04 Contenu d'une constitution

[align=center]Pourquoi une constitution de l’UE ?[/align]

Je présume que nous désirons tous vivre en démocratie.

Comme, à l’heure actuelle, une grande partie de notre vie est réglée par des décisions européennes, il est nécessaire que l’UE ait un fonctionnement démocratique.

Or, l’UE est régie par des organisations intergouvernementales, hors du contrôle des citoyens et, en fonction de traités intergouvernementaux conclus hors de l’avis des citoyens.
Le fonctionnement actuel de l’UE n’est donc pas démocratique !
Il est donc indispensable de modifier le mode de fonctionnement de l’UE.

Mais, si cette modification devait se résumer à remplacer les traités intergouvernementaux, qui nous dirigent, par un nouveau traité intergouvernemental qui confierait le pouvoir à une autre instance gouvernementale qui pourrait diriger hors de la volonté et du contrôle du peuple ; nous n’aurions pas beaucoup avancé sur la voie de la démocratie.

Si nous désirons vivre en démocratie, il faut que l’UE ait une constitution démocratique.

[align=center]Quel contenu pour une constitution
Démocratique ?[/align]

Si nous désirons une constitution laïque et démocratique.

Elle devrait, me semble-t-il, respecter un certain nombre de principes, elle devrait, obligatoirement, régler certaines choses et, ne devrait, en aucun cas, en régler d’autres.

1/ Une constitution a une valeur juridique supérieure à toutes les autres normes juridiques ; elle constitue la loi fondamentale du pays.
Dans un pays démocratique elle doit donc pouvoir être connue et comprise par tous.
Ce doit donc être un texte simple pour pouvoir être compris de tous
et, concis pour pouvoir être connu de tous (15 pages me semblent suffisantes, 20 pages me paraissent un maximum).

2/ Une constitution engage une autorité et les citoyens.
Dans une démocratie elle doit donc être ratifiée, directement, par l’ensemble des citoyens.
Pour que cette ratification ne soit pas faussée elle doit s’effectuer partout en même temps et de la même façon.

3/ Une constitution définit, elle même, ses procédures de révision
Une constitution démocratique doit pouvoir être modifiée selon les vœux d’une majorité (à définir) de citoyens.
Les procédures de révision ne doivent pas être impossibles à réunir.

4/ Une constitution règle la participation des individus à l’exercice de l’autorité
Dans une démocratie, la constitution doit préciser que le pouvoir appartient au peuple directement ou par l’intermédiaire des ses représentants élus et, elle doit définir le mode d’élection de ces représentants.
Tous les pouvoirs publics doivent être soumis à la volonté du peuple et à son contrôle permanent.

5/ Une constitution règle les droits essentiels des individus.
Elle doit en particulier s’attacher à protéger les plus vulnérables.
Elle doit se référer à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (encore que je préfère celle des droits de l’homme et du citoyen).
Par ailleurs, les droits et libertés qu’elle définit ne doivent pas nuire à la société ni aux autres individus.

6/ Une constitution démocratique n’est que l’ensemble des dispositions essentielles réglant l’organisation et les rapports des grands pouvoirs publics.
Elle doit s’abstenir de définir la politique qui reste la prérogative du peuple.
Celui-ci doit demeurer libre d’en changer selon le souhait de sa majorité.

7/ Domaines de compétence.
La constitution doit définir dans quels domaines l’UE, c’est-à-dire le peuple ou ses représentants européens, pourra imposer ses décisions.

Dans de nombreux domaines les traités actuels ont, de fait, transféré le pouvoir des États à l’UE mais, ce transfert s’est effectué de manière non démocratique hors de l’approbation des citoyens européens.
Il convient donc que les constituants examinent quels sont les domaines de compétence actuels de l’Union, qu’ils déterminent ceux qui doivent rester de la compétence de l’UE, ceux qui éventuellement ne devraient plus en faire partie et, ceux qu’il conviendrait d’y rajouter.

8/ Traités européens.
Dès lors qu’une constitution règle le fonctionnement de l’Union : des traités, entre les États de cette union, n’ont plus lieu d’être.
Les parties de ces traités qui n’entrent pas dans les compétences de l’Union doivent être abrogées.
Les parties de ces traités qui entrent dans les domaines de compétence de l’Union ont vocation a devenir des lois européennes. Ces lois européennes doivent être votées par la représentation populaire définie par la constitution suivant les procédures également prévues par la constitution.

En définitive, la constitution doit prévoir l’abrogation de tous les traités antérieurs dans le délai nécessaire et suffisant pour permettre de voter démocratiquement les dispositions qui y sont contenues.

Contenu d’une constitution démocratique (message 860 de Jean G)

Les points 2 et 5 de la proposition ne concernent pas le contenu de la constitution, mais sa force juridique. Cela dit, nous sommes d’accord. Ces principes sont de toute façon admis depuis longtemps.

Il y a contradiction entre le point 5 et le point 6 : c’est l’un ou c’est l’autre, et pour moi (je me répète), une constitution est faite pour régler l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics.

En ce qui concerne le point 5 : NON : une constitution ne règle pas les droits essentiels des individus. Ces droits relèvent d’un ordre supérieur à l’ordre constitutionnel : à savoir, les droits de l’homme, qui à mon avis font maintenant partie de ce qu’on appelle l’état de Droit, auquel aucune constitution ne peut déroger. Par contre, je suis d’accord qu’il faut que la constitution se réfère aux droits fondamentaux et aux instruments qui les contiennent, mais SURTOUT PAS les reproduire dans son corps même, pour des raisons dont je me suis expliqué amplement par ailleurs (voir l’article [4] de l’avant-projet CIPUNCERév. 10 et la note [8] qui va avec ). Il se trouve que nous aimons la Déclaration française des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : aimerions-nous aussi la déclaration correspondante reproduite dans la constitution saoudienne (à supposer qu’il y en ait une?)

