05 Poids du vote des États à l'UE : le compromis jagellonien (Sebastião)

[b]Vote à l’UE : le compromis jagellonien (Sebastião)

Comme je l’ai dit, je recopie ci-après les messages correspondants, repiqués du Forum : Engager un processus constituant honnête - 4 Quelle majorité pour établir et réviser une nouvelle constitution ?[/b] (http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?pid=2251#p2251)

[b]Je crois en effet que le sujet mérite une discussion à part dans le cadre du Forum Spécificités européennes.

Naturellement, si cette présentation ne convient pas, Sebastião et Etienne voudront bien la modifier comme ils l’entendront. JR[/b]

1er décembre 2006
Sebastiao
Nouveau membre
Message n°2243
Date d’inscription: 22-11-2006
Messages: 2
e-mail Re: 4 Quelle majorité pour établir et réviser une Constitution ?

Bonjour,

Je suis nouveau sur le forum et pas spécialement rompu à la politique.

J’ai parcouru un peu le forum et je ne suis pas sûr que c’est le bon endroit pour en parler, mais il existe des travaux de scientifiques ("le compromis jagiellonien“) qui permettent d’élaborer un système de vote démocratique moins approximatif que les différentes règles qui ont été fixées dans les différents traités.

J’en parle ici et les articles de référence sont là (Résumé long du compromis jagiellonien en anglais dans la revue papier) et là (Article original en anglais).

Voilà, je tenais juste à vous signaler l’existence de ces travaux.

SCA.

1er décembre 2006
Jacques Roman
Membre
Message n°2244
Date d’inscription: 06-02-2006
Messages: 391
e-mail Re: 4 Quelle majorité pour établir et réviser une Constitution ?
Votes à l’UE : la proposition jagiellonienne

Chiang Mai, le 1er décembre 2006

Bonjour Sebastião,

(Ceci est une répétition du message que je viens de mettre sur votre blog « là ».)

Pour ceux (dont je fais malheureusement partie) qui n’ont pas compétence mathématique, serait-il possible d’avoir un résumé en langue ordinaire (disons deux pages maximum) du cheminement logique de la proposition, en particulier en ce qui concerne la vertu apparemment égalisatrice de la racine carrée ?

La CIPUNCE (http://www.cipunce.net) propose, en rapport avec la composition du « sénat régional », d’utiliser un triple critère de pondération population-PNB-superficie : la formule jagiellonienne (ou « jagellonienne », comment écrit-on ?) a-t-elle une application dans le cas de ce triple critère ?

A défaut de cette vulgarisation, d’une part je regretterai bien sûr une fois de plus mon ignorance de la splendide science mathématique ; d’autre part aussi je conclurai (peut-être à tort) qu’il s’agit ici d’un exercice abstrait sur les nombres, sans vraie relation concrète avec les solutions que nous recherchons dans le contexte de l’Union européenne (je dis bien : s’il s’avérait effectivement impossible de justifier la solution proposée en langue ordinaire, ce que je ne suppose pas).

Merci d’avance. Cordialement. JR

2 décembre 2006
Sebastiao
Nouveau membre
Message n°2245
Date d’inscription: 22-11-2006
Messages: 2
e-mail Re: 4 Quelle majorité pour établir et réviser une Constitution ?Poids du vote des États membres : la proposition jagiellonienne (suite)

Bonjour Jacques,

Pour commencer, je ne dis pas que ce système est la solution à tous les systèmes de vote. Les auteurs non plus. Et je n’ai pas regardé précisément s’il pouvait s’appliquer dans le cadre de votre Constitution Citoyenne. Par contre, il semble s’appliquer dans le cas du Conseil des Ministres de l’Europe.

L’article des auteurs de ce système compare les systèmes de votes proposés dans le Traité établissant une constitution pour l’Europe (TCE) et le Traité de Nice entre eux et avec leur proposition. Seul leur système met sur un même pied d’égalité tous les citoyens européens.

