFFF99]choisis par ceux qui vivent autour d’eux[/bgcolor], aussi par des corps de métiers, aussi par des savants, par des instituteurs, par des écrivains ; mais l’important serait que [bgcolor=#FFFF99]ces sénateurs ne se réunissent jamais[/bgcolor], et pensent les uns devant leur champ, les autres dans leur atelier ou dans leur bibliothèque. Il va de soi que les journaux et les livres leur seraient envoyés, ainsi que toute pétition, tout manifeste ; et les plus habiles à écrire, qui sont aussi les plus prompts à lire, pourraient préparer le travail des autres. Ils pourraient délibérer et discuter avec les citoyens, mais non point entre eux, et ne voteraient jamais que de loin et sous un secret inviolable. Ainsi les menaces et les injures tomberaient dans le vide.

[bgcolor=#FFFF99][color=black]Je ne crois point qu’un tel corps pourrait commodément formuler des lois ou régler les dépenses et les contributions ; mais il agirait énergiquement par quelque droit de veto, soit contre certaines lois, soit contre certains hommes. Qu’on me permette ces jeux d’imagination, qui peuvent éveiller ou réveiller une idée juste. Supposons qu’on vienne me demander, à la mode des anciens, quelque constitution qui puisse sauver l’État de violence et de misère ; c’est une loi de ce genre-là que je proposerais. Il en résulterait une sorte de gouvernement occulte par le peuple, non point par le peuple assemblé, mais par le peuple dispersé ; et l’on verrait renaître ce que j’appelle la Terreur Radicale, régime que l’Académicien considérera toujours avec horreur, et le simple citoyen avec une satisfaction sans mélange ; car tous les maux publics et politiques, sans exception, résultent de l’infatuation incroyable des pouvoirs, qui n’ont jamais pensé, sous aucun régime, que l’opinion secrète des citoyens pût changer la marche des affaires. Tel est le sens de ce mot applaudi, et qui restera : « Si quelqu’un l’ose dire ici, il en répondra à la tribune. » Ainsi parle le pouvoir, au milieu de sa garde vociférante ; comme si un citoyen n’avait pas le droit de se défier d’un homme public sans avoir à en expliquer les raisons. Contre les Phonographes Haut-Parleurs, il nous faudra trouver quelque ruse.[/color] »[/bgcolor]

Alain, 31 mai 1922.


Vous avez noté qu’Alain imagine qu’une seule des deux assemblées ne se réunirait pas : celle qui doit réfléchir de façon indépendante avant d’éventuellement exercer un droit de veto. La première chambre —celle qui écrit les lois— serait toujours assemblée pour que puissent s’exprimer publiquement les opinions dissidentes, pour que toutes les thèses puissent être attaquées et défendues devant tout le monde, pour que les points de vues puissent se rapprocher —quand c’est possible— grâce au débat honnête, pilier fondateur de la démocratie.

Cette organisation semble compatible avec l’idée du double mode de scrutin : élire la première chambre —celle qui écrit les lois—, et tirer au sort la deuxième chambre —celle qui contrôle les lois : [bgcolor=#FFFF99]c’est cette deuxième chambre, tirée au sort, qui ne se réunirait pas[/bgcolor].

Qu’en pensez-vous ? :confused:

Bonjour.

J’ai bien réfléchi à tout ça et je comprends effectivement que la proportionnelle morcelle l’Assemblée nationale et oblige la parti majoritaire à composer avec d’autres partis pour former une majorité.

Mais, comme l’a dit Étienne, pour moi, c’est le comportement normal que devrait avoir l’Assemblée nationale : pour chaque différente question, logiquement et idéalement, la majorité devrait être différente, chaque membre du Parlement étant différent (concrètement, ce qui se passe, c’est que chaque député semble voter conformément à la consigne de son camp), et l’obligation d’avoir à trouver du monde pour former une majorité et à composer avec des partis différents du sien est vertueux à mon sens, car cela oblige au débat, et cela réduit les possibilités qu’un texte arbitraire ou injuste puisse être voté, alors qu’on voit très bien que, quand l’assemblée devient simplement une chambre d’enregistrement des projets de lois du gouvernement, l’arbitraire et l’injustice sont fortement possibles.