En ce qui concerne le point 8 (traités européens) : Oui, sous réserve qu’un traité ne peut être modifié qu’en vertu d’une disposition de traité. Dans le projet CIPUNCE, la modification pourra donc se faire avec l’accord unanime du « Conseil intergouvernemental de l’Union » chargé (par traité) de veiller au respect de la souveraineté des Etats membres. JR

Bonsoir Jacques,

Les [b]points 2 et 5[/b] de la proposition ne concernent pas le contenu de la constitution, mais sa force juridique. Cela dit, nous sommes d'accord. Ces principes sont de toute façon admis depuis longtemps.
Vous avez raison ! En tous cas pour le point 2, le titre général n’est donc pas adapté. Pour le point 5, je ne vois pas.
Il y a contradiction entre le point 5 et le point 6 : c'est l'un ou c'est l'autre, et pour moi (je me répète), une constitution est faite pour régler l'organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics.
Exact ! c’est mal formulé. J’aurais dû commencer le 6 par : « pour le reste ». Sinon, ce que je demande à une constitution démocratique c’est le 5 et le 6.
En ce qui concerne le point 5 : NON : une constitution ne règle pas les droits essentiels des individus.
Désolé ! Là, je ne peux être d’accord, elle le doit,… absolument ! Mais, je ne sais pas ce qu'en pensent les autres.

Cordialement.

Message 860 de JeanG : précisions concernant le point 5
Point 5 (mon message 870).

Je voulais seulement dire que les droits de l’homme (droits fondamentaux prescriptibles et universels) relèvent du droit international universel (droit international coutumier ou traité) et pas d’un instrument juridique national (contitution). Il y a environ 200 constitutions nationales : voulez-vous 200 définitions des droits fondamentaux ?

Dans la constitution, une référence aux droits de l’homme universels (via le droit international coutumier ou conventionnel) sera à la fois nécessaire et suffisante. On tiendra compte ainsi de l’aspect évolutif des droits fondamentaux et de leur importance de leur interprétation permanente notamment par les organes judiciaires (internationaux et nationaux).

La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 contient, je vous le rappelle, des affirmations qui sont mises en cause ici même - notamment concernant le droit de propriété.

La Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 représente (grâce à l’ex-Union soviétique en grande partie, ne l’oublions pas) un meilleur équilibre des droits civils et politiques et des droits économiques et sociaux.

Je maintiens donc mon point de vue concernant le danger d’exposer les droits fondamentaux dans une constitution (au delà d’une affirmation générale de la supériorité de ces droits). C’est en partie parce que le TCE a fait le contraire que j’ai répondu non lors du référendum du 29 mai dernier. JR

[b]Message 860 de JeanG : précisions concernant le point 5 Point 5 (mon message 870). [/b]

Je voulais seulement dire que les droits de l’homme (droits fondamentaux prescriptibles et universels) relèvent du droit international universel (droit international coutumier ou traité) et pas d’un instrument juridique national (contitution). Il y a environ 200 constitutions nationales : voulez-vous 200 définitions des droits fondamentaux ?


Il n’est pas question, ici, de définir une constitution universelle mais, de définir celle qui nous convient.

Autrement dit de dire quelle est notre conception de la vie en société, de dire ce que chaque citoyen est en droit d’attendre de la société et ce que la société a le droit d’exiger de lui.

C’est pourquoi je faisais référence à la déclaration universelle des droits de l’homme, qui semble admise par tous les pays adhérents à l’UE. Mais cette déclaration n’interdit pas d’en ajouter d’autres.

Déclarations des droits de l’homme

Je ne dis pas (JeanG 897) qu’il est interdit d’ajouter des déclarations des droits, mais que c’est inopportun et même franchement dangereux- en particulier dans une constitution. JR

JeanG, n’y a-t-il pas un malentendu ?

Si vous parlez de l’énoncé des droits, vous parlez non pas de la constitution, mais de la « Charte » (ensemble des déclarations universelles + pseudo universelles, nationales - s’agissant de la constitution française, celle de 1789 en particulier doit être incluse - ce n’est pas négociable, me concernant… je crois qu’Etienne aussi.)

La Charte n’est pas incluse dans la Constitution.
Les lois et traités non plus - ça, c’est plus évident pour tout le monde.

La Charte est reconnue et affirmée explicitement par la constitution. Pas l’inverse. [b]*

La Charte prime ainsi sur la constitution[/b], qui prime elle sur les lois et traités.

* La DDHC de 1789 a un caractère particulier. Elle énonce des droits fondamentaux, mais définit aussi ce qu’est une constitution.

C’était d’ailleurs l’une des catastrophes du T"C"E… Et « on » a eu le toupet de dire qu’il y avait une avancée (sans parler du contenu de la Charte, c’est encore un autre problème) alors que la Charte était incorporée dans la « constitution », et rendue « virtuellement caduque » tout à fait explicitement dans « celle-ci ».

Voir en particulier (de mémoire, il y a d’autres raisons) le fameux duo d’articles II-111 et II-112, qui ne font pas qu’affirmer le primat des traités sur la constitution proprement dite - ce à l’intérieur d’une « Charte des droits fondamentaux »… appréciez le toupet - mais qui vont bien plus loin :

Je cite les deux articles (en partie) :

[color=purple]II-111-1 : « [les Etats et l’union, suivant principe de subsidiarité] respectent les droits, observent les principes et en promeuvent l’application, conformément à leurs compétences respectives et dans le respect des limites des compétences de l’Union telles qu’elles lui sont conférées dans les autres parties de la Constitution. »

II-111-2 : « 2. La présente Charte n’étend pas le champ d’application du droit de l’Union au-delà des compétences de l’Union, ni ne crée aucune compétence ni aucune tâche nouvelles pour l’Union et ne modifie pas les compétences et tâches définies dans les autres parties de la Constitution. »

II-112-2 : « Les droits reconnus par la présente Charte qui font l’objet de dispositions dans d’autres parties de la Constitution s’exercent dans les conditions et limites y définies. »[/color]


Ce qui, établit grosso modo, d’après moi, que les droits et libertés fondamentales affirmés dans la « Charte » (et ailleurs ?) ne sont garanties appliqués par la « constitution » que dans la mesure où les institutions proposées sont conçues pour…, mais qu’à l’inverse, les institutions n’ont pas être améliorées pour rendre plus efficiente l’application des droits fondamentaux affirmés !

