Projet de « pacte des peuples pour un nouvel ordre mondial » [ultérieurement réintitulé « pacte des peuples pour une meilleure gouvernance mondiale » : voir message 9782]
[b]On trouvera ci-après le projet de « Pacte des peuples pour un nouvel ordre mondial » que j’ai soumis comme contribution personnelle aux travaux du Réseau de Citoyens européens-Union des peuples solidaires (http://european-citizens-network.eu/pacte-fr/). Ce texte est à mettre en rapport avec le projet de titre [IV] du document 1-Rév. 4 présenté par EUROCONSTITUTION.ORG, en tant qu’il s’agit de l’exercice de la démocratie participative à l’échelle mondiale. Une discussion a été ouverte également sur le site EUROCONSTITUTION.ORG – Un « pacte des peuples » ? Pourquoi pas ! (projets UPS et JR) : http://www.euroconstitution.org/forum/viewtopic.php?f=193&t=1591
Je précise que le présent projet de « pacte des peuples » a une portée générale et qu’il n’est pas exclusif d’autres pactes des peuples plus spécifiques tels que celui sur les biens communs et les droits collectifs auquel l’UPS (Réseau de Citoyens européen- Union des Peuples solidaires) travaille actuellement. JR[/b]
AVANT-PROJET DE PACTE DES PEUPLES POUR UN NOUVEL ORDRE MONDIAL (soumis le 1er mai 2010 à l’UPS (Réseau de Citoyens européens-Union des peuples solidaires) par Jacques Roman – Original français)
Exposé des motifs
Voilà une trentaine d’années que l’humanité est entrée dans l’ère de l’information : depuis, rien d’important n’échappe à l’attention immédiate des habitants de la planète.
La révolution informationnelle a beaucoup contribué à la mondialisation : plus qu’à tout autre moment de l’histoire, chaque individu se sent au moins un peu partie prenante aux problèmes de l’humanité et – dans une moindre mesure il est vrai – à leur solution.
Reste que ces problèmes qui intéressent toute l’humanité continuent pour l’essentiel d’être traités par des institutions étatiques et interétatiques, le plus souvent sans consultation directe des populations.
Il est entendu que les gouvernements agissent au nom des États, et que les États eux-mêmes représentent les peuples. Mais la démocratie est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple : c’est donc de chaque peuple, au niveau national, et de la collectivité des peuples, au niveau international, que découle la souveraineté : les États et les gouvernements n’en sont que les dépositaires – les vecteurs –, et ils doivent avoir constamment cette vérité présente à l’esprit.
Pour leur faciliter la tâche, le présent projet relatif au « Pacte des peuples pour un meilleur ordre mondial » propose un instrument international d’un type nouveau, appelé à devenir juridiquement contraignant, dans lequel les peuples eux-mêmes énonceront les quelques règles majeures auxquelles ils entendent que les États et les gouvernements se conforment en tous points.
Ces grandes règles ont trait à cinq aspects fondamentaux de la vie nationale et internationale : souveraineté, paix, valeurs, droits fondamentaux, économie.
On dira que ces règles figurent déjà, explicitement ou implicitement, dans les principaux instruments juridiques internationaux : en particulier dans la Charte des Nations Unies, dans la Déclaration du millénaire et dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, et les parraineurs du présent projet ont entendu, bien évidemment, se référer à ces instruments juridiques solennels. Ils constatent néanmoins que leur application varie beaucoup d’un État ou d’un gouvernement à l’autre et qu’il y a donc intérêt à expliciter ce qui ne l’a pas été – ou pas suffisamment – jusqu’à présent, de manière à ne laisser aucun doute sur la volonté des peuples.
Le présent avant-projet de « Pacte des peuples » vise d’abord à engager un débat public général à l’échelle de la planète.
La forme juridique définitive du Pacte reste à discuter. Les parraineurs du projet sont conscients que jusqu’à présent les instruments juridiques obligatoires au plus haut niveau (traités, constitutions) émanent des États et répondent à des procédures prévues par les droits nationaux et le droit international. Cependant, comme il s’agirait ici du premier acte de démocratie internationale directe à proprement parler, il a semblé approprié d’envisager une procédure spécifique, procédure qu’on pourra compléter au besoin par les procédures traditionnelles.
Même s’il est dû à l’initiative d’un petit groupe de citoyens de l’Union européenne, notre projet s’adresse à toutes les femmes et tous les hommes de bonne volonté, partout dans le monde.
Il s’adresse aussi à toutes les associations et mouvements civiques, dans l’espoir d’ouvrir un débat aussi large que possible débouchant sur des résultats concrets.