N’ayant pas trop le temps de vous fournir un résumé de mon cru de l’article original, je me suis contenté de traduire le résumé qui en est fait dans la revue anglaise Physics World. J’espère que ce résumé vous conviendra. Cependant, je vous conseille vivement de lire également l’article original qui, même s’il y a des formules mathématiques, reste lisible et compréhensible (à condition bien sûr de lire l’anglais). Le paragraphe 1 est l’introduction et montre que le sujet est étudié de longue date déjà. Le paragraphe 2. commente le contexte européen actuel et démonte quelques prétendues vérités
déclarées par des politiques. Le paragraphe 3. explique la méthode pour évaluer le « pouvoir de vote » (ma traduction de « voting power »). Le paragraphe 4 présente en particulier un tableau avec le pouvoir de vote d’une Europe fictive à 6 pays. Le paragraphe 5 rappelle les règles des systèmes de vote du Traité de Nice et du Traité établissant une Constitution Européenne (TCE). Le paragraphe 6 est intéressant à lire car il compare ces 2 systèmes pour l’Europe actuelle (non fictive). Le paragraphe 7 répond à la question de savoir si ces systèmes sont justes. La paragraphe 8 présente le compromis jagiellonien sous la forme de 2 règles simples et montre le résultat sous la forme dun histogramme très parlant (fig. 2 p. 17). Le paragraphe 9 explique comment calculer le seuil idéal de la majorité qualifiée pour un nombre quelconque de pays. Le paragraphe 10 est plus « un exercice abstrait sur les nombres » :wink: puisqu’il montre que lorsque la taille de la population tend vers l’infini, le seuil idéal est de 50%. (Bien qu’abstrait, ceci explique cependant pourquoi on a naturellement créé des systèmes avec une majorité qualifiée à 50%). Enfin le paragraphe 11 conclut avec la liste des points importants à retenir.

Concernant la proposition du Cipunce et de savoir si la formule jagiellonienne s’y applique, je ne sais pas vous répondre tout de suite. Il faudrait que je prenne du temps pour la lire en détails et aussi me familiariser plus avec le compromis jagiellonien pour être capable de l’étendre à ce système si c’est possible. Mais a priori, je ne vois pas pourquoi la richesse d’un pays et sa superficie devrait jouer un rôle dans une Europe où toute personne (riche ou pauvre) devrait avoir la même influence dans les décisions prises (à mon humble avis).

Ma réponse étant déjà longue, je vous renvoie sur la traduction que j’ai faite (ici) de l’article de Physics World. Si vous estimez que cette traduction a sa place sur le forum, je vous autorise à la copier/coller.

Bien cordialement.
Sebastiao.

2 décembre 2006
Jacques Roman
Membre
Message n°2246
Date d’inscription: 06-02-2006
Messages: 391
e-mail Re: 4 Quelle majorité pour établir et réviser une Constitution ?Proposition jagiellonienne

Sebastião,

Un grand merci pour ce travail fait en un temps record afin de mettre la proposition jagiellionienne à ma (notre) portée.

Je crois que cette proposition aurait sa place comme nouvelle discussion sous le titre « Votes à l’UE : le compromis jagiellonien (Sebastião) » sur notre forum « Spécificités européennes » plutôt qu’ici : si vous voulez, je peux ouvrir la nouvelle discussion et y copier nos messages.

Quand j’aurai les idées un peu plus claires, je vous soumettrai des conclusions.

A bientôt et cordialement. JR

2 décembre 2006
Étienne
Message n°2247
Date d’inscription: 28-01-2006
Messages: 259
e-mail Re: 4 Quelle majorité pour établir et réviser une Constitution ?Proposition jagiellonienne pour calculer le poids du vote des États membres

Bienvenue Sebastiao et merci : cette information est très intéressante.
Je relaie l’info sur la page ‹ Liens et documents ›.
Il faut aussi que j’intègre cette idée dans mon document « Principes d’une bonne Constitution ».
Au plaisir de vous lire aussi sur d’autres fils de discussion.

2 décembre 2006
Sebastiao
Nouveau membre
Message n°2249
Date d’inscription: 22-11-2006
Messages: 3
e-mail Re: 4 Quelle majorité pour établir et réviser une Constitution ?Bonjour,

Hier soir j’ai oublié de repréciser le lien sur l’article original.

Sebastiao a écrit:
je vous conseille vivement de lire également l’article original

Je vous le remets ici : Article original en anglais (PDF) : 27 pages avec des courbes, histogrammes et des comparatifs.
Je pense vraiment qu’il vaut la peine d’être lu, ne serait-ce que partiellement et pour les différents comparatifs et éclaircissements (en tout cas pour moi) sur les systèmes de vote existants dans le Traité de Nice et le TCE.

En tout cas, merci pour votre retour, et à bientôt…

Bien cordialement.
Sebastiao.

Question préjudicielle : Le compromis est-il compatible avec la structure duelle de l’Union ?

Cette question s’adresse en tout premier lieu à Sebastião.

Il me semble que le compromis jagiellonien (ou « jagellonien » ? Je trouve les deux orthographes) éliminerait à peu près complètement un des deux aspects fondamentaux de l’Union européenne actuelle, qui est une structure démocratique mais aussi une association d’Etats souverains et égaux. En effet, sauf erreur de ma part, la proposition tend en fin de compte à donner aux Etats un pouvoir de vote (« voting power ») aussi équivalent que possible à leur poids démographique.