On peut arguer que c’est une manière de dire que l’Union laisse des compétences aux Etats. On peut…
On peut aussi rappeller l’évidence d’un transfert incessant de souveraineté vers un panier sans fond qui la vend aussi sec à l’OMC.

On peut aussi dire que certains droits sont plus ou moins facilement rendus applicables et leur application contrôlée par les institutions telles que définies « à prendre ou à laisser »

… je pense par exemple à l’article Article II-89… toujours inclus dans la « Charte des Droits fondamentaux incorporée au T"C"E » :

« Toute personne a le droit d’accéder à un service gratuit de placement. »

(Comme ça - brut. Cherchez les bémols, les aricles en vis-à-vis… néant.

Par contre, on a aussi ça, bien sûr… Extrait de l’article I-4 du Chapitre I - Libertés fondamentales et non-discrimination :

« La libre circulation […] des capitaux […]" est « garantie par l’Union et à l’intérieur de celle-ci, conformément à la Constitution » (au même titre que celle "des personnes, des services, des marchandises »).

Note : les articles II-111 et 112 sont cités (pas rappelés dans leur contenu) en introduction du volet « Les principes fondamentaux, déclarés en tête de la Constitution, devraient primer sur toute autre règle ».

[align=center]Droits essentiels[/align]

Je persiste à penser que la constitution doit bien définir les droits essentiels des individus.

« La constitution est la loi qui dans un pays, règle le mode d’exercice ou de délégation de la souveraineté, c’est à dire la forme du gouvernement, les attributions et le fonctionnement de l’État, les droits essentiels des individus, enfin la participation des citoyens à l’exercice de l’autorité, se réalisant ordinairement au moyen du droit d’élection ou de suffrage. »
Mêmes si ces droits vont sans dire car relevant du droit international universel, ils vont encore mieux en les disant !

Enoncer les droits fondamentaux dans la Constitution ?

JeanG (910) :

(Ce message fera plus de 30 lignes.)

Implicitement (par la définition du Larousse que vous reproduisez), vous me faites dire une chose que je ne dis pas : que la constitution ne devrait pas régler les droits fondamentaux des individus.

Je vous renvoie à ce sujet à l’avant-projet CIPUNCE Rév. 10 :

[i]"Article [4] : Droits fondamentaux

"1. L’Union accepte la Déclaration universelle des droits de l’homme, proclamée le 10 décembre 1948, ainsi que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, en date à Rome du 4 novembre 1950.

"2. La loi organique fixe les modalités d’application de la Déclaration universelle et de la Convention européenne dans le cadre de l’Union.

« 3. Aucune disposition de la Constitution ou de la loi organique n’a pour but ou effet de restreindre la portée théorique ou pratique des droits fondamentaux proclamés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ni des droits fondamentaux tels que [/i]définis ou appliqués par les États membres dans leur ordre juridique interne . »

Cet article, il me semble, règle bien les droits fondamentaux des individus ?

Ce que je soutiens, c’est que la constitution ne doit pas reproduire ou répéter, en faisant semblant de les proclamer comme si ça n’avait jamais été fait, des droits fondamentaux déjà énoncés dans des instruments ou des coutumes internationales de toute façon supérieurs à la constitution : il faut procéder par renvoi et bien se garder de toucher ou de retoucher aux instruments et coutumes qui se sont laborieusement mis en place depuis 200 ans ou plus.

Pourquoi ? Pour au moins deux raisons : 1) quand on recopie, on s’expose à faire des fautes (et parfois, disons les choses diplomatiquement, à commettre des dérives : exemple, le TCE) ; 2) ensuite (considération essentiellement pratique mais importante) : le système de la répétion ou de la reprise textuelle imposerait de réviser la constitution à chaque modification du contenu des droits fondamentaux.

Je vous donne un exemple :

La France a accepté la Convention européenne de protection de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, instrument européen d’application des droits de l’homme extérieur et supérieur à constitution française. Cette convention a été précisée ou élargie par des protocoles d’application postérieurs à la ratification de la France, dont le plus célèbre est sans doute celui sur l’abolition de la peine de mort.

Quand la France a voulu accepter l’abolition de la peine de mort, il lui a suffi de ratifier le protocole (par une loi de ratification). Elle n’a pas eu à effectuer en plus une révision constitutionnelle, ce qu’elle aurait dû faire si elle avait reproduit les droits les dispositions originelles de la Convention européenne.

Mais là n’est pas le problème essentiel. Il est que les droits de l’homme sont par nature imprescriptibles, universels, intéressent l’humanité tout entière et partout, et qu’en conséquence ils peuvent m’être appliqués même - voire surtout - quand je suis au Népal, en Birmanie ou aux Etats-Unis : et dans ces trois cas, ce n’est pas la constitution française qu’il me faudrait invoquer, mais bien la Déclaration universelle des droits de l’homme, la coutume internationale qui s’est créée sur cette base… et, si ces pays ont mis leur interprétation de tel ou tel droit fondamental dans leur constitution, la constitution de ces pays.