Donc, si vraiment, pour tous ces bons cotés, le seul mauvais coté est qu’il peut y avoir est une plus grande instabilité, ne faut-il pas alors plutôt aller réfléchir à propos de l’outil institutionnel qui permet ces instabilités, c’est-à-dire la motion de censure contre le gouvernement ?

Si, comme vous le dites Jacques, vous pensez que le peuple était tenu à l’écart des jeux politiciens, alors ne faudrait-il pas, tout simplement, dans ce genre de cas où l’Assemblée tente de révoquer un gouvernement, faire intervenir ce peuple ? La facon dont il interviendrait (référendum / jury citoyen etc … ) restant à débattre.

Démocratie directe

Sandy (votre 2566).

Il me paraît très difficile de faire intervenir le peuple dans les relations législatif-exécutif : un référendum ne se fait pas dans la minute, et la décision de renvoyer le gouvernement peut être très urgente. C’est parce que le peuple ne peut pas tout faire lui-même qu’il nomme des représentants.

En ce qui concerne la proportionnelle, le système de la liste nationale (sur laquelle seraient automatiquement reportées les voix non utilisées du premier ou du second tours) me paraîtrait faire l’affaire. S’il faut mettons 20 000 voix en moyenne pour être élu au scrutin local (de circonscription), on pourrait exiger 25 000, 30 000, & voix pour être élu sur la liste nationale (la justification étant qu’un élu qui n’a pas fait campagne localement et dont le rang sur la liste nationale dépend de son parti a moins de légitimité électorale que le candidat « ordinaire »). Avec ce système, il serait possible, de doser la part de proportionnelle à volonté sans devoir procéder à deux élections distinctes. JR

(Sandy 2566)

Je pense également que la recherche d’une majorité n’est pas nécessaire. Ce qui est nécessaire, c’est un outil de dialogue efficace (à inventer et à pratiquer mais j’ai ma petite idée…) de façon à ce que les débats ne finissent pas en pugilats mais promeuvent le respect des visions différentes, leur confrontation constructive et la véracité des propos, tout en conservant l’unité du groupe parlementaire.

Car ce ne sont pas les mauvaises décisions du Parlement qui posent soucis, c’est le manque d’unité du Parlement derrière ces décisions qui entraîne la débacle. En effet, si l’unité est conservée après une prise de décision (càd si tout le monde la soutient) et si cette décision est mauvaise, l’Assemblée sera unie pour faire face aux problèmes et ne s’entre-déchirera pas. Personne, aucun groupe ne tentera de tirer la couverture à lui. Et on évitera ainsi les réformes « yoyos », càd celles qui sont mises en place pour « contrer » les réformes du parti adverse.

En somme, nul besoin d’une majorité : il faut seulement que les personnes réunies en Assemblée soient d’accord pour rechercher la Vérité et rien que la Vérité. Le consensus arrive par la discussion, pas par une logique d’écrasement d’une majorité.

Benoit

Mogette c’est irréaliste je pense. Cela dépend des questions évidemment, mais généralement les idées sont vraiment totalement contraires entre la droite et la gauche et un consensus ne peut absolument pas être trouvé. C’est pour cela que l’on doit trancher avec un vote à la majorité. La recherche de consensus est effectivement la meilleure forme de prise de décision, mais cette forme de prise de décision ne fonctionne que si elle ne concerne qu’un petit groupe d’individus ou si les questions font consensus naturellement.
Au delà d’un certain nombre de personnes, ce type de prise de décision perd de son efficacité et devient source de blocage, car trop nombreux et trop différents, ( Les députés représentent toute la diversité de 60 millions de personnes … ) même avec les meilleures volontés du monde, le consensus devient impossible à obtenir.

À quoi sert une majorité parlementaire

Je crois que c’est moi qui avais indiqué à Étienne cette citation d’Alain (n°2469) qui a, semble-t-il, apporté la discussion récente, lancée par Sandy.