Est-ce bien le cas ? JR

Bonjour Jacques,

je ne sais pas ce qu’est la structure duelle de l’Union, mais je vous réponds sur la deuxième partie de votre message :
le poids d’un vote d’un état membre doit être proportionnel à la racine carrée de sa population et son pouvoir de vote est un coefficient numérique représentant la proportion de coalitions dans lesquelles le vote d’un pays est décisif. C’est l’index de Banzhaf et il n’est pas équivalent au poids démographique (mais proche du poids d’un vote si celui-ci est la racine carrée de la population).

Mais ce n’est pas tout, il y a la notion de seuil défini pour la majorité qualifiée qui est essentielle. Si le seuil est choisi au hasard (50% disent certains, 2/3 disent d’autres…), alors il y a forcément un déséquilibre entre les pays même si on a donné un poids proportionnel à la racine carrée de la taille de la population : les représentants n’ont plus le même pouvoir de vote et certains pays obtiennent ainsi plus d’influence que d’autres. Le seuil se calcule en fonction du nombre de pays et vaut 62% pour une Europe à 25 et 61,4% pour une Europe à 27.

L’idée de l’article telle que je l’ai comprise est que le vote de chaque citoyen ait la même importance quelque soit la taille du pays. On ne cherche pas une égalité entre les pays, mais une égalité entre les citoyens de tous les pays. Le vote d’un citoyen français ne doit pas compter plus qu’un vote d’un citoyen espagnol ou autre. Chaque citoyen doit avoir le même pouvoir de vote.

Cordialement,
Sebastiao.

PS : Je remets les liens sur les références car ils ont été perdus lors du copier/coller :
Résumé long du compromis jagiellonien en anglais dans la revue papier.
Ma traduction en français de ce résumé.
Article original en anglais

PS n°2: pour l’orthographe, j’ai traduit jagiellonien de l’anglais jagiellonian. Je ne sais pas si c’est plus correct que jagellonien. Il est vrai que Google connaît les 2 orthographes… :slight_smile:

Nature duelle de l’Union, seuil de majorité qualifié

Sebastião (votre 2252).

L’Union européenne actuelle est une confédération - une association volontaire d’Etats qui restent souverains au regard du droit international; toutefois, cette confédération contient un élément de plus en plus fort de participation citoyenne (démocratie ordinaire, fondée sur le principe « un vote par personne »).

Le processus décisionnel de l’Union reflète forcément cette « nature duelle » : d’une part les Etats membres sont souverains et égaux (unanimité), d’autre part la démocratie ordinaire est prise en compte par le jeu du poids démographique (majorité). Le « pouvoir de vote effectif » (voting power) est le résultat de ce compromis. L’accord intergouvernemental de Nice constituait aussi un compromis, le TCE de même, et maintenant nous avons le « compromis jagellonien ». (Incidemment, je viens de vérifier le Webster, et en anglais c’est « jagellonian », sans i, , de « Jajello », en français Jagellon : je suppose que la forme « Jagiellonian » est une translittération du polonais).

Le « compromis jagellonien » tend à faire pencher davantage le système du côté de la démocratie ordinaire (une voix par personne). J’ai aussi l’impression que le système proposé serait spécialement avantageux pour la Pologne (coïncidence ?).

Le système du seuil de majorité est habile : il aide en tout cas à comprendre la différence entre pouvoir de vote théorique (« voting weight ») et « pouvoir de vote effectif » (« voting power »). Mais cette description scientifique correspond à une réalité politique assez simple et bien connue : à savoir qu’en présence de deux grands partis à peu près équivalents en nombre un petit parti emportera la décision dans tous les cas : c’est mathématiquement injuste, mais est-ce que ça l’est politiquement ? Toute la question est là. On doit se demander aussi quelles sont les implications de ce système scientifique (index de Banzhaf, etc.) par rapport au principe majoritaire (fondement de la démocratie : majorité = la moitié des voix plus une, où le rôle de la voix supplémentaire est mathématiquement disproportionné).

En résumé, il me semble que le compromis jagellonien tend à affaiblir le pouvoir décisionnel des Etats en tant que souverains et égaux et à renforcer celui des citoyens en accordant plus de poids à la démographie. On peut partager cet objectif, mais le moyen mathématique (réorganisation du pouvoir de vote au Conseil des ministres) ne paraît pas le bon. La réponse est à mon avis politique : réorganiser l’ensemble des institutions de l’Union en fonction du rôle qui revient respectivement aux Etats et aux peuples.

