1A La Constitution définit les pouvoirs sans imposer une politique économique

[b]La Constitution ne doit pas fixer une politique économique car la politique doit pouvoir être constamment corrigée selon la conjoncture et les choix collectifs : c'est donc le Parlement qui détermine cette politique en fonction de la majorité au pouvoir.[/b]
La politique à mener n'est pas une "institution" : elle doit pouvoir varier (alternance) au gré des élections.

Lire la suite de cet argumentaire sur ce point à : Grands principes d’une bonne Constitution, point IA.

Synthèse des arguments échangés :
(que je devrais normalement tenir à jour en fonction de nos échanges)
Vous pouvez sans doute m’aider en me proposant une nouvelle synthèse de temps en temps.

TRANSFERT DES MESSAGES DU BLOG —> FORUM


  1. Le mercredi 4 janvier 2006 à 09:20, par Fred. de L.

    Moi je dis : c’est une évidence. Mais la présence de la partie III dans le texte du TCE prouve que ce n’est pas évident pour tout le monde.

    Les arguments qui disent que ce n’est pas évident et qui justifiaient la présence de la partie III étaient :

    • Nous sommes 25, il faut bien se mettre d’accord, sinon, ça sera le bazar.
    • Ce n’est que l’héritage du passé. C’est normal que ce soit donc là. On peut le modifier si nécessaire.
    • … ?

    Ce sont des justifications non-valables à mon avis. Pour les raisons que tu énonces fort bien.


  1. Le vendredi 13 janvier 2006 à 10:25, par roland Mattéoli

    Depuis 20 ans on nous impose une sorte de pensée unique: La « Loi du Marché » prime sur les choix politiques. Comme si l’économie était une sorte de loi naturelle.

    C’est bien pratique, ainsi les vrais décisions sont prises dans les C.A des multinationales, loin des citoyens.

    Or, ce n’est pas l’économie qui dirige la politique, c’est l’inverse. Les lois de l’économie n’ont rien de naturelles. Ce ne sont que des régles qui peuvent être changées à tout moment, et qui sont définies par l’OMC. La preuve, c’est qu’ils ont épouvé le besoin de les écrire dans le TCE !

    Il faut en finir avec cette pensée unique, qui consiste à dire que les politiques n’ont aucun pouvoir sur l’économie. C’est faux.

    Pourtant aujourd’hui ceux qui affirment cela sont considérés comme de « dangereux trotkystes » par la quasi totalité des médias, et ainsi le débat démocratique est bloqué: il est interdit de remettre en cause les sacro-saintes Lois du Marché. Quand qelque chose ne va pas, on nous dit « c’est à cause des lois du marché », comme on nous dirait « c’est à cause du climat ».

    Il est très important que non seulement la future Constitution ne fasse aucune référence à un système économique, mais même qu’elle interdise aux institutions européennes d’imposer quelques règles économiques que ce soit aux états membres. Par exemple, il est aberrant que la France ait besoin de l’autorisation des allemands pour baisser sa TVA.

    Il faut aussi que les institutions européennes aient le total contrôle de la BCE.


  1. Le vendredi 13 janvier 2006 à 15:26, par Batswann

    Juste sur la TVA, c’est d’autant plus aberrant que d’une part, c’est l’impôt le plus injuste qui existe et d’autre part, en particulier dans l’alimentation, on en voit l’absurdité vu que la restauration rapide est à 5.5% alors que la restauration « classique » est à 19.6 et que les produits alimentaires sont à 5.5%. Même si je relativise les bienfaits d’une baisse de la restauration, il faut rester cohérent.


  1. Le samedi 14 janvier 2006 à 10:07, par Étienne

    Bonjour Batswan :o)
    Il me semble que la TVA nous éloigne un peu de l’approche institutionnelle. Je comprends que ce soit tentant, et cela n’a rien de dramatique, mais nous avons déjà tant de points à évoquer que nous devrions nous limiter nous-mêmes sur l’approche de nos problèmes par la Constitution (c’est l’idée centrale de ce site), pour préserver l’efficacité de notre échange.
    Je vous lis tous attentivement, même si j’ai peu de temps, ces jours-ci, pour participer autant que je le voudrais :o)
    Amicalement.
    Étienne.


  1. Le dimanche 15 janvier 2006 à 19:35, par guillou alain

    Peut-être , finalement, que la TVA, cet « impôt injuste », concerne quelque part les buts recherchés par une constitution:

    Bien sûr, la TVA est un exemple d’abus étatique qui vise à prendre en otage et à (« racketter ») rançonner même les plus pauvres, ceux qu’une Constitution est censée mettre à portée « égale » des biens essentiels à une vie digne.