Suite à cette lecture, j’avais posté une réflexion en 4 parties sur le fil « 3A1 Désignation des représentants politiques : élections (et avec quel mode de scrutin) ou tirage au sort ? » : http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?pid=2444#p2444

Une chose me paraît assez évidente : la recherche d’une majorité parlementaire a priori, c’est-à-dire dès l’élection, en termes d’alliances de partis, n’est pas justifiée par la fonction législative du parlement, mais par celle qui en fait un contrôleur du gouvernement (émanant de lui). C’est bien au nom de la stabilité gouvernementale qu’on est sommés d’accepter « en bloc » un mode de composition des assemblées législatives qui est très peu respectueux de la pluralité, du droit de vote personnel des parlementaires (pourtant affirmé par l’article 27 de la constitution), et au final, des vertus de la discussion.

Ayant fait cette distinction, j’ai proposé qu’on envisage de « séparer les assemblées et les fonctions pour améliorer le choix des processus de sélection ». C’est le thème de la série des 4 messages que j’ai cités, et que je vous invite à lire.

Gouvernement et parlement

Sam (3205).

Pas d’accord.

Si le rôle du parlement est seulement de contrôler le gouvernement, alors il va de soi que le gouvernement ne doit pas émaner du parlement : sinon on tombe dans le régime d’assemblée (confusion des pouvoirs exécutif et législatif), c’est-à-dire, en pratique, dans le régime des partis.

Le parlement, composé des représentants du peuple, est bien le principal artisan des politiques nationales. Cela justifie qu’il puisse renvoyer le gouvernement si les politiques de ce dernier (et du président de la République) ne lui plaisent pas. Il va de soi que les électeurs élisent leurs représentants comptes tenu des politiques soutenues par ces derniers.

L’adoption de la loi - expression de la volonté générale - est forcément politique.

Sinon, qui définira les politiques ? JR

Jacques,

je n’ai pas trop compris le sens de votre message et en quoi il répond au mien.

Le terme « contrôleur du gouvernement » était un peu mal choisi ; je ne visais rien d’autre par ce terme qu’un « contrôle » politique. Je suis bien évidemment pour ne pas donner à ceux dont le gouvernement émane le pouvoir de les contrôler autrement.

Il s’agissait de dire que si on s’évertue à rechercher une majorité parlementaire a priori, dès l’élection, c’est non pas une contrainte liée à la fonction législative du parlement, mais pour que puisse en émaner un gouvernement stable. Or, rien n’impose, a priori, qu’on étende une même contrainte de composition (l’absence de proportionnelle, pour faire vite) à toutes les fonctions parlementaires, notamment à la fonction législative.

La fabrique des lois est une affaire politique, oui (dans le respect de la constitution, donc dans un certain cadre juridique). Je n’ai jamais proposé de retirer aux représentants (élus ou tirés au sort) le pouvoir de faire les lois. J’ai suggéré qu’on pourrait séparer plusieurs fonctions parlementaires en les attribuant à plusieurs assemblées séparées, ce qui permettrait de définir, pour chacune, un mode de désignation adapté à sa fonction.

Sam, je me référais plus précisément à l’affirmation que « la recherche d’une majorité parlementaire a priori, c’est-à-dire dès l’élection, en termes d’alliances de partis, n’est pas justifiée par la fonction législative du parlement, mais par celle qui en fait un contrôleur du gouvernement (émanant de lui) ».

Pour moi, au contraire, c’est la fonction législative (expression de la volonté générale) qui exige la recherche a priori d’une majorité parlementaire chargée d’exprimer la volonté générale, pas à la fonction de contrôle, celle-ci-débordant largement le politique et pouvant (devant) être exercée par n’importe quelle majorité avec les mêmes résultats objectifs.

Exemple : Dans l’exercice de sa fonction politique, il est tout à fait légitime que le parlement se déclare en faveur de la ratification du traité de Lisbonne. Dans l’exercice de sa fonction de contrôle, il devrait exiger que la ratification passe par le référendum : car là il ne s’agit plus de politique, mais de la procédure mise en oeuvre par le gouvernement. En acceptant la ratification parlementaire, le parlement confond sa fonction politique et sa fonction de contrôle (la fin et les moyens). JR

[bgcolor=#FFFF99]Scoop : Adam Smith radicalement opposé aux profits élevés et aux LOBBIES des patrons :
Ne faites jamais confiance à un industriel ou à un marchand pour proposer une loi »[/bgcolor]

http://fr.wikisource.org/wiki/Recherche_sur_la_nature_et_les_causes_de_la_richesse_des_nations_-_Livre_I%2C_Chapitre_11

Dans ce fil de discussion qui cherche à protéger le pouvoir législatif du Parlement, et pour critiquer amèrement l’Union européenne qui donne beaucoup trop de pouvoirs aux milliers de lobbies qui infestent les rues avoisinant le Parlement et la Commission, voici une citation très savoureuse du maître à penser des oligarques qui prétendent être « libéraux » :

[...]