PACTE DES PEUPLES POUR UN NOUVEL ORDRE MONDIAL
Nous, les peuples du monde,
Résolus à faire pleinement usage du principe démocratique en vertu duquel la souveraineté découle des peuples,
Nous référant à la Charte des Nations Unies, l’instrument juridique international au plus haut niveau, adoptée à San Francisco (États-Unis d’Amérique) le 25 juin 1945 et acceptée depuis par la quasi-totalité des États,
Constatant que les idéaux et les objectifs inscrits dans la Charte sont loin d’avoir été atteints,
Constatant en particulier :
– que l’humanité n’est toujours pas à l’abri du fléau de la guerre, et qu’il n’a pas encore été possible aux États de s’entendre pour maintenir la paix et la sécurité internationales, ni d’adopter tous les principes et méthodes voulus pour garantir qu’il ne sera pas fait usage de la force des armes sauf dans l’intérêt commun,
– que la dignité et la valeur de la personne humaine et le principe de l’égalité de droits entre les femmes et les hommes et les nations, grandes et petites, sont encore bafoués,
– que les conditions nécessaires au maintien de la justice et du respect des obligations résultant du droit international n’ont été que très imparfaitement créées,
– que le rythme du progrès social et l’amélioration des conditions de vie dans la liberté laissent beaucoup à désirer, et qu’on observe partout des inégalités criantes entre les individus comme entre les nations,
Reconnaissant que les peuples sont représentés en droit international – plus précisément dans les institutions internationales, mondiales, régionales et autres – par leurs États respectifs : c’est-à-dire, en fait, par les gouvernements qui agissent au nom de ces États,
Convaincus toutefois que le principe démocratique évoqué plus haut donne pouvoir à chaque peuple d’orienter l’action de son État et de son gouvernement,
Nous adoptons les dispositions suivantes et les principes y contenus sous la forme d’un « Pacte des peuples pour un meilleur ordre mondial », cela dans la ferme et souveraine intention que tous les États et gouvernements s’y conforment en tous points et à tout moment.
Nous entendons que le présent Pacte, après avoir été adopté conformément à ses dispositions, reçoive force contraignante au plus haut niveau sur les plans international et national, et que les mesures requises à cet effet soient prises dans les plus brefs délais par toutes les autorités publiques compétentes.
I. La souveraineté
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La souveraineté découle du peuple, et les peuples peuvent l’exercer directement ou par leurs représentants conformément à leurs constitutions respectives et au droit international.
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Aucun peuple ne peut être forcé à renoncer à sa souveraineté.
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Chaque État, en tant que représentant du peuple, est réputé souverain par rapport aux autres États. La souveraineté de l’État s’exerce dans le respect du droit international et des accords internationaux constitutionnellement ratifiés.
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La souveraineté couvre en particulier ce qui a trait à l’identité sociale, culturelle et économique de chaque peuple.
II. Les valeurs essentielles
- Nous faisons nôtres les six valeurs fondamentales pour sous-tendre les relations internationales au XXIe siècle, proclamées dans la Déclaration du millénaire, adoptée le 8 septembre 2000 à l’Organisation des Nations Unies, à New York, lors du Sommet de l’an 2000, à savoir : la liberté, l’égalité, la solidarité, la tolérance, le respect de la nature, le partage des responsabilités.
III. La paix, bien commun essentiel
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La paix est notre principal objectif. Nos États et nos gouvernements ont pour première fonction de la maintenir.
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Nous rappelons à nos États et nos gouvernements qu’ils sont tenus de résoudre les différends en conformité avec le droit international, plus particulièrement l’Article 51 de la Charte des Nations Unies, qui interdit le recours à la force armée sauf dans le cas de légitime défense, individuelle ou collective, face à une agression armée, ou pour appliquer les décisions du Conseil de sécurité tendant à rétablir la paix et la sécurité internationales.
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L’emploi de la force armée hors le cas de légitime défense ou d’une décision du Conseil de sécurité doit être traité comme infraction à la loi nationale et internationale.
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Sauf cas de légitime défense ou en conséquence d’une demande du Conseil de sécurité, l’envoi, l’implantation et le maintien de personnels et d’équipements militaires à l’étranger nécessitent l’accord du pays de destination.
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Nous enjoignons à nos États et nos gouvernements de négocier de bonne foi en vue de parvenir à un désarmement général contrôlé, en commençant par les armements nucléaires et les autres armes de destruction massive.
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Nous notons que le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies, dans sa composition actuelle, n’est pas véritablement représentatif de la collectivité des peuples du monde.
