Titre VIII et Article 64 (pouvoir judiciaire) : contreproposition JR
Modifier comme suit l’intulé du titre VIII et l’Article 64 :
Titre VIII
De l’autorité Du pouvoir judiciaire
Article 64
Le Président de la République est garant de l’indépendance de l’autorité du pouvoir judiciaire.
Il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature.
Une loi organique porte statut des magistrats.
Les magistrats du siège sont inamovibles.
Explication :
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L’emploi de l’expression « autorité judiciaire » au lieu du classique « pouvoir judiciaire » relève d’une fixation bien connue des concepteurs de la Constitution de 1958. Faudra-t-il mettre plus de 50 ans pour rectifier le tir ?
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Ce qui précède n’est qu’un infime détail en comparaison de mon profond désaccord avec Yvan Bachaud sur deux points essentiels : le « rétablissement », pour reprendre ses mots, « de la responsabilité civile professionnelle des juges », et le recours à des jurys populaires pour tirer les conséquences de manquements à ces responsabilités.
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En ce qui concerne le « rétablissement de la responsabilité civile professionnelle des juges » : pour commencer, cette responsabilité n’ayant jamais été établie, on ne saurait la « rétablir ».
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Les juges, comme tous les agents de l’État, relèvent de l’autorité hiérarchique et du système disciplinaire de droit public en cas de fautes légères ou lourdes ; en cas de faute lourde, l 'État a toujours la possibilité de s’adresser à la juridiction civile.
(En ce qui concerne la responsabilité pénale, le juge se trouve dans les mêmes conditions que tout autre citoyen.)
Quand Yvan Bachaud laisse entendre que les juges seraient dégagés de toute responsabilité pour les actes dommageables commis dans l’exercice de leurs fonctions, il raisonne donc sur un malentendu : cette responsabilité existe, mais elle est mise en oeuvre dans des conditions du droit public propres à assurer le bon fonctionnement de l’État, à garantir l’indépendance fonctionnelle des magistrats (et des autres agents publiques) et, au bout du compte à satisfaire au principe de la séparation des pouvoirs. - cela dans l’intérêt général. Si le système présente des défauts, il faut les corriger, mais en soi le système est bon.
Les citoyens n’y perdent pas : l’État qui se substitue à ses agents pour indemniser les citoyens dans des conditions pour eux beaucoup plus commodes et moins coûteuses que s’ils devaient s’adresser aux juridictions judiciaires. D’autres systèmes sont concevables, mais il n’est pas dit que ceux qui les connaissent bien recommanderaient facilement aux Français de renoncer au leur.
- Je ne suis pas davantage en faveur du recours aux jurys (même, j’ajouterais, dans le cadre restreint en vigueur chez nous).
Le jury de jugement me semble être une institution féodale que les Révolutionnaires ont repris du système anglais sans trop réfléchir : c’est un mécanisme de la démocratie (très mal bâti d’ailleurs parce que illogique, comme on l’a vu quand la Cour européenne des droits de l’homme nous a forcés à instituer une double procédure avec jury dans le cas des affaires criminelles - c’est-à-dire qu’on met le peuple dans le cas de se contredire en appel) qui n’a rien à faire, selon moi, avec le fonctionnement de la justice.
Pour qu’on ne se méprenne pas, je précise que je suis par contre favorable à l’institution du jury (ou comité) citoyen d’observation un peu dans la ligne de la proposition de Ségolène Royal, qui serait chargé de surveiller le fonctionnement de toutes les administrations (pas seulement de la justice, mais aussi de la police, des prisons, des administrations locales et autres), et de faire rapport publiquement sur leurs constatations.
Mais c’est à l’État, représentant de l’intérêt général, plutôt qu’à des jurys que je ferai toujours confiance pour tirer les conséquences appropriées des fautes lourdes commises par ses agents et cela dans des conditions équitables pour tous.
Pardon d’avoir été long, mais Yvan Bachaud touche ici à des questions fondamentales qui méritent qu’on s’explique en détail. JR