    La TVA fait monter artificiellement le coût de la vie, ce qui fait monter le nombre des citoyens qui demandent assistance…

    Je pense que la révolution de 1789 se fit aussi contre les impôts de ce type, et qu’une constitution devrait nous garantir contre cet abus, tout en préconisant « l’impôt juste »…

    Par exemple : « l’État, les régions, les collectivités locales doivent lever un impôt équitable intelligent et humainement justifié, dont l’efficacité sociale, économique et environnementale doit être prouvée devant les instances citoyennes »…


  1. Le lundi 16 janvier 2006 à 04:47, par Jacques Roman

    Entièrement d’accord sur ce « grand principe ». Une constitution ne doit pas toucher aux politiques. Celles-ci relèvent du débat législatif et gouvernemental ordinaire.
    Le principe est pleinement respecté dans l’avant-projet CIPUNCE. jr


  1. Le samedi 21 janvier 2006 à 08:11, par pierre

    Je conseille à tous la lecture d’un livre décapant :« l’Europe, une nouvelle URSSS » de Vladimir Boukovsky aux editions du Rocher.
    Il y explique qu’en s’agrandissant sans cesse, l’UE est devenue un géant irréformable et ingouvernable. D’une simple union économique, elle s’est transformée en monstre bureaucratique aux principes d’action similaires à ceux de l’ex URSS. Selon cet ex-dissident soviétique, l’utopie européiste prétendant régler tous les problèmes et conduire au bonheur (comme l’ex-URSS)mène à un désastre similaire (comme l’appauvrissement généralisé).
    Vl. Boukovsy sait bien que l’UE ne finira pas par créer des goulags pour ses opposants mais la comparaison n’en reste pas moins pertinente.
    Selon lui, l’europe est irréformable de l’intérieur et il faut donc la quitter.


  1. Le lundi 23 janvier 2006 à 19:15, par Samuel

    A Fred de L.

    ‹ Moi je dis : c’est une évidence. Mais la présence de la partie III dans le texte du TCE prouve que ce n’est pas évident pour tout le monde. ›

    Nos dirigeants n’ont pas proposé une « Constitution », au sens de la définition entendue par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789.

    C’est parce que l’Europe proposée n’est pas un Etat démocratique, qu’elle n’est pas supposé en devenir un - il en a été décidé ainsi, sans nous, quoique sans doute déjà conformément à la Constitution française (article 11) ! (1) - que sa politique peut être infectée par l’idéologie de l’impuissance politique, du marché qui gère tout et « régule » (??) tout, et de la destruction de l’Etat. Si le néo libéralisme est une idéologie, c’est que c’est la rationalité qui a émergé comme règle générale, alors que niant le problème de la dissolution de l’Etat, et encourageant tout à la fois celle-ci, elle justifie le pouvoir de ceux qui profitent de l’explosion des frontières économiques, de l’émancipation de l’Economie des Etats, à savoir ceux qui tirent avantage de l’accroissement des inégalités au sein de chaque nation.

    On demande aux Etats de transférer peu à peu leur pouvoirs politiques à l’Europe (en vertu d’un principe de subsidiarité qui rend peu visible l’avenir des transferts de souveraineté) sans que l’Europe soit elle-même, à son niveau, supposée devenir le garant de l’Egalité, des droits des européens, et de la séparation des pouvoirs (l’argument « Nous sommes 25, il faut bien se mettre d’accord, sinon, ça sera le bazar » laisse augurer toujours plus de bricolages et de concessions) et sans pouvoir s’assurer que les Constitutions des Etats membres pourront être maintenues.

    Je vous laisse en juger, mais il me semble qu’il va falloir nous mettre d’accord sur le sens du terme « Constitution », si justement nous sommes là pour contribuer à proposer une « Constitution », quitte justement à rompre avec un acquis communautaire qui commence à nous coûter cher. (« Ce n’est que l’héritage du passé. C’est normal que ce soit donc là. On peut le modifier si nécessaire »). On ne construit pas sans contrepartie (en termes de guerre économique) 60 ans d’Europe de la paix, mais maintenue comme construction purement économique dans le contexte de l’après-guerre, et sous tutelle morale de l’allié américain. Seulement, il faut que l’on puisse arrêter d’assimiler inconsciemment que la guerre économique est le prix de la paix sur le plan militaire. Il nous faut retrouver un Etat démocratique, et un contrôle des frontières économiques.

    (1) Voir mon message de ce jour, émis sur le volet « grands principes - choix difficile ».

    Slts.

