À Candide, en référence à votre message n°853 :
- je vois qu’il y a ici des amoureux de l’anglais… JR aussi est angliciste… Bien que sans doute infiniment plus habile(s) que moi à manier cette langue, vous n’êtes pas « disqualifié(s) » pour ce débat… à mes yeux du moins.
« 1) Pour moi, qui baigne dans cette langue depuis la 6e, soit depuis plus de 30 ans, l’anglais est une langue incomparablement plus simple et plus souple que le français. »
Très bien, on va pouvoir continuer à l’apprendre, sans doute en deuxième langue (parmi les langues autres que maternelle). Et l’apprendre en plus de deux ou trois autres langues ne sera pas si difficile.
« 2) Si l’on considère que l’anglais est tout de même connu (même s’il est mal maîtrisé) par une grande partie de la population européenne, l’effort à fournir pour le maîtriser correctement ne serait-il pas moindre que celui requis par l’apprentissage d’une langue entièrement nouvelle, telle que l’Espéranto (c’est une question, car je n’en connais pas le moindre mot), même si cette langue est quelque peu normalisée et simplifiée ? »
A ce que j’ai compris, l’espéranto est facile à apprendre.
Mais je crois que la facilité est un peu hors sujet. Disons qu’il y a, à côté, des arguments bien plus importants, qui portent sur « l’intégrité culturelle », je dirais. Des questions lourdes de sens…
« 3) L’anglais étant tout de même une langue parlée par un pourcentage élevé de la population mondiale, et pas seulement dans les pays fondamentalement anglophones, le maintien de son utilisation présenterait pour les européens l’avantage supplémentaire de pouvoir communiquer plus facilement à l’étranger. Avantage que n’offre pas l’Espéranto. »
On apprendra toujours l’anglais. Et sans aucun doute plus encore.
Pour en finir avec l’argument de la facilité, songeons qu’il faut compter sur l’aisance d’apprentissage des enfants en bas âge. Voilà un élément de programme qui tient…
Si dans une ou deux générations, l’espéranto est appris dès l’enfance, en parallèle de la langue nationale (et, pour certains mêmes, de la langue régionale), c’est un problème qui se résoudra assez simplement. Dans quelques générations, les enfants seront habitués à apprendre plusieurs langues tôt et bien pour la grande majorité d’entre eux.
« […] si les européens apprennent l’anglais, ils pourront davantage communiquer car le reste du monde continuera à l’apprendre aussi (commerce oblige), alors que si l’Europe adopte l’Espéranto, je ne vois pas les autres pays s’y mettre également. L’adoption d’une langue de ce type risque donc d’avoir pour elle un effet marginalisant. »
Une question, puisque vous parlez de commerce, et de l’avenir (sujets déterminants…) : vous avez idée de la difficulté qu’il y a à apprendre le chinois ? …
C’est la langue la plus difficile au monde, malgré la grammaire très aisée * mais si l’on tient compte du fait qu’il faut « chanter » les accents (non réservés à l’interrogation ou aux modulations « scéniques » du propos, mais formant partie de la syllabe, et déterminant le sens des mots) et surtout, obstacle terrible, que l’apprentissage de la langue écrite relève quasiment du par cœur, le chinois n’ayant pas d’alphabet, juste des clefs (en très grand nombre) . Autrefois, les enfants des nobles apprenaient par cœur un vieux livre, qu’on leur contait – un peu comme dans Fahrenheit 451… - puis à l’âge d’apprendre à lire, on leur confiait le livre… ; aujourd’hui, les élèves consacrent la moitié du temps de l’école primaire à apprendre à lire et écrire…
Pensez-vous d’ailleurs que les chinois vont abandonner leur langue écrite, au profit d’un alphabet ?
(le pinyin, langage phonétique, est déjà employé en partie, mais je crois que c’est pour des raisons plutôt techniques.)
Les japonais l’ont fait en partie. Est-ce à l’époque où ils ont commencé à commercer avec les Etas-unis (depuis le milieu du XIXe siècle, je crois) ?
Songeons que c’est une question d’importance. Pour eux comme pour nous (par exemple, le traitement de texte chinois, je crois que c’est objectivement un désavantage.) Mais qu’il y a là des arguments incompréhensibles pour un occidental non familiarisé avec cette langue *. Je n’ai suivi, pour ma part, que deux petites années peu intensives. L’équivalent de quelques mois d’anglais…
- Le fait que la grammaire chinoise soit aisée est aussi une conséquence du caratère « petit nègre » de cette langue. Pardon pour le terme, mais il s’agit de dire simplement que les racines ne sont pas tirées du latin ou du grec, mais du chinois lui-même. Pour l’anecdote (et exemple), « épouse » s’écrit « femme » + « balai » (…) ; « avion », « char » + « voler » ; « train », « char » + « feu » ; « vélo », « char » + "rouler + « autonome » ; …
Que se passerait-il si vous passez en langue écrite basée sur un alphabet ? Il faudrait demander aux japonais…
« 4) Utiliser une langue telle que l’Espéranto au lieu de l’anglais introduirait effectivement une plus grande « neutralité culturelle » dans les relations internationales. »
La question est aussi (et surtout) de savoir si " l’avantage supplémentaire de pouvoir communiquer plus facilement à l’étranger" ne se traduira pas bientôt par « l’avantage de penser comme des américains »…
« 5) Une telle langue normalisée et simplifiée aurait-elle la même nécessaire richesse que les langues existantes ? Le moins que l’on puisse dire c’est que l’Esperanto, introduit en 1887, n’a pas réalisé en 120 ans une percée à la hauteur de ses promesses affichées… »
Je ne connais pas ce sujet. Mais y a-t-il eu volonté politique ? Concernant la richesse de la langue, on peut imaginer que sur la durée, chaque peuple employant à la fois l’espéranto et sa langue nationale, va vite créer ses néologysmes. Et que ceux-ci s’échangeront en partie à travers l’Europe, … alimentant les échanges culturels.
On aura même un argot anglais / espéranto, qu’on pourra exploiter à loisir…