Encore, si la France recopie les droits universels dans sa constitution, on peut raisonnablement penser que la copie ne s’écartera pas de l’original : mais la pensée de 200 copies dans 200 constitutions continue de me fait frémir, et je persiste à croire que ce serait la fin de la notion même de droits de l’homme universels.

Nous donnerions un très mauvais exemple en procédant de cette manière : celui du traitement des droits fondamentaux dans le TCE devrait nous suffire.

Vous ne répondez pas, me semble-t-il, à cet argument que je trouve très fort.

C’est d’ailleurs une illusion de penser qu’en reproduisant les droits fondamentaux dans une constitution on leur donnerait une force qu’ils n’auraient pas déjà par ailleurs. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 est intervenue en dehors de toute constitution : c’est bien elle qu’on cite aujourd’hui encore, et pas les déclarations des droits incluses dans les constitutions de 1793 et de 1795 et dans la Charte de 1814 ou dans la Charte de 1830.

J’appelle incidemment votre attention sur le paragraphe 3 du projet d’article CIPUNCE : son effet net est de garantir l’application maximale des droits fondamentaux dans tous les cas (si un Etat membre a mis un place un régime d’application plus favorable que celui prévu par la Déclaration universelle, etc., c’est ce régime qui s’appliquera). Cette disposition était en germe dans le TCE, mais elle est considérablement plus précise et plus forte (du moins je le pense) dans le projet CIPUNCE Rév. 10 : voilà la grande garantie des droits fondamentaux dans le cadre de l’Union européenne. JR

[align=center]Droits essentiels.[/align]

Jacques Roman, (message n° : 915)

Comme quoi, même les échanges par écrit, sur Internet, peuvent être sources de malentendus !

J’avais effectivement compris, lorsque vous écriviez : « NON : une constitution ne règle pas les droits essentiels des individus. » que vous considériez que la constitution ne devait pas régler les droits fondamentaux des individus.

De même, lorsque j’ai écrit que la constitution « doit se référer à la déclaration universelle des droits de l’homme » je n’envisageais pas de l’y incorporer.
D’ailleurs, en parlant des droits essentiels des individus, je pensais plutôt à ceux énoncés dans le préambule de la constitution de 1946. il faudrait tous les citer mais je suis particulièrement attaché aux N° 3, 5, 8, 9, 10, 11 et, 13.
Je serais particulièrement heureux qu’ils figurent en préambule d’une constitution européenne.

Cordialement.

Droits fondamentaux (message JeanG 927)

Nous voilà donc d’accord, je pense.

Je n’ai rien contre l’inclusion des droits fondamentaux prévus dans le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 comme « particulièrement nécessaires à notre temps ». Toutefois, s’il s’agit de la constitution européenne, j’ai bien peur que plusieurs d’entre eux ne fassent pas le consensus… car les temps ont changé !

Exemples : « Tout travailleur participe […] à la gestion des entreprises », « La République française […] n’entreprendra aucune guerre dans des vues de conquête » (la formulation est devenue insuffisante : elle signifie par déduction qu’on peut entreprendre une guerre dans des vues autres de conquête. Il faut interdire la guerre, purement et simplement, et n’autoriser le recours à la force armée qu’en cas de légitime défense).

Merci de m’avoir renvoyé au préambule de 1946 : cela m’a permis de me rendre compte que j’avais oublié la situation de « monopole de fait » dans ma définition des services publics. Omission réparée : voici le nouveau texte concernant les services publics (à paraître dans la CIPUNCE Rév. 11 en préparation) :

« Article [65]. Services publics. Toute activité d’intérêt général à caractère économique impliquant continuité, adaptabilité, neutralité et égalité et tout monopole de fait constituent par nature des services publics. Il appartient à chaque État membre de fixer souverainement, dans le cadre de la loi et hormis toute considération de concurrence ou de rentabilité économique, les modalités de prestation de tout service de ce type et de décider si l’entreprise considérée doit devenir propriété de la collectivité. »

Cordialement. JR

Ne pas reproduire les grands principes de la DDHC dans la Constitution mais les déclarer supérieurs à toute autre norme.
Imposer le vrai référendum d’initiative populaire (autonome et puissant).
Se méfier des lois organiques :confused:

  1. Je suis (presque) en tous points d’accord avec Jacques Roman sur le fait qu’il ne faut pas reproduire les grands principes de la DDHC dans la Constitution car ce serait reconnaître que ces principes ont besoin d’être reproduits pour s’imposer chez nous et qu’en n’étant pas reproduits, ils ne s’imposent pas. Il faut et il suffit d’affirmer leur prééminence absolue sur toute autre disposition.

Il faut quand même que nous tombions d’accord sur les textes de référence : DDHC et quels autres ? Mais ne nous épuisons pas là-dessus, nous avons d’autres points plus difficiles à traiter.

  1. Je n’ai pas vu que le droit de propriété était remis en cause dans nos discussion, il doit s’agir d’un malentendu : c’est la prééminence absolue du droit de propriété qui pose problème, me semble-t-il, l’absence totale de droit équivalent reconnu, notamment dans l’entreprise, à ceux qui ne sont pas propriétaires mais qui travaillent.

C’est même toute la crédibilité des droits de l’homme, la crédibilité du principe de l’égalité des droits civiques notamment, qui est battue en brèche par cette prééminence injuste, censitaire : nous vivons aujourd’hui encore dans une société où le droit de propriété donne tout le pouvoir en toutes matières (hormis le droit de vote, c’est vrai, mais qui a du mal, reconnaissons-le, à changer vraiment la vie, et qui semble bien insuffisant à incarner la démocratie, voir le cours de Rosanvallon dont j’ai retranscris une nouvelle grande leçon cette nuit, menu Documents ci-dessus) et où la non propriété prive de tout pouvoir en toutes matières : une sorte de société censitaire en quelque sorte, ce qui donne des relents hypocrites à toutes les grandes déclaration d’égalité de droit. Je ne vois pas comment donner une force réelle à l’égalité de droits proclamée dans la DDHC sans équilibrer le droit de propriété par un droit qui trouverait sa source dans le travail et donc dans un certain mérite individuel.