[bgcolor=#FFFF99]LE PRAGMATISME, C’EST L’IDÉOLOGIE DOMINANTE.[/bgcolor]

Personne n’a osé attaquer la question ici" (phase forum).
Et le Blog n’avait pas été hyper prolifique, si je puis me permettre. Au mieux, on avait eu le plaisir de dénoncer - à raison -le « cas T"C"E »…
Serait-ce un symptôme qu’on a là, dans le contexte présent, un OS ?
Ma réponse est : OUI, SANS DOUTE LE PLUS GROS, même…

Que ce principe doivent être respecté, c’est évident. Mais CELA NE RÉSOUD PAS GRAND CHOSE…
Pour faire simple, JE VAIS DÉJÀ SIMPLEMENT REMETTRE EN CAUSE DE GROS CLICHÉS DU DISCOURS :

QUI PEUT DÉMONTRER QUE L’ « ULTRA LIBÉRALISME » EST AUTRE CHOSE QU’UN ÉTAT DE FAIT ?
C’est-à-dire NON PAS UNE POLITIQUE ÉCONOMIQUE, MAIS UN CONTEXTE STRUCTUREL, ESSENTIELLEMENT LIÉ À LA MONDIALISATION ÉCONOMIQUE, AU DEVELOPPEMENT DE POUVOIRS ÉCONOMIQUES DÉJÀ ACQUIS DANS LES FAITS, HORS DE L’ÉTAT DE DROIT, ET PAR EXTENSION, UNE LOI QUI S’APPLIQUE PAR DÉFAUT.

QUI S’IMAGINE QUE LE « NÉO LIBÉRALISME » EST AUTRE CHOSE QU’UNE IDÉOLOGIE, CELLE QUI DOMINE AU PRÉSENT ?
C’est-à-dire NON PAS UN COURANT POLITIQUE (même si on trouve toujours quelqu’un, confrère de puissants, pour théoriser et rationaliser come volonté politique un état de fait), MAIS L’ÉMANATION DANS LE DISCOURS POLITIQUE D’UN ENSEMBLE DE POUVOIRS ÉCONOMIQUES (NON équilibrés) EN PLACE ?

QUI S’IMAGINE QUE LE « PRAGMATISME » / « RÉALISME » POLITIQUE EST NON-IDÉOLOGIE ?
C’est la capitulation du politique face aux pouvoirs économiques.

À tous, je conseille de (re)lire la fameuse « tirade de l’été » de Jospin, notamment l’extrait que je rappelle en fin de message (1).
Ce n’est pas le passage qui a été le plus commenté.

Cette déclaration d’impuissance politique contemporaine est de plus un « manifeste politique », car si le tableau est digne d’un altermondialiste éclairé (avec 10 ans de retard), la conclusion est digne d’un élu (ou assimilé) : une personne payée non pour faire la révolution, prôner la résistance, rester indépendant… mais pour s’engager, assumer, et agir concrètement, « PAR L’ACTION POLITIQUE, SELON LES POUVOIRS QUI LUI ONT ÉTÉ CONFÉRÉS ».

En somme, lorsque la tyrannie provient de pouvoirs développés HORS de l’État de droit, c’est le domaine de l’État de droit qu’il faut reconcevoir (étendre).

La réflexion que je fais est un peu similaire à celle que je ferais sur la manière dont on appréhende le plus souvent le volet d’à côté (« ce n’est pas aux hommes de pouvoir… ») :
ON VOIT SURTOUT CE QUI NE VA PAS DANS CE QUI EST PROPOSÉ, BIEN MOINS CE QUI MANQUE. C’est naturel.

Les nations ont déjà des constitutions, qui ne définissent pas de politique économique.
Rejeter le problème sur le projet de T"C"E, et même, sur la classe politique européenne, c’est bien simpliste, et ne résoud pas la question.
Avec ou sans Europe, le problème est apparu avec la mondialisation.

Si pour notre projet, ON S’IMAGINE QUE « NE PAS FAIRE DE POLITIQUE » est un principe qui nous affranchira d’une dure réflexion… et, autant le résumer ainsi, si on songe qu’on peut avoir crument besoin d’une nouvelle constitution, face à un ordre de nature tyrannique et nouveau, sans que cela n’implique un besoin de concevoir quelque révolution culturelle, je ne donne pas cher de l’avenir de ce projet. Pourtant, j’y tiens. Comme Étienne, je ne suis pas là pour vendre du néomarxisme, et je me dis avant tout démocrate. Il n’empêche, rien n’est moins naturel que la démocratie.

C’est en ce sens - uniquement - que je comprends la raillerie de Jospin, dans son même ouvrage, parlant de gens… comme moi, Étienne, sans doute (de ces démocrates classables à gauche - j’espère ne pas mal juger Étienne), et d’autres ici ou ailleurs. Jospin écrivait en substance : évidemment que le TCE n’avait de constitutionnel que le nom. Certains, parmi la « gauche du NON », ne semblent pas avoir compris, et s’évertuent de manière assez pathétique à vouloir se faire réunir une véritable constituante…
Ce que je ne pardonne pas, chez Jospin, c’est ce verdict : non seulement le politique ne fera rien contre les pouvoirs économiques inégalitaires qui s’en sont émancipés… mais en plus, il est ridicule de vouloir une vraie constitution, issue du peuple


(1) [i]Extrait de « Le monde comme je le vois » (L. Jospin), chap. « de la nouvelle aristocratie » :

"dans le discours public, [ce groupe de privilégiés] se réclame avant tout de la rationalité économique et de l’« efficacité ». Bref, il a la raison pour lui.