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Pour cette raison, en attendant les réformes nécessaires, nous jugeons souhaitable que toute décision du Conseil ordonnant ou autorisant l’emploi de la force soit soumise à l’Assemblée générale des Nations Unies pour approbation.
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Plus généralement, nous demandons à nos États et gouvernements d’aviser aux moyens de réformer la Charte des Nations Unies de manière que tous les organes intergouvernementaux de l’Organisation– y compris le Conseil des droits de l’homme – soient effectivement représentatifs de la collectivité des peuples.
IV. Les droits fondamentaux
- Nous faisons nôtre la Déclaration universelle des droits de l’homme, proclamée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1948.[b]
V. L’économie[/b]
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La collectivité internationale, les États et les gouvernements doivent partir du principe que l’économie est au service de la société.
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Nous sommes conscients que certains agents économiques appelés à manier la monnaie et les instruments monétaires exploitent sans scrupule leur pouvoir de droit et de fait et ce qu’on appelle la « loi du marché » pour s’assurer des avantages hors de proportion avec les services rendus, et parfois pour influer indûment sur les opérations des gouvernements.
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Nous affirmons que l’économie doit être gérée au bénéfice exclusif des populations, en ayant dûment égard aux leçons de l’expérience, à savoir :
– que le mobile du profit ne justifie pas n’importe quelle activité économique, et que le marché est impuissant à réguler l’économie. La régulation de l’économie incombe donc aux États et aux gouvernements, qui doivent agir de concert dans toute la mesure du possible ;
– que la régulation ne doit pas brider arbitrairement l’initiative individuelle.
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Tous les biens, matériels et immatériels, qui n’ont pas fait l’objet d’une appropriation privée conformément à la loi sont biens du peuple relevant de la gestion publique. Par ailleurs, l’État doit disposer du pouvoir d’expropriation pour cause d’utilité publique.
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Tout service d’intérêt général, économique ou non, impliquant égalité d’accès, continuité des prestations et adaptabilité aux besoins du public ainsi que tout monopole de fait doivent être réputés constituer des services publics, qu’ils soient gérés par les pouvoirs publics ou par des personnes privées. Il appartient à chaque peuple – donc à chaque État – de fixer les modalités de prestation des services publics et de décider, dans ce contexte aussi, s’il y a lieu de recourir à l’expropriation pour cause d’utilité publique.
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Le développement doit être durable, en ce sens qu’il doit répondre aux besoins présents sans nuire à la capacité de répondre aux besoins futurs.
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Chaque peuple doit respecter les biens et ressources des autres peuples et contribuer à leur bien-être dans la mesure de ses moyens.
VI. Procédures relatives au Pacte
A. Adoption du Pacte
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Le présent Pacte s’adresse à tous les peuples. Au sens du présent article, est réputée constituer un peuple toute collectivité humaine reconnue comme un État par au moins deux États membres de l’Organisation des Nations Unies.
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L’avant-projet de pacte donnera lieu à un débat général universel ouvert à tous sans exception. Un site Internet mondial multilingue sera créé à cette fin.
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Le débat général commencera à la date fixée à la majorité absolue des suffrages exprimés par les parraineurs du projet. Il se poursuivra jusqu’à ce que les parraineurs constatent, à la majorité absolue des suffrages exprimés, qu’il existe un degré d’acceptation suffisant pour aller plus loin.
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Toute personne majeure de 18 ans peut à tout moment, jusqu’au jour de la clôture du débat inclus, notifier aux parraineurs existants sa décision de devenir parraineur du projet.
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Tant que le débat se poursuivra, les parraineurs auront pouvoir d’adopter à la majorité des suffrages exprimés les règlements qu’ils estimeront nécessaires.
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Après clôture du débat, les parraineurs, proposeront une procédure visant à recueillir le consentement des peuples sur l’avant-projet. Cette procédure sera adoptée à la majorité absolue des parraineurs.
B. Entrée en vigueur du Pacte
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Après que le consentement de deux peuples au moins aura été recueilli conformément à la procédure visée à l’article 27 ci-dessus, le Pacte sera réputé être en vigueur entre ces deux peuples.
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Par la suite, le Pacte entrera en vigueur à l’égard de tout peuple nouvellement consentant à la date à laquelle son consentement aura été recueilli conformément à la procédure visée à l’article 27 ci-dessus.
C. Mise en œuvre du Pacte par les États et les gouvernements
- Les États et gouvernements dont les peuples ont adopté le présent Pacte feront en sorte que le Pacte ou du moins les principes énoncés dans ses parties I à V soient transposés dans la constitution nationale et dans leurs accords internationaux.