Avant d’aller plus loin, je voudrais être sûr de ne pas avoir raté ou faussé un élément essentiel du raisonnement jagellonien. Merci de me dire si je me trompe. JR

Bonjour Jacques,

Merci pour ces précisions. J’ajoute mes commentaires au sein de votre message ci-après.

[b]Nature duelle de l'Union, seuil de majorité qualifié (msg n° 2253)[/b]

Le processus décisionnel de l’Union reflète forcément cette « nature duelle » : d’une part les Etats membres sont souverains et égaux (unanimité), d’autre part la démocratie ordinaire est prise en compte par le jeu du poids démographique (majorité). Le « pouvoir de vote effectif » (voting power) est le résultat de ce compromis. L’accord intergouvernemental de Nice constituait aussi un compromis, le TCE de même, et maintenant nous avons le « compromis jagellionien ».


Très bien, c’est ce que je crois comprendre.

Le "compromis jagellonien" tend à faire pencher davantage le système du côté de la démocratie ordinaire (une voix par personne). J'ai aussi l'impression que le système proposé serait spécialement avantageux pour la Pologne (coïncidence ?).
Oui, le compromis jagellonien tend à rendre les voix de chaque citoyen d'Europe égales entre elles. On peut dire que le système est "avantageux" pour la Pologne [b]par rapport aux autres traités[/b] puisque la Pologne y gagne du pouvoir de vote (que je comprends comme un poids plus fort dans les décisions). Mais je dirais plutôt que c'est un ajustement vers plus d'égalité entre les citoyens polonais et les autres citoyens d'Europe. Dans ce compromis, la voix d'un polonais est aussi importante (influente, précieuse...) que la voix de tout autre citoyen d'Europe. Ce n'est apparemment pas le cas avec les 2 autres Traités dans lesquels les voix des citoyens polonais sont moins importantes.
(coïncidence ?)
Evidemment, je pense que ce n'est pas une coïncidence si ce sont des chercheurs polonais qui ont proposé ce compromis. D'une part, la Pologne a à y gagner (mais aussi l'Espagne), d'autre part, la démocratie a aussi à y gagner. De plus, ils ne sont pas les seuls chercheurs à avoir travaillé sur le sujet, il suffit de voir les références (internationales) de leur article. Et la loi de la racine carrée est connue depuis les années 50 ainsi que le fait que le Traité de Nice ne traite pas tous les citoyens européens sur un même pieds d'égalité. Leur apport principal dans ce domaine est d'avoir su comment calculer le seuil à définir pour la majorité qualifiée en fonction du nombre de pays faisant partie de l'Europe.
Le système du seuil de majorité est habile : il aide en tout cas à comprendre la différence entre pouvoir de vote théorique ("voting weight") et "pouvoir de vote effectif" ("voting power"). Mais cette description scientifique correspond à une réalité politique assez simple et bien connue : à savoir qu'en présence de deux grands partis à peu près équivalents en nombre un petit parti emportera la décision dans tous les cas : c'est mathématiquement injuste, mais est-ce que ça l'est politiquement ? Toute la question est là. On doit se demander aussi quelles sont les implications de ce système scientifique (index de Banzhaf, etc.) par rapport au principe majoritaire (fondement de la démocratie : majorité = la moitié des voix plus une, où le rôle de la voix supplémentaire est mathématiquement disproportionné).
Je ne vous suis pas bien là. En regardant la figure 4 de leur article (qui montre la variation du rapport du pouvoir de vote sur le poids du vote en fonction du seuil pour quelques pays), on voit que pour un seuil à 50%, les gros pays comme la France et l'Allemagne sont plus influents dans les décisions que les autres. Au contraire, si on définit un seuil à plus de 62% (par ex. 70%), les petits pays deviennent plus influents que les gros. D'ailleurs, on voit aussi que la Pologne est peu affectée par ce seuil (du moment qu'on a défini les poids selon la loi de la racine carrée et non comme c'est fait dans le Traité de Nice) .

Dans leur article, ils montrent aussi que le principe majoritaire (seui à 50%) serait acceptable seulement si l’Europe était composée d’une infinité de pays. Et là, on rentre dans le domaine des mathématiques abstraites inutilisables dans le cas de figure qui nous concerne.