[…]

Bien sûr, il peut venir à l’esprit de demander à ces chantres du sacrifice ce qu’ils sont prêts, pour les besoins de la bataille économique, à concéder eux-mêmes : sur leurs profits, sur des salaires très élevés, sur leur propre temps de travail, sur leurs nombreux avantages secondaires, sur leurs retraites spectaculaires ou leurs indemnités fastueuses en cas de départ. Mais la rationalité économique a réponse à tout.On ne saurait toucher aux profits, imposer davantage le capital, limiter les salaires extravagants sans décourager les initiatives et paralyser les énergies créatrices, sans provoquer des désinvestissements et des délocalisations d’entreprises ou encore sans entraîner des fuites de cerveaux ou de talents. Des tentations aussi fâcheuses seraient antiéconomiques et nuiraient finalement à tous. Elles ne sauraient donc être envisagées"..[/i]

Le préambule du projet de TCE comporte 6 belles phrases, et 4 d’entre elles sont enthousiasmantes, les 4 premières :

  1. « s’inspirant des héritages… valeurs universelles, etc. … l’État de droit. »

  2. « … sur la voie de la civilisation… continent ouvert… le caractère démocratique… solidarité dans le monde. »

3)"… les peuples d’Europe… résolus à dépasser… à forger leur destin commun."

4)"… dans la conscience de leurs responsabilités… l’espérance humaine"

Ah que c’est beau ! il faudrait mettre cela non pas dans un « préambule », mais dans l’article 1 (incontournable) de la constitution !

… Viennent ensuite deux dernières grandes phrases, qui anéantissent et médiocrisent les peuples en question :

  1. « poursuivre l’oeuvre accomplie dans le cadre des traités… en assurant la continuité… »

  2. « reconnaissants aux membres de la Convention… d’avoir… cette Constitution au nom des citoyens… »

NON et NON !

le premier acte d’une Constitution doit être la reconnaissance d’une revendication populaire

… rompant forcément avec le temps d’avant la Constitution, ce temps trop long de gestation, où il était demandé aux peuples de faire confiance aveugle, et d’être « reconnaissants » aux maîtres du jeu…

Il s’agit forcément de l’émergence du « CITOYEN EUROPÉEN » sur le devant de la scène… (Sinon, à quoi bon ?) , rassembleuse , seul moteur constituant… tandis qu’avec ce ligotage dans le « fait accompli des traités léonins », c’est du contraire d’une Europe démocratique et libre qu’il est question :

On peut dire que les ennuis ont commencé pour ce « projet », dès la 5è phrase de son préambule ! :smiley:

« Le citoyen européen sur le devant de la scène »

Oui, c’est bien de cela qu’il s’agit, et c’est une raison (il y en si peu) de louer le TCE : en brandissant le mot « constitution », les auteurs du traité ont créé une situation constitutionnelle, et plus rien ne sera comme avant.

Quant à la nature du traité, M. Jospin confond, comme pas mal de partisans du TCE il est vrai, le contenant et le contenu ; comme le contenant (ici un traité) n’a pas la forme à laquelle il est habitué (un projet de loi constitutionnelle), il conclut que le contenu n’est pas une constitution : étrange logique, sauf si l’on soutient qu’une bouteille triangulaire ne pourrait pas contenir de vin de Bordeaux. JR

Oui… Ici on a dû forcer sur les copeaux de bois, ce qui fait que le bordeaux, « mondialisé », a perdu l’esprit di vin, et que, hélas, "in vino véritas non est "…qu’importe le flacon , on n’aura pas l’ ivresse!.. :P…

… Bonne soirée !

J’ai arrosé les prouesses du conseil constitutionnel dont la belle performance, ce jour, nous montre que la Constitution de la Vè est vomie par « son » peuple…, et que les pires lois peuvent être conformes aux pires Constitutions.

C’est pourquoi, tant qu’à proposer une « Constitution européenne », autant prendre le temps nécessaire, et inviter le plus de citoyens possible, de toute l’Europe, à participer à l’élaboration de ce texte comme au plus essentiel des combats.

Précisément, Alain, je viens de formuler une invitation à nous rejoindre sur le blog d’Agnès (l’excellent Monolecte) :
http://www.ethologie.info/monolecte/?2006/03/24/192-extension-du-domaine-de-la-lutte.

Peut-être devrions-nous tous faire ça un peu, sur nos blogs et forums préférés, pour étendre le domaine de la lutte :confused:

Bonne nuit, malgré la rage impuissante de se faire violenter par des tyrans :mad:

Fin de règne, fin de règne… de quoi ?