Pour revenir à notre fil de discussion (qu’est-ce qu’on écrit dans la Constitution, et qu’est-ce qu’on n’écrit pas), on pourrait ajouter expressément un tel « droit des salariés sur les grandes décisions concernant leur entreprise ») dans notre Constitution, sans rien retirer aux Déclarations universelles.

Mais si ce point ne fait pas consensus ici, s’il suscite chez certains de l’urticaire (pourtant, à part les grands patrons et les gros actionnaires, je ne vois pas à qui ce projet pourrait nuire), nous devrions le tenir à l’écart et par contre, surtout, tenir bon sur le Référendum d’initiative populaire : c’est en effet le RIP qui permettra, plus tard, de gagner ce droit essentiel à la faveur d’une lutte politique spécifique et d’un vote précis (et donc incontestable).

Pour discuter en détail de ce point, utilisons plutôt la discussion http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?id=25.

  1. Deuxième point de désaccord, un peu plus fort celui-là, et récurrent dans nos discussion avec Jacques :slight_smile: : les (sacro-saintes ou satanées, selon le cas) lois organiques
L'articel 4 §2 du projet CIPUNCE prévoit : "La loi organique fixe les modalités d’application de la Déclaration universelle et de la Convention européenne dans le cadre de l’Union."
À quoi sert cette disposition, concrètement ? À quelles modalités pensez-vous, mon cher Jacques ? :/

Et si ces « modalités » sont importantes, pourquoi ne pas les prévoir expressément dans le texte validé par les citoyens par référendum (ce qui n’est pas le cas des lois organiques qui sont votées ensuite) ?

Conseil : avertissez-moi par mail en cas de création de nouvelle discussion pour mettre à jour le sommaire général

Aucun robot ne me signale la création d’une discussion et je les découvre par hasard.

Or leur présence dans le sommaire de la page d’accueil n’est pas automatique : il faut que je programme moi-même, « à la main », la mise à jour du sommaire.

Donc, si vous voulez que votre discussion soit visible sur la page d’accueil, il faut me prévenir quand vous la créez :confused:

Droits fondamentaux/Textes de référence/Loi organique

(Ca fera plus de 30 lignes !)

Pour répondre à Etienne (message 937)

I. TEXTES DE REFERENCE EN MATIERE DE DROITS DE L’HOMME

En ce qui concerne la future constitution européenne, deux textes de référence, évidemment (comme le propose le projet CIPUNCE) : la Déclaration universelle des droits de l’homme et la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne une nouvelle constitution française, on peut inclure dans le préambule un rappel historique de la Déclaration des droits de l’homme et des citoyens, mais je répète que cette déclaration est dépassée à plusieurs égards. Mieux vaut se référer ici aussi à la Déclaration universelle et à la Convention européenne et, pour les précisions et compléments proprement français… à la loi organique (nous y voilà!).

II. LOI ORGANIQUE

Le concept est simple, connu et couramment appliqué, et il s’impose de lui-même. A vrai dire, je m’étonne qu’il puisse faire problème.

A. Définition

Une « loi organique » et une "loi fixant, dans le cadre de la Constitution, les règles relatives aux pouvoirs publics, et soumise pour son adoption à une procédure spéciale (dans le cas de la constitution française de 1958, celle prévue par l’article 46) : voir le Vocabulaire juridique Cornu, l’entrée « Organique ».

B. Exemple (droit de propriété)

La question du droit de propriété (message 937 d’Etienne) illustrera très bien le fonctionnement possible de la loi organique.

  1. Cette question touche au fonctionnement des pouvoirs publics en ce sens que les pouvoirs publics doivent tenir compte des droits de l’homme (droits supérieurs) dans leur fonctionnement.

  2. Le projet de constitution CIPUNCE contient à ce sujet la disposition suivante :

[i]Article [4] : Droits fondamentaux

  1. L’Union accepte la Déclaration universelle des droits de l’homme, proclamée le 10 décembre 1948, ainsi que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, en date à Rome du 4 novembre 1950.

  2. La loi organique fixe les modalités d’application de la Déclaration universelle et de la Convention européenne dans le cadre de l’Union.

  3. Aucune disposition de la Constitution ou de la loi organique n’a pour but ou effet de restreindre la portée théorique ou pratique des droits fondamentaux proclamés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ni des droits fondamentaux tels que définis ou appliqués par les États membres dans leur ordre juridique interne.[/i]

  4. Les dispositions correspondantes de Déclaration universelle des droits de l’Homme et de la Convention européenne se lisent comme suit :

[i]Déclaration universelle :« 1) Toute personne, aussi bien seule qu’en collectivité, a droit en propriété. 2) Nul ne peut être arbitrairement privé de sa propriété. »

Protocole 1 à la Convention européenne : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ».[/i]

  1. Supposons la proposition suivante d’Etienne relative au droit de propriété :

« Le droit de propriété s’entend sous réserve du droit des salariés par rapport aux grandes décisions concernant leur entreprise ».

  1. Ni la Déclaration universelle ni la Convention européenne ne comportent ce droit du salarié (du moins tel quel).

  2. La clause proposée par Etienne constitue donc une précision ou une addition à la Déclaration universelle et à la Convention européenne. C’est une clause de second rang qui a sa place dans une loi organique : si l’on recueillait dans la Constitution toutes les clauses de second rang, la constitution ferait mille pages (il n’y a pas que les droits fondamentaux qui appellent des précisions : toutes les questions traitées dans la constitution peuvent donner lieu à des précisions importantes pour les uns sinon pour les autres).