En résumé, il me semble que le compromis jajellonien tend à affaiblir le pouvoir décisionnel des Etats en tant que souverains et égaux et à renforcer celui des citoyens en accordant plus de poids à la démographie.
Il affaiblit le pouvoir décisionnel des états à forte population (France, Allemagne principalement) et augmente celui des petits états pour arriver à un équilibre des voix de chaque citoyen. Mais peut-être que je ne vous comprends pas bien. "Etats souverains" signifie (selon ma compréhension) que chaque état fait ce qu'il veut chez lui. Très bien, ça n'a pas d'importance lorsque l'on doit voter une loi qui concerne l'ensemble des pays. Je ne suis pas sûr de saisir "Etats égaux". Rassurez-moi, cela ne signifie pas que chaque état compte pour 1 dans un vote ? Cela voudrait dire que les petits pays ont beaucoup trop d'influence par rapport à la taille de leur population.
On peut partager cet objectif, mais le moyen mathématique (réorganisation du pouvoir de vote au Conseil des ministres) ne paraît pas le bon. La réponse est à mon avis politique : réorganiser l'ensemble des institutions de l'Union en fonction du rôle qui revient respectivement aux Etats et aux peuples.
Ce compromis n'est certainement pas la seule façon de gérer les décisions, mais il me semble clairement plus juste que les Traités de Nice et TCE réunis et aussi facilement ajustable lorsque de nouveaux pays rejoignent l'Europe. Ce qui n'est pas le cas des 2 traités cités.
Avant d'aller plus loin, je voudrais être sûr de ne pas avoir raté ou faussé un élément essentiel du raisonnement jagellonien. Merci de me dire si je me trompe. JR
Je rappelle (même si vous l'avez compris) que ce compromis fonctionne pour un système à 2 niveaux de vote. Un premier vote (des citoyens) pour élire leur représentant au niveau européen. Un second vote des élus (représentant un grand nombre de citoyens) pour prendre des décisions concernant tous les citoyens européens. Par l'intermédiaire de son élu, chaque citoyen a une certaine influence sur les décisions qui sont prises au niveau européen. Le compromis jagellonien fait en sorte que chaque citoyen ait la même influence (toujours par l'intermédiaire de son élu bien sûr).

Cordialement,
Sebastiao.

Nature duelle de l’Union (suite)

Merci Sebastião.

Ma remarque sur la Pologne relevait en partie de la taquinerie : que des Polonais aient proposé un système avantageux pour eux par rapport aux autres traités n’enlève rien à la valeur du système proposé s’il est bon - nous sommes bien d’accord.

J’ai en effet compris que le compromis opère pour un système à deux niveaux de vote : dans chaque Etat les citoyens élisent leur représentants à l’UE (« un vote par personne », pas de problème) ; ensuite, au Conseil des ministres, le pouvoir de vote de ces représentants est calculé de manière à respecter (à peu près) le principe de l’égalité des votes de tous les citoyens de l’Union, sans suravantage ou sous-avantage selon l’Etat auquel ils appartiennent.

Question : Dans ces conditions, pourquoi ce compromis compliqué alors qu’on parviendrait semble-t-il automatiquement au même résultat en accordant aux représentants de chaque Etat membre un pouvoir de vote strictement proportionnel au nombre de ses habitants ?

Reste le point essentiel selon moi : le compromis jagellonien présuppose que l’UE est déjà un Etat fédéral dans lequel les citoyens concourent directement ou par leurs représentants aux décisions fédérales, ce qu’ils supposerait en effet le respect du principe « un vote par personne ». Or ce n’est pas le cas : l’Union est une organisation confédérale dont les citoyens ont entendu, jusqu’à preuve du contraire, préserver leur indépendance collective, c’est-à-dire le consensus qui s’incarne dans l’Etat dont ils se sont dotés. La volonté d’indépendance collective est sans rapport direct avec la démocratie : le compromis jagellonien me semble donc, sous cet angle, bancal - ou du moins insuffisant.

Pour répondre à votre question, la souveraineté des Etats, sujets directs du droit international, implique bien l’égalité des Etats, quels que soient le nombre de leurs citoyens, leur richesse et leur histoire (exactement comme tous les citoyens sont égaux devant la loi) : c’est sur cette base que le droit international fonctionne de tout temps - quand il fonctionne -, et c’est ce qui fait que Monaco a la même voix que la Chine à l’Assemblée générale des Nations Unies.

L’Etat, les Etats sont le résultat de l’équilibrage de rapports des forces en présence : le respect de tous les Etats, petits ou grands, est la condition indispensable de la paix mondiale, ou, si l’on veut de l’état de Droit. Là encore, l’objectif est à distinguer de l’objectif démocratique, même si le respect de l’état de Droit marche généralement avec la démocratie.

Ce qui ne veut pas dire que les organisations d’Etats ne peuvent pas (ou ne veulent pas) tenir compte des réalités démographiques/démocratiques, géographiques et autres. Au contraire, elles le font tout le temps (par exemple, à l’ONU, par le Conseil de sécurité). Cependant, l’équilibre juste n’est pas seulement fonction de la démographie ou d’un simple calcul mathématique, mais d’une répartition politique des attributions. Là où la démocratie est en jeu, il faut procéder à partir du principe « un vote par personne »; là où les Etats souverains et égaux sont en cause (démocratiquement d’ailleurs, puisque ce sont les citoyens qui l’ont voulu), c’est d’autres principes qu’il s’agit.