Pardon : ces derniers jours, dans l’affaire CPE, je pensais encore à 2007 et à la politique… dans la Ve.

Je m’étais dit que si le Conseil constitutionnel bottait habillement en touche et laissait J. Chirac assumer ses choix de premier ministre et le soutien de ceux-ci, tout cela allait coûter cher à l’UMP.
Oui, « à l’UMP », pas juste au clan Chirac (et Villepin en premier rideau) parce que contrairement à ce que le révisionnisme ultra rapide a déjà permis d’installer comme cliché, M. Sarkozy et « ses amis » étaient non seulement en faveur de la loi sur l’égalité des chances, et ses composantes, mais ce cher Nicolas a également été consulté avant, à plusieurs reprises. Voir le Canard enchaîné de cette semaine.

Mais une chose pourtant essentielle m’avait à peine effleuré l’esprit : la Constitution de la Ve République vient de prendre une claque… « malgré la rage impuissante de se faire violenter par des tyrans ». Une impuissance qui ne peut pas durer éternellement, et une situation qui semble nous faire redoubler de motivation.

Un exécutif imperturbable qui a écrit sa loi tout seul, en violation d’une autre loi prévoyant que les réformes doivent être établie à l’issu d’un dialogue avec les « partenaires sociaux », l’a fait passer aux forceps, et se voit répondre qu’il a agit en conformité avec la Constitution,… c’est inimaginable, alors que près de 70% des citoyens seraient opposés au CPE (combien réclament le retrait et la remise à plat de la loi complète ?") et que tant de gens manifestent… et se réchauffent le coeur en commençant à retrouver une raison de s’unir, entre citoyens, contre quelque chose qui sent la tyrannie.

Comme dit Alainguilllou : "les prouesses du conseil constitutionnel dont la belle performance, ce jour, nous montrent que la Constitution de la Vè est vomie par « son » peuple" ".
« Nous sommes le peuple de la Constitution » plutôt que « c’est notre Constitution ». C’est un peu comme ça que je le ressens. Raffarin, Villepin et tant d’autres aussi : « c’est pas la rue qui gouverne », comme on dit chez nous, au pays des manifs, où on cogne et ensuite on cause - la faute à quoi ?

Si je comprends bien vos petits messages, l’action des citoyens pour renvendiquer une nouvelle Constitution est partie pour passer à la vitesse supérieure.

Décidément, une nouvelle Constitution française serait déjà bien. Parce que débattre avec des européens (« le premier acte d’une Constitution doit être la reconnaissance d’une revendication populaire ») par France 2 et Europe 1 interposés… Ce n’est pas gérable… tant qu’on n’a pas mis le hola sur le trust de la presse. Sans même parler de la langue.

Enfin, vive internet. Étienne, moi qui suis un dinosaure, je le dis aussi, et je me dis que j’ai tout de même du travail, s’il s’agit de prospecter / échanger à travers un réseau de sites, blogs, forums.

Je vous propose une discussion particulière sur cette probablement nécessaire « extension du domaine de la lutte ».

C’est là : http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?id=52

Bonjour à tous,

<<La Constitution définit les pouvoirs sans imposer une politique économique>>

Ce principe est une évidence (je reprends le texte du premier message de Fred de L).

On aura beau dire et seriner que le néo-libéralisme est la seule politique économique possible ou qu’elle est naturelle ou que sais-je encore, c’est faux. D’autres types d’économie ont existé dans l’histoire mais n’ont pas pu perdurer alors qu’elles avaient montré certaines efficacités pour ne pas dire une efficacité certaine. Je pense particulièrement à l’économie Inca ou des civilisations antérieures. On pourra disserter de son régime politique tout ce que l’on voudra mais on ne contredira pas que l’économie du Pérou a fonctionné pendant plus d’un millénaire sans utilisation d’argent, et sans argent que devient le néo-libéralisme ?

Je reste donc persuadé que d’autres système économiques peuvent fonctionner avec ou sans argent (Ne pas oublier le rôle premier de la monnaie, permettre le troc à travers une marchandise « neutre ») et ce indépendament du système polique.

Pour reprendre l’exemple d’économie sans argent, les Incas donc, mais aussi les anarchistes en Espagne durant la guerre civile, pour finir j’ai vu un reportage d’une île près de l’Antartique, où aucun argent ne circulait. Ceci dit, je ne suis pas un farouche partisan de la disparition de l’argent.

Donc, il ne faut pas brider l’imagination, les initiatives au niveau économique et surtout, ne pas se laisser entraîner dans le culte actuel de la société néo-libérale que beaucoup (trop) de gens nous serinent être la seule à même de répondre aux besoins de l’humanité. À moins que l’on considère que seuls les 2% de la population mondiale les plus riches ont droit à cette dénomination.