  3. Voilà pour l’argument pratique. Je passe maintenant aux arguments théoriques : a) l’homogénéité juridique : il ne faut pas , dans un même document normatif (ici la constitution), accepter solennellement des engagements inclus dans un document extérieur et supérieur (Déclaration universelle, Convention européenne) et lui faire dire des choses qu’il n’a pas dites. On risque de mettre les deux dispositions en porte à faux; b) caractère universel et imprescriptible des droits fondamentaux : il ne faut pas donner l’impression dans la constitution que les droits fondamentaux sont librement interprétables : donc, il vaut mieux, à ce titre aussi, renvoyer les détails d’application à un autre instrument - la loi organique.

  4. C’est d’ailleurs comme ça qu’on procède sur le plan international : la Déclaration universelle a fait l’objet de deux Pactes internationaux relatif aux droits civils et poliques et relatif aux droits économiques et sociaux qui sont des instruments d’application de la Déclaration universelle.

  5. Une « loi organique de l’UE relative aux droits fondamentaux » jouerait par rapport à la Constitution de l’Union le même rôle que les Pactes par rapport à la Déclaration universelle : on mettra ce qu’on voudra y mettre à condition de ne pas aller contre la constitution (c’est-à-dire de ne rien retrancher des droits acceptés dans la constitution). Sous cette réserve (constitutionnalité), la loi organique aura la même force que la Constitution.

  6. Enfin, la loi organique serait adopté dans des conditions renforcées par rapport à la loi ordinaire. Voici les dispositions correspondantes du projet CIPUNCE :

[i]"Article [71]: Lois organiques

"1. La loi organique a pour objet de fixer ou de préciser les modalités d’organisation et de fonctionnement de l’Union et des institutions et organismes établis par la Constitution. Le projet de loi organique émane du Conseil, de la Commission, des députés, ou d’un groupe de citoyens de l’Union dans les conditions prévues à l’article [65] de la Constitution.

"2. Le projet est examiné en trois lectures par l’Assemblée et le Sénat, la lecture du Sénat devant précéder la lecture correspondante de l’Assemblée. Sauf référendum, le vote du projet en troisième lecture par l’Assemblée entraîne l’adoption.

"3. Si le projet de loi organique contient des dispositions affectant l’interprétation ou l’application des accords internationaux antérieurs relatifs à l’Union, ces dispositions sont soumises à l’agrément du Conseil avant entrée en vigueur de la loi organique.

"4. La loi organique est promulguée par le Président de l’Union.

« 5. La loi organique peut renvoyer certaines dispositions de son domaine à une loi ordinaire, une loi-cadre, un règlement-loi ou un règlement ordinaire sous réserve que les dispositions adoptées en vertu de la délégation ne doivent pas contredire les dispositions de la Constitution ni – sauf si c’est prévu par la loi de délégation – les dispositions d’autres lois en vigueur. »[/i]

Point important : une loi organique relative aux droits de l’homme ne pourrait qu’ajouter à ces droits ou à leur compréhension. Elle ne pourrait pas en restreindre la portée sous peine d’être inconstitutionnelle.

Quant au contenu de la future loi organique, il est à discuter (mais probablement pas ici dans le détail : je tiens à voir le résultat de notre entreprise!) : on pourrait y mettre la clause relative aux salariés proposée par Etienne, et bien d’autres.

Cordialement. JR

Les lois organiques sont dangereuses pour les citoyens

Jacques,

D’abord merci pour la précision et la rigueur de votre analyse.
C’est un plaisir chaque fois renouvelé de frotter nos neurones :slight_smile:

Vous dites (940) :

[color=green]3. Supposons la proposition suivante d'Étienne relative au droit de propriété : [i]"Le droit de propriété s'entend sous réserve du droit des salariés par rapport aux grandes décisions concernant leur entreprise"[/i].
  1. Ni la Déclaration universelle ni la Convention européenne ne comportent ce droit du salarié (du moins tel quel).

  2. La clause proposée par Étienne constitue donc une précision ou une addition à la Déclaration universelle et à la Convention européenne.
    C’est une clause [/color]de second rang[color=green] qui a sa place dans une loi organique : si l’on recueillait dans la Constitution toutes les clauses de second rang, la constitution ferait mille pages (il n’y a pas que les droits fondamentaux qui appellent des précisions : toutes les questions traitées dans la constitution peuvent donner lieu à des précisions importantes pour les uns sinon pour les autres).[/color]


D’abord, [bgcolor=#FFFF99]l’équilibrage du droit de propriété par un autre droit lié au mérite de travailler n’est pas du tout « de second rang »[/bgcolor] : c’est une évolution majeure de la démocratie qui nous permettra de sortir d’un régime encore censitaire qui n’assume pas honnêtement sa nature.

À ce titre, cette évolution juridique a toute sa place au coeur même d’une Constitution écrite par les citoyens eux-mêmes (et pas par leurs représentants, qui sont souvent, eux, propriétaires et actionnaires).

Vous dites ensuite :

[color=green]On risque de mettre les deux dispositions en porte à faux; (...) il ne faut pas donner l'impression dans la constitution que les droits fondamentaux sont librement interprétables : donc, il vaut mieux, à ce titre aussi, renvoyer les détails d'application à un autre instrument - la loi organique.[/color]
Pas d'accord du tout : vous renoncez trop vite, sans raison sérieuse, à infléchir le droit sous la pression populaire : [b]si nous sommes nombreux (et il faudra le vérifier, bien entendu) à vouloir tempérer le droit de propriété des moyens de production par un droit des salariés sur les moyens de production, il faut le faire nous-mêmes, au plus haut niveau, et pas à un niveau subalterne, ni sous tutelle parlementaire.[/b]

Quand vous parlez de « conditions renforcées » qui devraient nous rassurer sur l’honnêteté des lois organiques, vous oubliez que les parlementaires n’ont jamais réalisé cette réforme du droit de propriété et qu’il n’y a aucun signe qu’il le feront jamais, ni à la majorité simple, ni à la majorité renforcée, bien sûr.