Ceux qui emploient l’ouvrier constituent la troisième classe, celle des gens qui vivent de profits.

C’est le capital qu’on emploie en vue d’en retirer du profit, qui met en mouvement la plus grande partie du travail utile d’une société. Les opérations les plus importantes du travail sont réglées et dirigées d’après les plans et les spéculations de ceux qui emploient les capitaux ; et le but qu’ils se proposent dans tous ces plans et ces spéculations, c’est le profit.

[bgcolor=#FFFF99]Or, le taux des profits ne hausse point, comme la rente et les salaires, avec la prospérité de la société, et ne tombe pas, comme eux, avec sa décadence. Au contraire, ce taux est naturellement bas dans les pays riches, et élevé dans les pays pauvres ; jamais il n’est aussi élevé que dans ceux qui se précipitent le plus rapidement vers leur ruine.[/bgcolor]

L’intérêt de cette troisième classe n’a donc pas la même liaison que celui des deux autres avec l’intérêt général de la société. Les marchands et les maîtres manufacturiers sont, dans cette classe, les deux sortes de gens qui emploient communément les plus gros capitaux et qui, par leurs richesses, s’y attirent le plus de considération. Comme dans tout le cours de leur vie ils sont occupés de projets et de spéculations, ils ont, en général, plus de subtilité dans l’entendement que la majeure partie des propriétaires de la campagne.

Cependant, comme leur intelligence s’exerce ordinairement plutôt sur ce qui concerne l’intérêt de la branche particulière d’affaires dont ils se mêlent, que sur ce qui touche le bien général de la société, leur avis, en le supposant donné de la meilleure foi du monde (ce qui n’est pas toujours arrivé), sera beaucoup plus sujet à l’influence du premier de ces deux intérêts, qu’à celle de l’autre.

Leur supériorité sur le propriétaire de la campagne ne consiste pas tant dans une plus parfaite connaissance de l’intérêt général, que dans une connaissance de leurs propres intérêts, plus exacte que celle que celui-ci a des siens. C’est avec cette connaissance supérieure de leurs propres intérêts qu’ils ont souvent surpris sa générosité, et qu’ils l’ont induit à abandonner à la fois la défense de son propre intérêt et celle de l’intérêt public, en persuadant à sa trop crédule honnêteté que c’était leur intérêt, et non le sien, qui était le bien général.

[b]Cependant, [bgcolor=#FFFF99]l'intérêt particulier de ceux qui exercent une branche particulière de commerce ou de manufacture est toujours, à quelques égards, différent et même contraire à celui du public.[/bgcolor]

L’intérêt du marchand est toujours d’agrandir le marché et de restreindre la concurrence des vendeurs. Il peut souvent convenir assez au bien général d’agrandir le marché, mais de restreindre la concurrence des vendeurs lui est toujours contraire, et ne peut servir à rien, sinon à mettre les marchands à même de hausser leur profit au-dessus de ce qu’il serait naturellement, et de lever, pour leur propre compte, [bgcolor=#FFFF99]un tribut injuste[/bgcolor] sur leurs concitoyens.