Que cette imagination et initiative peut s’exercer quelque soit le régime politique. L’inverse aussi existe. Sans imagination, quelque soit le régime politique, c’est la même politique économique qui perdure.

José Maria

Ca me gêne un peu qu’on parle du parlement ici.

C’est peut-être un peu formel comme remarque, mais on est au début du processus constitutionnel dans cet article, alors supposer que la constitution instaurera un parlement, et un système avec une majorité aussi, c’est peut-être un peu hatif même si tout ça est très probable en pratique.

Je suggère de faire simplement l’hypothèse que le fonctionnement sera démocratique indirect ou direct, et de remplacer « c’est donc le Parlement qui détermine cette politique en fonction de la majorité au pouvoir » par « c’est donc le peuple ou ses représentants qui détermine cette politique ».

Parlement

Ikari (votre 796) :

Je serais assez d’accord avec vous: la démocratie sera représentative ou directe, c’est tout ce qu’on est supposé savoir à ce stade du projet. JR

Il n’est pas inutile, avant de lâcher les chiens de la « compétence juridique », que les « profanes » se promènent et s’extasient sur les beautés qui ont poussé au jardin des Constitutions existantes…

D’où vient notre besoin de nous réserver un coin de terre encore meuble pour y faire pousser des idées « constitutionnelles » ?

Je cite Bruno Latour, anthropologue, (ça fait sérieux !) en piquant ses réflexions recueillies par… L’Humanité-Dimanche de ce W-E (pour ceux qui ont encore des préjugés, "ça fait moins sérieux) :

« Inutile de remâcher le passé : laissons le terme de révolution à son siècle -le XVIIIe-, la notion de société à son siècle -le XIXe-, la notion de nature à son siècle -le XXe-, pour nous intéresser à cette troisième forme d’existence commune que j’appelle [b]le collectif/b
Le collectif n’est pas déjà là, il n’explique pas nos comportements, il ne forme pas système, il ne définit pas d’avance nos alliances…
Il oblige à prendre en compte les incertitudes, les combinaisons nouvelles…
Mais surtout le collectif n’est pas l’État- et pas le marché, comme il n’est pas déjà là, il faut le faire exister, il faut donc le « composer ». »

Voilà pourquoi" je sors de mon parti-pris"(sans le quitter) pour aller vers cette démarche « constituante » qui est d’abord un refus collectif du « fait accompli » constitué par des procédures du passé dont il faudra bien s’émanciper… Ceci dit, « j’avale les propos d’autrui » sans avoir encore pris le recul nécessaire, mais ce qui est d’abord indispensable c’est de penser avec « les autres ».

Voilà pourquoi le besoin de nouvelle Constitution, en Europe, oblige à ne pas recopier docilement ce que d’éminents juristes ont déjà « tout-pensé ». :cool:

Le collectif/ l’Etat/ le marché

Alain,

Ce que vous dites ou que vous citez est très intéressant, d’accord.

Seulement, voilà : une constitution, c’est le document de base de l’organisation d’une collectivité organisée en Etat sous l’autorité des principes de droit.

En nous proposant avec Bruno Latour, anthropologue, de réfléchir au fait que "le collectif n’est pas l’Etat - et pas le marché, comme il n’est pas déjà là, [et qu’] il faut le faire exister, il faut donc le « composer », ne craignez-vous pas de nous écarter du projet très concret proposé par Etienne : fixer les grands principes d’une bonne constitution, puis, si possible, écrire les projets d’articles constitutionnels ?

Chiens ou pas chiens, le projet sur lequel nous travaillons est un projet juridique : l’anthropologie et la philosophie en général n’ont que très peu de chose à y voir. JR

Inscrire, favoriser, organiser « le collectif » dans notre Constitution pour délibérément (et concrètement) « faire société », davantage que par le passé

Je suis d’accord avec Jacques : nous devons garder un cap pratique et praticable ; je suis sûr qu’une Constitution d’origine citoyenne n’est pas du tout une utopie, et pour le prouver, nous devons rester réalistes.

Pourtant, je peux défendre Alain, en pensant à la Constitution du Venezuela qui rappelle à tout propos la tâche centrale et permanente d’émancipation des citoyens que les Constituants confient expressément à leur État…

Et quand Alain souligne que « le collectif » n’est pas acquis mais à créer, à créer de toutes pièces, ça a beaucoup de sens, je trouve : il y a sans doute de nombreux articles d’une Constitution qui pourraient imposer à l’État de « faire société », de jouer un rôle de rapprocheur des individus, de facilitateur des communications de toute nature, d’entremetteur…

Par exemple, le fait d’imposer que soient réservées des plages banalisées à la télévision pour permettre aux simple citoyens de s’exprimer aux heures de grande écoute semble être une bonne idée.