Voilà pourquoi le projet CIPUNCE de constitution de la Confédération [l’Union] européenne distingue entre deux ordres juridiques : intergouvernemental (les Etats, les traités) et interne (ou constitutionnel : la constitution, les citoyens) correspondant à cette nature duelle de l’Union. En outre, à ces deux ordres correspondent des tâches, des institutions et des procédures propres.

Le TCE était inacceptable parce qu’il introduisait l’anarchie en confondant les pouvoirs des citoyens et ceux des institutions de l’Union, et en mélangeant clauses vraiment constitutionnelles et clauses politiques.

Le compromis jagellonien est un procédé de technique mathématique qui rendra certainement des services plus tard (pas seulement au Conseil des ministres du reste), mais qui pour le moment laisse de côté la plupart des grandes questions concernant le fonctionnement de l’Union européenne et la place des Etats et des citoyens dans l’Union (qui est une association volontaire d’Etats souverains). Pour en apprécier l’efficacité, ce compromis exige d’être recadré dans une analyse institutionnelle complète de l’Union européenne. Je crois d’ailleurs comprendre que c’est bien ainsi que vous envisagez le compromis : un outil mathématique utile pour résoudre des problèmes de représentation.

Une dernière question quand même : est-ce que le « pouvoir de coalition » n’interviendrait pas dans le compromis jagellonien un peu comme la constante d’Einstein dans la théorie de la relativité - pour justifier le résultat recherché ?

JR

Bonjour Jacques,

merci pour cette réponse très instructive. Je pense maintenant que l’on s’est bien compris l’un et l’autre. Ce n’est pas toujours évident de le savoir lorsque l’on discute par écrit.

D’ailleurs, j’avais bien pris votre remarque sur les chercheurs polonais avec humour. :slight_smile:

Concernant votre question sur « ce compromis compliqué », les mathématiques montrent bien qu’il n’est pas équivalent à un vote strictement proportionnel au nombre d’habitants. Et on a un exemple concret (semble-t-il) avec le cas du Luxembourg dans l’ancienne CEE qui n’avait strictement aucune influence sur les décisions prises (pouvoir de vote = 0).

Par ailleurs, tout le monde sait utiliser une calculatrice pour calculer une racine carrée, je ne pense pas que ce compromis soit plus compliqué que les autres :wink:

Si je me fie aux auteurs de l’article, le Traité de Nice a les règles suivantes :

  1. La voix de chaque représentant de pays est pondérée (avec un poids reflétant vaguement la taille de sa population).
  2. Il faut que 72% du poids total soit en sa faveur.
  3. Il faut qu’au moins 13 pays sur les 25 états membres supportent la proposition.
  4. la population de ces 13 pays doit dépasser 62% de la population totale.

Pour le TCE, on a :

  1. Les états membres supportant une proposition doivent représenter plus de 60% de la population de l’Union Européenne.
  2. La majorité des états doivent la supporter (donc 13 états sur 25).

Pour le compromis jagellonien, ce serait :

  1. le poids des états est proportionnel à la racine carrée de leur population
  2. le seuil pour la prise de décision est 62%.

Ceci dit, je comprends votre argumentation sur le présupposé d’un Etat fédéral fait dans l’article. Et sur ce point, vous avez sans doute raison : le compromis jagellonien n’est pas adapté à une organisation confédérale.

Pour le reste, merci encore pour toutes ces informations sur la souveraineté, le projet CIPUNCE… (informations que j’aurais probablement pu trouver par moi-même si j’avais pris le temps de chercher sur le site. Mais j’avoue que je n’ai pas encore beaucoup parcouru ce site très riche).

Et je suis d’accord que ce compromis jagellonien n’est qu’un outil « pour résoudre des problèmes de représentation ». Il ne peut donc pas s’appliquer dans tous les cas de figure. Et ma méconnaissance des institutions européennes ne me permet pas de dire précisément dans quel cas il serait souhaitable de l’utiliser. Je laisserai donc à d’autres le soin de trouver des applications dans le cadre de l’Europe ou dans un autre cadre.