[bgcolor=#FFFF99][color=red]Toute proposition d’une loi nouvelle ou d’un règlement de commerce, qui vient de la part de cette classe de gens, doit toujours être reçue avec la plus grande défiance, et ne jamais être adoptée qu’après un long et sérieux examen, auquel il faut apporter, je ne dis pas seulement la plus scrupuleuse, mais la plus soupçonneuse attention.[/bgcolor]

Cette proposition vient d’une classe de gens dont l’intérêt ne saurait jamais être exactement le même que l’intérêt de la société, qui ont, en général, intérêt à tromper le public et même à le surcharger et qui, en conséquence, ont déjà fait l’un et l’autre en beaucoup d’occasions.[/color][/b]


Adam Smith, « Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
Livre I, Fin du chapitre 11 : « Des salaires et des profits dans les divers emplois du travail et du capital »
http://fr.wikisource.org/wiki/Recherche_sur_la_nature_et_les_causes_de_la_richesse_des_nations_-_Livre_I%2C_Chapitre_11

Renvoyez cette perle à tous ceux qui utilisent Adam Smith pour justifier les politiques néo-libérales, alors que ces politiques sont en fait — ça se voit de plus en plus clairement — anti-libérales. Les lobbies de marchands, à qui l’Union européenne donne plus pouvoirs qu’aux parlementaires, sont une maladie mortelle pour la société.

dans un régime parlementaire, sans président mais juste avec un gouvernement et son 1er ministre en tant que chef du gouvernement, que devient le droit de dissolution de l’assemblée ?

à propos de la motion de censure, dans le style système farfelus, que pensez-vous d’un systèlme où la motion de censure entraine un vote d’un jury citoyen mais engage en même temps la responsabilité de celui qui l’a déposée

ainsi si le jury citoyen valide la motion de censure, le gouvernement est dissout
si le jury citoyen l’invalide, celui qui l’a déposée doit démissioner

A mon avis, et cela n’engage que moi, le Parlement ne doit en aucun cas être à la tête des institutions.

Sous les IIIe et IVe Républiques, on a bien vu à quoi avait mené une souveraineté populaire exacerbé par un Parlement omnipotent édictant des lois universelles. Certes, il y avait la course aux portefeuilles et le cumul des mandats par les gouvernants & ceux qui souhaitaient l’être parmi les parlementaires (avec le copinage et tout le tralala), ce qui sera indubitablement interdit avec cette Constitution, mais il ne faut pas oublier que la Ve République « humilie » le Parlement pour la simple & bonne raison que pour qu’il fonctionne bien, il faut lui-mettre une muselière (Principe des freins & contrepoids de Montesquieu, qui devrait être également pris en compte dans l’Art. I-5. Ici, il faut juste éviter le régime d’assemblée, le même que l’on a connu en 1792 avec Robespierre et sa réelle démocratie directe…). Les dérives parlementaristes sont un poison (tout comme la présidentialisation du régime que l’on voit actuellement, une sorte de monarchie républicaine).
La seule institution qui devrait être au dessus des autres doit être le Conseil constitutionnel, seul garant de l’efficacité des lois et de la supériorité de la Constitution sur toutes les autres normes (selon le modèle Kelsenien). Regardez, sous la IVe République, ce qu’ont subi les citoyens : avec un gouvernement ayant une moyenne de vie de 3 mois, le plus court ayant été de 4 jours, le plus long de 3 ans, et également des lois n’ayant aucune limite (il ne faut en aucun cas une universalité de la loi ni une primauté de la loi sur toutes les autres normes!).

C’est pourquoi les articles 34, 37 et 41 de la Constitution de la Ve République doivent être étudiés pour entrer en compte dans la Constitution ici-présente : ces articles mettent sous la couronne de la Constitution les lois édictées par le Parlement et les limites que les représentants ont pour créer les lois. Ce n’est peut-être qu’un caprice, mais au moins cela évitera à des représentants peut scrupuleux de pondre des lois allant trop loin et que la Constitution ne puisse rien contre cela. Egalement, et cela rentre dans la perspective précédemment vue : la loi ne doit pas déborder de son cadre, et le règlement ne doit pas déborder sur la loi. Il faut également interdire le principe de l’ordonnance (fait que le Parlement délègue pour un temps limité au gouvernement les moyens de créer des règlements ayant une portée législative). Mais il ne faut pas interdire les règlements : ils permettent une cohésion entre les matières de la loi, qui est du ressort du Parlement, et les moyens de les mettre en application sur le territoire, qui est du ressort du pouvoir exécutif (oui, car si l’on parle de séparation des pouvoirs, il faut que la création et l’exécution de la loi soit séparée également, permettant une encore plus grande dépersonnalisation du pouvoir), le règlement devant uniquement servir à faire de facto appliquer la loi sur le territoire, sans pouvoir toucher à son fond (cad le moyen de droit qu’elle édicte) (Cf. La pyramide des normes de Kelsen). Enfin, les décrets ne doivent pas être supprimés non plus : ils sont le moyen, pour le gouvernement, de préparer un plan d’action selon ce que la Constitution leur permet de faire et leur demande de faire.

