[b]Toujours chercher la cause des causes.[/b]Les décrets, [bgcolor=#FFFF99]qui permettent à l’exécutif de produire lui-même les règles qu’il exécute ensuite[/bgcolor], sont la négation même du concept de Constitution, une grave atteinte aux Droits de l’homme, la plus criante confusion des pouvoirs, la porte ouverte à tous les abus de pouvoirs.
Ce décret-là (par lequel les professionnels de la politique créent sans la moindre vergogne un nouveau privilège pour les professionnels de la politique) n’est qu’une goutte d’eau croupie au sein d’un océan croupi : les pouvoirs ne sont pas séparés, [bgcolor=#FFFF99]nous n’avons pas de Constitution.[/bgcolor]
Et nous n’avons encore rien vu car, déchaînés, les pouvoirs sont en phase d’autonomisation rapide, et ça va nous coûter très cher, je le crains : nous sommes désormais dans les griffes de véritables gredins.
Et privés de Constitution pour nous protéger.
Je vois d’ici Jacques venir nous dire que tout va bien, que la Constitution n’est pas en cause mais les gibiers de potence qui l’appliquent mal…
Étienne.
Étienne,
- Soyez raisonnable :
La question n’est pas de savoir comment interdire au pouvoir exécutif de produire des règles qu’il exécutera ensuite, mais de savoir si les règles produites par le pouvoir exécutif sont bien celles envisagées et autorisées par la loi.
Vous voudriez que le gouvernement ne prenne pas de décisions ? Que les décisions soient toutes prises par le peuple directement ?
Chaque citoyen, en France du moins, a le pouvoir d’attaquer personnellement en justice une décision règlementaire qu’il juge contraire à la loi. Qu’est-ce que vous voulez de plus ?
« Décrets », « arrêtés », « règlements », « circulaires », « avis », « décisions » – tous ces mots se rapportent à la forme de publication des décisions et indiquent la place de la décision du pouvoir exécutif dans la hiérarchie des normes (la loi lui étant évidemment supérieure). Les rares « ordonnances » du président de la République qui tiennent lieu de loi sont prévues et autorisées par la constitution et par la loi.
Vous savez bien que le gouvernement doit, dans le cadre de la loi, décider des situations que la loi n’a pas spécifiquement prévues et ne pourrait jamais toutes prévoir.
Si ces décisions ne doivent pas être prises par le gouvernement et si le peuple n’a pas les moyens de les prendre lui-même directement, comment voulez-vous que qu’elles soient prises ?
Et qu’est-ce que vous entendez par « gouvernement », par « pouvoir exécutif » ?
- Soyez juste, aussi : je n’ai jamais dit ou laissé entendre que tout allait pour le mieux dans le meilleur des monds.
J’ai dit que la constitution actuelle était la meilleure que nous ayons jamais eue (je continue de le penser), et j’ai proposé sur votre site, comme vous le savez bien, toute une série de changements institutionnels (en particulier dans un message que je ne retrouve pas – vu l’abondance de la matière et le fait que les fils demanderaient à être remis en ordre…). Au hasard de ma mémoire (je suis sûr d’en oublier) :
– confirmation du rôle du président de la République (qui n’est pas président de la France) en tant que garant (surveillant) du bon fonctionnement des institutions, sans fonction de gouvernement ;
– interdiction constitutionnelle au président de la République de se comporter en représentant d’un parti ou d’une majorité quelconque ;
– limitation du mandat présidentiel : un seul mandat, non renouvelable (sept ans ?), ou du moins non consécutivement renouvelable ;
– abolition de l’appartenance de droit au Conseil constitutionnel pour les anciens présidents de la République ;
– renforcement des pouvoirs de supervision du parlement par rapport au gouvernement ;
– maîtrise de son ordre du jour par le parlement, avec possibilité pour l’Exécutif de demander des délibérations d’urgence ;
– principe de la session parlementaire continue (365 jours par an, 366 les années bissextiles) ;
– institution d’un sénat social et économique (dans cet ordre, parce que l’économie doit être au service de la société – principe que j’ai expressément inclu dans le projet de constitution européenne http://www.euroconstitution.org) élu au suffrage universel, qui, outre les fonctions législatives traditionnelles, reprendrait les fonctions du Conseil économique et social ;
– suppression du Conseil économique et social ;
– obligation faite au parlement et au gouvernement d’assortir toute proposition et tout projet de loi d’un état complet des incidences financières ;
– interdiction faite au parlement d’adopter des loi ou résolutions qui n’expriment pas la volonté générale de la nation mais le point de vue des parlementaires en tant que corps constitué (par révision de l’article 34 actuel de la constitution);
– interdiction du cumul des mandats électoraux et autres mandats publics avec une autre activité publique ou privée sauf dans les cas expressément prévus par la loi ;
– renforcement de l’indépendance fonctionnelle du pouvoir judiciaire (par révision de l’article 65 de la constitution relatif notamment au Conseil supérieur de la magistrature) ;
– principe de la collégialité des candidatures électorales (proposition innovante qui associerait un petit nombre de citoyens ordinaires tirés au sort à l’exercice du mandat de chaque élu) ;
– procédure de la proposition de loi citoyenne avec possibilité de demande citoyenne d’organisation d’un référendum ;
– interdiction aux pouvoirs publics de prendre l’initiative d’un référendum : les référendums sont prévus spécifiquement dans la constitution, ou alors ce sont les citoyens qui en prennent l’initiative ;
– institution du vote blanc en tant que vote signifiant le rejet de tous les candidats et propositions en présence, entraînant le cas échéant la répétition du vote ;
– réorganisation de la structure administrative notamment par suppression du département, échelon inutile maintenant que nous avons les régions – sauf pour servir de réservoir de postes électoraux aux partis ;
– remplacement du scrutin majoritaire uninominal à deux tours par le scrutin majoritaire uninominal à trois tours, le premier tour servant alors de « primaire » (tour largement ouvert permettant aux électeurs d’exprimer leur préférence sur d’autres bases que des options partisanes) ;
– soumission automatique des lois constitutionnelles au référendum ;
– recours systématique au vote Internet comme moyen d’une démocratie directe effective ;
– surtout : contrôle de tous les pouvoirs, publics et privés, par les citoyens eux-mêmes, indépendamment de toute institution officielle, dans le cadre d’une association civique « loi de 1901 » provisoirement appelée « Les Sans-Œillères », ouverte à tous les citoyens et résidents français et qui fonctionnerait par le moyen de comités civiques pyramidaux tous composés par tirage au sort.
Je soutiens que ces propositions, plus celles que j’oublie et celles que j’aurai encore à faire, entraîneraient un renouveau institutionnel beaucoup plus radical que les propositions de « sixième république » avancées par Mélenchon ou Montebourg, lesquels nous renverraient à un régime parlementariste régressif (primauté de l’Assemblée sur le pouvoir exécutif = régime d’assemblée = régime des partis).
Cette sixième république serait comme celle de 1946-1958 caractérisée par l’omnipotence des politiciens rejetée par les Français de 1958 et certainement pas très souhaité par les Français actuels, d’autant que si la IVème République a disparu, ils ont bien d’autres régimes du même style sous le nez – comme le régime britannique – pour se faire une religion éclairée.
Pardonnez-moi d’avoir l’air de me vanter, mais si vous trouvez vraiment que tout ça signifie que « je pense que tout va bien et que la Constitution n’est pas en cause », il ne me restera plus qu’à m’interroger sur l’utilité de s’exprimer ici ! JR