Enfin pour répondre à votre dernière question, que je prends comme un clin d’oeil, je dirais oui et non. :wink:
D’abord, le pouvoir de coalition n’est pas une constante, mais plutôt un concept et il prend une valeur différente pour chaque état. En science comme ailleurs, un concept survit s’il est utile et disparaît lorsqu’il est inutile, obsolète, incohérent… En tout cas, un concept n’est jamais absolu, mais toujours relatif à une théorie et à un contexte dans lequel il s’applique.
Pour ce qui est des constantes physiques (qui ne sont pas toujours constantes d’ailleurs), elles résultent de la confrontation de la théorie avec l’expérience. Einstein a ajouté sa constante pour que sa théorie puisse marcher avec les données expérimentales. Sans cela, sa théorie n’aurait aucune utilité. Même avec cette constante qui ne plaisait à Einstein, la théorie reste cohérente et capable de prédictions (maintes fois vérifiées).
Une théorie, quelle qu’elle soit, doit être cohérente. Et comme je sens que vous avez une certaine méfiance dans les maths, je vais aller dans votre sens : il ne suffit pas de sortir des formules mathématiques pour qu’une théorie soit cohérente. Je pense particulièrement aux statistiques, qui utilisent beaucoup de mathématiques souvent d’un très haut niveau, mais qui de temps à autre produisent des résultats incohérents, voire faux. D’ailleurs, dans le domaine des statistiques, il y a beaucoup d’ajustements trop mal justifiés qui sont faits pour obtenir le résultats attendus. Et c’est bien connu, « on fait dire ce qu’on veut aux statistiques ».
Il semblerait que l’édifice mathématique des statistiques ait de mauvaises fondations et qu’il soit en train d’être remplacé par un autre mieux fondé, plus cohérent dès le départ.
Mais bon, je m’arrête là, je suis déjà bien hors sujet.

Cordialement
Sebastiao.

Les trois formules; la racine carrée

Sebastião (ou faut-il écrire « Sebastiao »?), à propos du 2259.

Votre résumé, pourtant si simple, des trois formules (Nice, TCE, jagellonienne), éclaire ma lanterne : la formule jagellonienne supprime la distorsion du TCE et de Nice résultant de l’ajout au facteur démographique du facteur majorité d’Etats. C’est bien ça ?

Question générale à peu près hors sujet et qui va vous faire rire : cette fameuse racine carrée, qu’on voit si souvent intervenir dans les raisonnements mathématiques comparatifs, est-ce qu’elle est employée empiriquement, ou est-ce qu’elle aurait des propriétés logiques (égalisatrices) intrinsèques ? Je m’exprime mal, mais je vous soupçonne de me comprendre et de pouvoir donner une réponse même à un inculte mathématique comme moi (je ne l’ai pas trouvée dans mes dictionnaires).

Ce que vous dites des incohérences de l’appareil mathématique des statistiques utilisé actuellement me semble particulièrement intéressant.

Amicalement. JR

Bonjour Jacques,

(Oui en principe, c’est Sebastiao avec un tilde sur le a, mais je ne sais même pas l’écrire à l’aide du clavier, et puis vu les problèmes d’accentuation qu’il y a avec les messageries et internet, c’est mieux comme ça.)

Concernant les formules, oui, la formule jagellonienne supprime la distortion du TCE et de Nice. L’article montre même que les deux conditions sont nécessaires pour éviter toute distortion : la loi en racine carrée ET le seuil (en fonction du nombre d’états). La loi en racine seule n’est pas suffisante, mais une règle linéaire (proportionnelle à la taille de la population) comme dans le TCE ou Nice n’est pas égalisatrice non plus et ce quelque soit le seuil (me semble-t-il).

Sur votre question hors sujet, je n’ai pas constaté une si grande fréquence de la racine carrée et cet article m’avait d’ailleurs surpris quand je l’ai découvert (d’ailleurs, ce qui m’a encore plus surpris, c’est que quelque chose de connu depuis les années 50 soit si peu connu). Par contre, on voit souvent la racine apparaître quand on cherche les écarts-types en statistique (déviation moyenne par rapport à la moyenne), mais je n’y vois pas de vertu égalisatrice particulière. Mais j’ai aussi des lacunes en math, je suis plutôt physicien de formation et plutôt informaticien actuellement…

Sur les incohérences des statistiques, je suis en train d’étudier le sujet. En particulier je conseillerais à qui est intéressé de lire (ou survoler) le livre de E.T. Jaynes, dont les 3 premiers chapitres sont faciles à lire. D’un point de vue général, dès qu’on a affaire à des statistiques, il faut bien connaître le contexte dans lequel les chiffres ont été obtenus. Et c’est rarement le cas dans les statistiques que nous donnent les media, ce qui empêche souvent de conclure quoique ce soit.

Amicalement,
Sebastiao.

À qui doivent servir les institutions ?

Merci à vous, Sébastião et Jacques, pour cet échange intéressant.