Vous vous contentez surtout d’un argument de nombre (majorité renforcée pour adopter les lois organiques) pour régler un problème de légitimité : les lois organiques sont écrites par des parlementaires et leur nombre important ne change rien à ce vice majeur.

Vous dites enfin :

[color=green]Quant au contenu de la future loi organique, il est à discuter (mais probablement pas ici dans le détail : je tiens à voir le résultat de notre entreprise!) : on pourrait y mettre la clause relative aux salariés proposée par Étienne, et bien d'autres.[/color]
Jacques, on n'y mettra rien du tout puisque, précisément, la loi organique n'est pas écrite par nous mais par les parlementaires.

[bgcolor=#FFFF99]L’originalité de notre entreprise libératrice, écrire nous-mêmes notre Constitution, est mise à mort par cette traîtreuse blessure des « lois organiques ».[/bgcolor]

Les lois organiques, par leur définition même, me posent un problème fondamental de légitimité.

[b]Je ne reconnais aucune légitimité aux parlementaires (pas plus qu’aux ministres, aux juges ou aux divers candidats au pouvoir) pour écrire tout ou partie de la Constitution, ni directement dans le processus constituant, ni dans les coulisses subreptices du vote des lois organiques.

Parlementaires, ministres, juges, hommes de pouvoir et candidats au pouvoir, tout indispensables qu’ils soient pour nous, sont juges et parties en la matière et sont donc extrêmement dangereux pour les citoyens.[/b]

À mon avis, la sortie de l’âge de la pierre de la démocratie passe par cette prise de conscience majeure.

Amicalement :confused:

Étienne,

Vous - Nous, abordons, abordez ici un thème fondamental.

Sur votre suggestion de lien avec le fil sur le droit de propriété, je suis allée, parce que c’était une possibilité, sur le site de Laure Z, qui a participé dans les débuts mais dont je ne vois plus d’autres messages.

Je ne peux pas répondre sur le moment, sauf que

D'abord, l'équilibrage du droit de propriété par un autre droit lié au mérite de travailler n'est pas du tout "de second rang" : c'est une évolution majeure de la démocratie qui nous permettra de sortir d'un régime encore censitaire qui n'assume pas honnêtement sa nature.

À ce titre, cette évolution juridique a toute sa place au coeur même d’une Constitution écrite par les citoyens eux-mêmes (et pas par leurs représentants, qui sont souvent, eux, propriétaires et actionnaires).


J’y réfléchis.
MF

Droit de propriété, droit(s) du salarié sur les moyens de production

Une solution consisterait peut-être à inscrire ce droit des salariés sur les moyens de production dans la constitution en tant que droit tout à fait distinct des droits fondamentaux (anciennement dénommés « droits de l’homme ») et notamment du « droit de propriété ». On éviterait ainsi de toucher à la définition d’un droit fondamental inscrit dans la Déclaration universelle.

Cela dit, il m’apparaît assez évident que même avec des précautions il sera difficile de faire accepter ce nouveau « droit sur les moyens de production » par la majorité de l’électorat français : et je ne parle pas du reste de l’électorat européen ! Nous sortons, à mon avis, des « grands principes d’une bonne constitution » pour nous occuper de politique économique (ce qu’on a tellement reproché au TCE !). Rappelons-nous qu’une constitution concerne l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics et qu’elle doit pouvoir être acceptée par (presque) tout le monde indépendamment des opinions politiques de chacun.

De toute façon, en supposant qu’il s’agisse d’un nouveau « grand principe » constitutionnel, je suggèrerais qu’Etienne lui consacre un sujet particulier, le titre de la présente discussion étant trop général.

Je répète mon argument (resté je crois sans réponse) que les droits fondamentaux intéressent toute l’humanité, pas seulement les Français et les Européens de l’Union ; qu’ils sont universels et imprescriptibles ; qu’ils sont définis dans le cadre d’organisations internationales ; en d’autres termes, que ce ne sont pas des bouteilles dans lesquelles on peut mettre ce qu’on veut sans se soucier de l’opinion des voisins (de l’ensemble de l’humanité) - sous peine de démolir un édifice sur lequel tous nous travaillons depuis plus de deux-cents ans.

En l’occurrence, le droit du salarié ne peut pas être explicitement rattaché au droit de propriété reconnu par la communauté internationale sans outrepasser les instruments internationaux relatif aux droits fondamentaux et donc nuire à ces droits dans leur ensemble, en donnant l’impression que chacun peut les définir, les restreindre ou les élargir à sa façon. Je reste donc convaincu que le mieux est de placer le nouveau droit dans une loi organique relative aux modalités d’application des droits fondamentaux.

Et pour ce qui est des lois organiques, je répète aussi qu’elles seront adoptées dans les conditions visées par les constitutions que nous devons rédiger. (Le projet CIPUNCE, quant à lui, contient la procédure de la proposition de loi citoyenne, en vertu de laquelle le peuple peut proposer d’adopter ou d’abroger une loi, y compris organique). Je ne vois pas vraiment pas où est le problème. JR

Je pense avoir correctement lu l’ensemble des échanges précédents, et (peut-être), avoir compris le principe auquel Jacques tient :

  1. Il y a bien des ordres hiérarchisés dans les normes juridiques.

  2. Ce qui a été écrit UNE FOIS dans un « ordre supérieur » (DDHC) et qui par conséquent définit « l’État de droit », ne saurait être réécrit dans un autre ordre, au risque d’entrer en contradiction « avec ce qui ne se remet pas en cause ».