D’une façon plus générale, le fait d’émanciper la télévision de l’appropriation par les plus puissants (politiques et économiques) nous aidera sans doute à nous rapprocher tous.

Je trouve d’ailleurs que la multiplication des chaînes de télévisions est déplorable et ne se justifie que pour le profit des sociétés commerciales : bientôt, chacun regardera sa chaîne à lui (communautarisme facilité au lieu d’être combattu) et personne n’aura plus aucune idée de l’univers des autres : on aura raté un outil formidable pour « faire société ».

Sans aller jusqu’à la chaîne d’État unique, on devrait à la fois limiter le nombre de chaînes, interdire aux sociétés privés de les acquérir, (interdire la publicité en la remplaçant par des financements publics), et imposer des plages communes à toutes les chaînes pour rendre possibles et même organiser de grands moments de réflexion commune, de grands débats politiques, vraiment tous ensemble : à mon sens, parce qu’elle est un outil capable (ou pas) de nous aider à « faire société », la télévision devrait être un service public, non pollué par l’appât du gain.

Et c’est dans la Constitution qu’on peut l’imposer pour longtemps, si on y tient tous.

Mais laissons Alain nous dire lui-même ce à quoi il pense, concrètement, pour donner vie aux principes qu’il défend :confused:

Oui, Jacques, une Constitution Européenne existera-t-elle sans un « Etat » européen ?

Si oui, il faut envisager un sens nouveau à ce mot « Constitution », lié au fait qu’une réalité collective nouvelle peut émerger en Europe, grâce au rôle désormais accessoire que l’on fait jouer aux États, simples instruments de police et de répression pour la seule LOI SACRÉE désormais: la concurrence libre et non faussée .

Ces « ÉTATS », responsables de la signature de traités créant un fait accompli incompatible avec de « vains principes constitutionnels », ne peuvent plus garantir une « Constitution » digne de ce nom :

c’est l’ÉTAT qui nous abandonne aujourd’hui, nous, individus, dont la seule chance se trouve désormais dans la recomposition en actes d’un « collectif » capable de défendre ce que l’État abandonne :

Les partis politiques que nous dénonçons ne sont que le reflet de cet « État » qui nous trahit…

C’est là que se situe l’articulation altermondialiste des nouvelles « Constitutions », celles qui s’écrivent aussi bien au Vénézuella qu’au Népal , (et aussi mal en Irak qu’en Europe, pour l’instant), des constitutions porteuses de sens dans le monde « global », car elles chassent un "fait accompli " auquel les peuples disent NON, et c’est dans ce sens qu’elles interpellent autant la France de Monsieur Sarkozy que l’ Europe de Mr Bolkestein…

Je ne crois pas que le droit soit sans lien avec les sciences, ni avec la philosophie en tant que pensée des catégories, et bien sûr il faudra écouter les juristes, mais ces derniers ne sont pas dans un monde "juridique " autre que celui qui est confronté à des problèmes inédits , dont certaines questions anthropologiques que pose « la modernité » (… problèmes éthiques posés par les révolutions bio-technologiques, mais aussi, ceux évoqués par Étienne, du rôle de la télé et des « jeux électroniques » sur nos enfants, cibles de la pub. et du conditionnement pour la violence , par exemple, …etc…).

La Constitution fera naître « un autre état de chose », sous la souveraineté d’un « tous ensemble » ayant accumulé les "prises de conscience"salutaires.

En bref, pour simplifier, des droits humains nouveaux sont nécessaires pour que « l’humain » s"accomplisse , en faisant face aux défis de la déshumanisation devenue techniquement possible.…ouf!:stuck_out_tongue:

…Jacques, je dis ouf, car en parlant de « chiens », je pensais à ceux qu’on lâche face aux fous : comme il faut des "chiennes de garde ", des chiens juristes, ce n’était pas péjoratif, mais humoristique par rapport , en effet à :

    1. la folie dont je fais preuve en risquant d’élargir trop le débat (d’accord: « lachez les chiens ! »)
    1. la folie dont on est menacé par la non prise en compte des problèmes potentiels inédits posés par une certaine « modernité », et en effet, le droit doit accourir sur ce terrain inexploré : lachez les chiens ! et chassez les apprentis-sorciers qui vont fabriquer des monstres avec nos bébés ! ’ (clonage, pub, jeux électroniques…) :cool:

Télévision et utopie

Etienne dit « émanciper la télévision […] c’est dans la Constitution qu’on peut l’imposer » (j’espère que je ne déforme pas le propos).

On trouvait scandaleux que le TCE impose une politique économique. Ne serait-il pas très discutable que la Constitution impose un programme télévisuel?

