Bonjour,
Pour comprendre ma vision des choses à ce sujet, voir mon message ici: http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?pid=2912#p2912
En gros, je vois une solution intermédiaire: une Assemblée Constituante Permanente, qui juge non pas de la constitutionnalité des lois par rapport à toute la Constitution, mais seulement de leur conformité aux Principes Fondamentaux universels. Dans la mesure où l’on admet qu’une Constituante tirée au sort parmi les citoyens est capable d’écrire une Constitution, pourquoi une Assemblée Constituante Permanente formée de la même manière ne serait-elle pas capable de vérifier la conformité des lois aux seuls principes fondamentaux?
Une telle assemblée serait bel et bien au dessus du Parlement, mais aussi au-dessus du Peuple, en tant que gardienne de l’ordre supérieur auquel les Constituants originels ont fait voeu de soumission. Cet ordre supérieur est, selon Alain Touraine (in « Qu’est-ce que la Démocratie ») ce qui DOIT guider en dernier recours le choix du législateur. Sans ces principes supérieurs librement acceptés, ce sont d’autres principes, imposés par des minorités au pouvoir, qui vont se substituer, pour le plus grand malheur du Peuple (principes religieux, raciaux, économiques comme pour nos nations aujourd’hui, etc). Bref, la Démocratie, qui est par essence exprimée à travers la protection des faibles et des minorités contre les abus des forts et de la majorité, ne peut exister sans ces principes fondamentaux, qui garantissent à tous les citoyens un égal traitement en tout temps, sans condition.
Pour que vive et perdure la Démocratie, il faut donc une institution gardienne de ces même principes, et qui veille scrupuleusement à leur respect. Pour être elle-même démocratique, cette institution doit être issue du Peuple (qui s’est, rappelons-le, soumis de lui-même à leur respect), et en perpétuel changement, afin d’éviter la sclérose, le dogmatisme et la « mandarinisation ». L’enseignement de ces principes dès l’école primaire serait d’ailleurs un plus pour le maintien de la Démocratie, car ainsi chaque citoyen, potentiellement appelé à les défendre et les conserver, serait apte à le faire, y compris sans être appelé à l’Assemblé Constituante Permanente.
Pour info, les deux autres piliers de la Démocratie, selon Alain Touraine toujours, sont d’être constituée majoritairement de citoyens (i.e. de personnes physiques engagées au quotidien dans la politique de la cité), et de disposer d’une classe politique indépendante, qui gouverne l’Etat au nom du Peuple. Par « indépendante », il entend « non soumise au ballotement permanent de l’opinion », mais pas pour autant irresponsable devant le Peuple. Autrement dit, la classe politique est un corps social qui doit en permanence naviguer entre la volonté générale (voir les messages au dessus de mon post http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?pid=2912#p2912) et les Principes Fondamentaux.
Sans cette indépendance par rapport au Peuple, la classe politique ne peut pas gouverner sereinement, et sans soumission aux principes, elle finira par faire n’importe quoi (et en particulier, par gouverner pour elle-même, c’est ce qui nous arrive en ce moment avec le TCE et sa suite, mais aussi les gouvernements nationaux).
Un mot encore, même si je m’éloigne du sujet: le Peuple, en Démocratie, se soumet de lui-même à ses représentants, qu’il désigne (par toute modalité constitutionnellement établie) pour gouverner. Donc, en Démocratie, il y a un Gouvernement, qui a autorité sur les citoyens, qui deviennent donc sujets (du latin « sub jectum », qui est dessous, qui est soumis). Par ailleurs, l’autorité n’existe que si elle est librement donnée, accordée, par celui qui la subit (ou plutôt, la respecte). Dans le cas contraire, c’est un pouvoir qui s’exerce. Et un pouvoir sans autorité n’est rien. Donc, le Peuple, volontairement soumis au Gouvernement, donne volontairement au Gouvernement autorité pour gouverner. Ce faisant, le Gouvernement lui-même est obligé d’abandonner une part de son pouvoir, puisque sans acceptation du Peuple, il ne peut trouver aucune légitimité, et, en Démocratie, sera destitué. Ce jeu d’aller retour entre autorité consentie et pouvoir abandonné se déroule donc sous l’égide des Principes Fondamentaux.
La Démocratie, c’est au moins tout cela ensemble.
Brieuc