  3. Les « avancées de droits nouveaux », (pour moi fort à l’ordre du jour pour une « Constitution écrite par le peuple ») ne sauraient prendre le rang supérieur (celui de la DDHC), mais relèveraient des Constitutions… Il me semble que la Constitution susceptible de concerner plusieurs peuples à la fois (ambition européenne oblige) est confrontée à une « NOUVEAUTÉ », fondamentale et MONDIALE : le fameux « droit de propriété », garanti par son classement dans « l’ordre supérieur », est victime de son succès « mondial », et il s’auto-ruine "moralement "par l’abus MONDIAL qu’en font des « personnes morales » abusant de l’obsolescence du « droit fondamental » devant l’émergence du phénomène global : il se trouve que ce « droit » a fait la courte-échelle "à un « FAIT ACCOMPLI » qui le dépasse, et même qui, une fois hissé au niveau « global », prétend émettre des clauses suspensives sur tout droit. (en effet, Jacques, pour les multinationales US la DDHC est « dépassée » !)

  4. Il fallait donc bien dire NON au TCE, qui formulait x fois les mêmes principes fondamentaux pour les soumettre à des « conditions d’application » suspendues au dogme économique… (car ce dogme était placé au-dessus même de la Déclaration Universelle Des Droits de l’Homme)

  5. Ma conclusion est qu’il faut quand même que la Constitution, qui occupe juste le 2è rang de la hiérarchie juridique, derrière la DDHC, offre la possibilité d’inscrire des droits nouveaux avant même « la loi organique » plutôt que d’en interdire la possibilité.

  6. Ces « droits nouveaux », en fait les droits de regard et d’ingérence dans les gestions, relèvent en effet directement de l’esprit des lois (donc de la DDHC) : ils en sont une conséquence immédiate et logique (dignité, éducation, information, liberté : " la personne humaine ne doit pas être traitée comme objet "… Un sujet humain doit avoir accès à l’information, qui est inséparable de la prise de décision, car une information qui ne nous associerait pas à la prise de décision qui en relève est forcément tronquée : cela se conjugue autant en économie qu’en médecine…)

  7. Il n’y a pas remise en cause juridique du droit de propriété comme droit fondamental. Bien !

…Mais le fait économique lui-même démolit la propriété privée populaire et dénature la notion même de propriété dite « privée » en hypertrophiant un « droit d’abus », qui se manifeste, avec les monstres transnationaux, de façon cataclysmique.

  1. (Jacques me suivra-t-il ?..) La revendication des droits nouveaux en question avec Étienne concerne bien « le droit de propriété », mais c’est justement pour que ce droit ne soit pas dénaturé par l’abus qui en est fait dans certaines pratiques « économiques ».

  2. Il ne s’agit donc pas d’écrire un droit fondamental nouveau, ni de réécrire ce qui est gravé dans le marbre, il s’agit de faire en sorte que l’application en soit « viable », grace à des « lois Constitutionnelles », justement, qui permettent de garantir que la DDHC ne soit pas « dépassable » par la force du fait accompli économique.

  3. Il se peut que j’aie tout faux. :cool:

Droits des salariés sur les moyens de production

(Plus de 30 lignes)

Voici ce que je pense :

  1. Je présume que nous avons décidé de rédiger ici une constitution nationale modèle (pour tous les pays) et une constitution de l’Union européenne.

  2. Les droits de l’homme (droits fondamentaux) ont maintenant un contenu universel qu’un pays ou un groupe de pays ne peut pas modifier tout seul sous peine de porter atteinte à la notion même de droit fondamental.

  3. C’est à la Déclaration universelle des droits de l’homme et aux deux Pactes sur les droits civils et politiques et sur les droits économiques et sociaux qu’il convient de se référer dans une constitution modèle, ainsi qu’à la Convention européenne en tant qu’instrument d’application « local ». La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen est une déclaration purement française, malgré sa volonté d’universalisme et sa valeur historique considérable.

  4. La Déclaration et les deux pactes sont par nature extérieurs et supérieurs à la constitution nationale modèle et à la constitution européenne que nous nous proposons de rédiger ici.

  5. Le principe proposé (« droit des salariés sur les moyens de production ») n’est pas inscrit dans les droits fondamentaux universels tels qu’ils se présentent actuellement. Son contenu n’est pas encore défini et ne pourra l’être qu’au terme du débat politique et citoyen ordinaire. Le mettre maintenant dans la constitution, ce serait mettre la charrue avant les boeufs et proposer une certaine politique économique - exactement ce que le TCE a voulu faire dans l’autre sens et qu’on lui a à juste titre reproché : la constitution n’énoncerait pas une règle mais un programme politique.

  6. En pratique, une constitution (du moins une constitution européenne) contenant une telle clause rencontrerait une forte opposition, en France autant qu’ailleurs : ce serait préjudiciable à l’adhésion générale qu’exige toute bonne constitution.

  7. Cela ne veut pas dire que le principe ne s’élèvera pas un jour à la hauteur d’un vrai droit fondamental économique reconnu universellement, mais on ne le saura qu’après débat citoyen prolongé et approfondi. Mettre le principe maintenant dans un projet de constitution en tant que droit fondamental, c’est prêter aux citoyens des intentions qu’ils n’ont peut-être pas sur une question qui, par ailleurs, n’est pas de nature vraiment constitutionnelle et n’a pas fait l’objet de débats suffisants.

  8. De toute façon, nous nous fourvoyons en présentant le nouveau principe comme une modification du droit de propriété proclamé internationalement (voir 2) plus haut) : et c’est extrêmement malhabile, dans le présent contexte du moins.

  9. Pour toutes ces raisons, j’estime que le principe envisagé par Etienne 1) doit être traité comme entièrement distinct de la question du droit de propriété et 2) qu’il y a lieu de le renvoyer à la loi organique (c’est-à-dire au débat citoyen ordinaire) en tant que modalité d’application des droits fondamentaux économiques et sociaux. JR