Alerte à la monolinguisation de l’Union !
Si l’on croit le site web du Financial Times de Londres, à la date du 20 février (voir http://www.ft.com/cms/s/0/80e9acaa-3d06-11e0-bbff-00144feabdc0.html#axzz1G4dHjXnr, article intitulé « Bruxelles s’efforce d’attirer les Britanniques monolingues »/« Brussels seeks to woo monoglot Brits »), M. Barroso serait en train de négocier avec le ministère des affaires étrangères britannique la mise en place d’un concours d’entrée en anglais seulement, destiné aux seuls Britanniques cela afin de faciliter le recrutement de fonctionnaires de cette nationalité.
Car il paraît qu’il y a déficit de Britanniques dans les secrétariats des institutions européennes : la population britannique représente 12 % de la population de l’Union, les Britanniques 5 % seulement des fonctionnaires.
Les bureaucrates de la Commission estiment – ils ont probablement raison – que la propension des Britanniques à ne connaître qu’une langue, l’anglais, explique en partie cette situation. En effet, actuellement, pour se présenter aux divers concours d’entrée, il faut connaître très bien une autre langue que la sienne et avoir une connaissance suffisante d’une troisième langue. D’où l’ingénieuse solution envisagée par MM. Barroso et Hague.
Les mêmes bureaucrates admettent cependant que la solution du concours monolingue risque de ne pas être acceptable.
J’irais plus loin : cette solution serait inadmissible :
– Elle signifierait que l’interprétation et la traduction deviendraient nécessaires à tous les niveaux des secrétariats d’institution européenne, d’où des coûts considérables, sans compter le temps perdu pour se faire comprendre d’un monolingue ;
– À moins – et c’est le plus vraisemblable – qu’il faille voir dans la proposition un subterfuge pour passer progressivement à l’anglais comme langue de travail unique des secrétariats des institutions européennes.
Si l’anglais devenait langue de travail unique des secrétariats de l’Union, il va de soi que les fonctionnaires de langue maternelle autre que l’anglais seraient les premiers pénalisés : ils se trouveraient en situation de concurrence défavorable à tous les stades avant d’entrer à l’Union (concours d’entrée) et après (dans le cours de leur travail ordinaire). Ce serait instituer une véritable discrimination entre les anglophones de naissance et tous les autres.
Mais il ne faut pas croire que la discrimination s’arrêterait aux fonctionnaires. Ce sont tous les citoyens européens qui en subiraient les conséquences : les actes et les directives de l’UE finiraient par être tous rédigés et conçus en anglais, puis traduits dans les autres langues, avec, au bout du compte, prédominance d’une vision anglocentrique de l’Europe.
Ne pas connaître une autre langue que la sienne quand on aspire à devenir fonctionnaire international, c’est à la fois s’avouer incapable de dépasser l’horizon de son clocher et ne pas avoir l’honnêteté d’en tirer les conséquences. Qu’ils soient simplement incompétents ou incompétents et malhonnêtes, l’Union européenne n’a pas besoin de « fonctionnaires » de ce genre. Les emplois UE sont, même après impôt, suffisamment bien rétribués pour qu’on puisse trouver des candidats britanniques à même de concourir loyalement avec tous les autres.
Il convient de s’opposer résolument à toute tentative de ce genre. JR