C’est pourquoi supprimer le décret ne réglerait en rien les problèmes : le problème sous la Ve République est que le décret est dérivé dans sa finalité par la pratique des gouvernants, mais également c’est notre Constitution elle-même qui permet cela. Faire une Constitution carrée au niveau des gouvernants et du législatif permet une meilleure cohésion entre tous les pouvoirs. Le seul moyen d’y arriver est de faire une Constitution qui ne soit pas floue pour éviter les dérives de la pratique comme nous avons pu l’observer depuis plus de cinquante ans sous notre République actuelle. La Constitution étant floue, elle ne permet pas de faire une fiable théorie de ce qui devrait être fait de facto : la pratique mène à la dérive quand il n’y a pas de système de guidage mis sous les yeux des gouvernants, qui peuvent abuser de leur statut.

Je vous remercie.

P.S. : Et également, vous demande pardon pour le ton normatif de mes phrases. Je ne cherche qu’à émettre des suppositions et ne veux pas prétendre à la vérité non plus ^^

Votre intervention, très lucide certes, mais à laquelle je reprocherai de n’être qu’historique, a le mérite de (re)poser un problème important:
Qu’est-ce au juste que le pouvoir, y en a-t-il un ou plusieurs, et, en ce dernier cas quel en est l’ordre et où cette préséance se règle-t-elle?

En effet, et au contraire de l’antienne habituelle sur l’existence des trois pouvoirs, législatif, exécutif et judiciaire, je pense qu’il n’existe qu’un seul pouvoir, celui qui a le droit d’édicter (et donc de modifier) les règles que chacun a le devoir de respecter.

1 Exit donc le pouvoir judiciaire.

Son pouvoir s’inscrit dans les limites de la loi qu’il est censée faire appliquer. Son degré de liberté n’existe pas vraiment, il s’inscrit dans les interstices du « non prévu, non imaginé » qui est celui de tout système législatif, mais il ne peut s’agir que d’interpolation dans un domaine balisé, et en aucune façon, d’excursion dans un domaine non examiné par la la loi existante.
La justice est affaire de professionnels objectivement désignés par leurs compétences

2 Exit aussi le pouvoir exécutif.

Son décès est d’abord inscrit dans la syntaxe : l’exécutif est le domaine de l’exécution, réservée à des gens formés aux tâches à exécuter, et qui doivent se comporter comme des professionnels respectant le cadre législatif.
Même combat que le judiciaire, et retour de l’ENA à sa vocation

3 Est-ce à dire qu’il ne reste que le pouvoir législatif ?

Oui, en quelque sorte, mais avec des pouvoirs qui s’exercent sur TOUTES les règles « universelles » écrites qui s’imposent au citoyen.
Et là on va commencer à se poser les vraies questions, en particulier celles de l’autorité du législatif actuel sur le corpus des règles économiques par exemple.
En effet parmi les exemples:
Par quel miracle démocratique le sort des citoyens s’est-il trouvé lié au jugement des agences de notation financières ?
Comment les LBO par exemple, les règles de succession, et autres combines qui autorisent le transfert forcé et la concentration de la propriété lucrative (nécessaire dès lors qu’elle n’est pas transmissible) sont-elles passées au filtre législatif populaire?

Y répondre est facile, la vraie question est celle-ci : ces règles seraient-elles passées quelle que soit la composition socio-économique des assemblées ?

a) quid d’assemblées tirées au sort ?

b) Ne parlerait-on pas de taux d’intérêt négatifs (ou d’imposition différenciée sur les créanciers) si la majorité parlementaire était composée de débiteurs ? (ce qui redonnerait son sens au terme d’aide financière)

Vous comprendrez que je prône au contraire un leadership fort du parlement, à condition de passer au tirage au sort; et vous demanderai d’excuser aussi le ton tout aussi péremptoire de ce plaidoyer