D’ailleurs si on veut rétablir un vrai débat politique, je crois que la télé n’est tout simplement pas faite pour ça. Les forums sur internet marchent mieux. Il n’y a pas la dissymétrie entre le producteur de programmes qui parle et les citoyens qui écoutent. La constitution ferait peut-être mieux de mandater l’organisation de forums citoyens et la publication des systhèses de ces forums plutôt qu’essayer de récupérer un media fondamentalement pourri.

De plus il me semble plus réaliste de proposer aux gens la création de forums citoyens que la suppression de la télé telle qu’elle existe aujourd’hui.

Ce qui m’amène au deuxième point: personnellement j’aimerais bien aussi une constitution radicalement « alter », et l’idée de remplacer l’Etat par le collectif est très intéressante. Mais n’est-ce pas irréaliste à moyen terme? Je suis nouveau ici alors je n’ai peut-être pas bien compris, mais on travaille à quoi? Une alternative raisonnable au TCE ou une refondation de la société sur de nouvelles bases? Les deux sont dignes d’intérêt, mais ne devrait-on pas les distinguer?

Ikari, bonne soirée!

Une alternative raisonnable au TCE, bien sûr, c’est bien de cela qu’il s’agit, et c’est le contraire du TCE lui-même.

Est-ce bien raisonnable de décider à l’avance ce qui est raisonnable ?

Le travestissement en « Constitution » des traités qui sont responsables de l’impasse actuelle de l’Europe, voilà ce qu’il n’était pas raisonnable de tenter.

Est donc nécessaire la remise à plat, dans l’esprit le plus « Constituant » qui soit, des règles qui permettront le « vivre ensemble » des peuples européens…

… et c’est l’occasion de penser à la « modernité » autrement que comme le slogan publicitaire des politiciens qui se sont déchaînés contre « le conservatisme des nonistes »…

Je ne prendrai pas à la lettre la citation que j’ai lue, au sujet du « collectif », car j’aurai beaucoup de chances de commettre un contresens grossier, n’ayant pas « pensé avec son auteur », et ignorant encore le contexte et le sens réel de son propos : comme nous tous, sans doute, je dois me méfier des « formules ».

Simplement, cette formule de « recomposer le collectif » correspond à ce que « raisonnablement » je crois nécessaire pour que les peuples européens ne marchent pas ensemble comme on va à l’abattoir, quand on est d’un troupeau dont le destin est de servir à des fins funestes.

Il est « raisonnable » de bien percevoir que les "États "ne sont plus ce qu’ils prétendent être, et que par conséquent, il faut construire (recomposer) ce qui manque, (qui a été brisé), pour que la Constitution soit « écrite » par les peuples.

Personnellement, j’ose parler « d’écrire la Constitution » en pensant au peuple qui « écrit » son Histoire : bien sûr, le peuple n’est pas « le juriste raisonnable », mais il est le seul donneur d’ordre compétent, celui qui signera l’achèvement des travaux et leur acceptation, comme conformes à sa « souveraineté ».

Pour la méthode, je pense à la « co-écriture » comme je pense à la coopération, à la cogestion, au co-développement : les partenaires sont « les autres peuples », et les conseillers compétents que le peuple choisit d’entendre.

L’écriture d’une Constitution suscite-t-elle une dynamique populaire ou bien simplement un (gros) travail de juristes compétents « entre eux » ? :confused:

... L'écriture d'une Constitution suscite-t-elle [color=green]une dynamique populaire[/color] ou bien simplement un (gros) travail de juristes compétents "entre eux" ? :/
Et pourquoi pas un peu les deux ?!

Droits essentiels de individus, participation des citoyens à l’exercice du pouvoir, élections, dispositions essentielles réglant les rapports des grands pouvoirs publics entre eux, tout cela doit être défini par les citoyens.

Pour le reste, pour autant qu’on veuille les faire entrer dans une constitution, la définition et l’organisation interne de chaque pouvoir, en particulier les pouvoirs “techniques” tels que la banque centrale ou la cour de justice, pourraient à la rigueur être confiées à des juristes.

Dynamique populaire ou travail de juristes?

Probablement les deux, effectivement. La Constitution elle-même devrait probablement être rédigée par une équipe de juristes. Il n’est pas facile d’écrire un texte qui puisse être appliqué comme loi en pratique, et c’est le métier des juristes.

Mais cette commission de juristes devrait être inspirée par la volonté populaire, et soumise à l’approbation du peuple bien entendu. J’imagine des forums où se dit tout et n’importe quoi, et lorsque des idées remportent une certaine adhésion, elles sont soumises au vote. Une fois votées, une idée deviendrait une consigne pour la commission de juristes. Celle-ci ferait son boulot de rédiger un texte à valeur juridique et le soumettrait à l’approbation générale. Ca pourrait se faire morceau par morceau. Je tâcherai d’évoquer l’idée plus en détail dans le forum sur les outils informatiques.