[bgcolor=#FFFF99]ã[/bgcolor] se tape avec ALT + 0227 (sur le pavé numérique) :wink:

Cher Jacques, quand vous soulignez que les États doivent absolument être pris en compte à égalité dans le décompte des votes pour prendre des décisions communes, vous semblez passer par pertes et profits le fait qu’avantager les États désavantage forcément les citoyens, en l’occurrence (et réciproquement) : la question de savoir [bgcolor=#FFFF99]QUI ON VEUT PROTÉGER[/bgcolor], au bout du compte, prioritairement, n’est pas du tout un détail et mériterait un débat. À qui servent les institutions ? Aux citoyens ou aux États (quand leurs intérêts sont divergents) ?

Je trouve difficile d’accepter qu’on nous présente la prééminence étatique comme inévitable (circulez, y a rien à voir)… Je m’étonne que vous vous soumettiez ainsi à la protection des États sans tenir plus que ça (apparemment) à la protection des citoyens : pour moi, [bgcolor=#CCCCCC]donner la même force à Monaco et à la Chine est une insulte à la dignité humaine[/bgcolor], probablement une invention de chefs d’État, un juridisme étroit et oppressant.

Mais je suis peut-être trop écorché :confused:

Amicalement.

Étienne.

PS : au passage, je prends du champ par rapport à l’élection elle-même (je trouve qu’elle ne tient pas ses promesses d’émancipation) et mes lectures me font progressivement tomber sous le charme du tirage au sort, probablement plus protecteur des individus que tout autre système, égalitaire et incorruptible :
[bgcolor=#9999FF]« Tirage au sort ou élection ? Démocratie ou aristocratie ? Qui est légitime pour faire ce choix de société ? Le peuple lui-même ou ses élus ? »[/bgcolor]
Votre avis m’intéresse au plus haut point, bien sûr.

Le pavé numérique ; Monaco et la Chine

Sebastião et Étienne (vos 2262 et 2263),

Oui, le pavé numérique. Jusqu’à présent je ne mettais pas l’accent aigu sur « Étienne » (alt + 0201), en profitant de l’indulgence coupable qui autorise à s’en passer sur le E majuscule : désormais, je mettrai l’accent partout où il le faut. Ne pas le mettre est une faute d’orthographe, et d’ailleurs, il y a des conséquences pratiques : si vous n’êtes pas gascon, qu’est-ce que vous faites (dites) devant le panneau routier « Baïse-par-devant » en l’absence du tréma ? Plus généralement, je constate que quand je me promène en France j’hésite de plus en plus souvent à prononcer les noms de lieu parce qu’on ne met pas les accents. Merci Étienne d’avoir toujours montré le bon exemple à cet égard.

Monaco/Chine : L’égalité souveraine des États est le fondement du droit international et historiquement le premier moyen de faire plier la force devant le droit. Que Monaco et la Chine aient le même statut à à l’Assemblée générale des Nations Unies ne fait pas problème. Pour tenir compte des disparités démographiques, on a d’autres systèmes.

Prenons l’UE : tant que les citoyens européens n’auront pas décidé de créer un État européen, l’Union sera une association d’États égaux et souverains en droit. Et à l’heure actuelle une grande majorité des citoyens européens sont en faveur de cette Europe des nations (cad des États) plutôt que d’une Europe fédérale, justement parce que l’État joue un rôle protecteur indépendamment de sa taille. JR

Bonjour Étienne et Jacques,

Pour les accents, je refuse d’avoir à me souvenir les codes de chaque lettre accentuée. Notez quand même que j’ai réussi à mettre un accent sur Étienne, ceci grâce au correcteur d’orthographe qui connaissait ce prénom. Le problème, c’est que correcteur est un peu ignare. Il ne connaissait pas jagellonien par exemple.
Quand j’ai commencé à utiliser internet pour la messagerie il y a 10 ans, les différents systèmes étaient tellement incompatibles entre eux qu’il valait mieux tout écrire sans accent pour être mieux compris. Depuis, ça s’est arrangé. Maintenant, j’attends les claviers avec les lettres majuscules accentuées…

Concernant Monaco et la Chine, je suis d’accord avec vous deux. Je pense que cela dépend du type de lois à voter. Si on vote des lois qui concernent les citoyens, comme par exemple définir les limitations de vitesse en Europe, la loi en racine carrée me paraît plus appropriée. Par contre, pour des questions de droit international, les entités concernées sont probablement plutôt les états individuels que les citoyens.

Amicalement,
Sebastiao.

Redistribution des pouvoirs des États au Conseil européen

Bonjour !

Au sujet des critères de population :

Voir l’article de Frédéric Bobay, intitulé « Constitution européenne : redistribution des pouvoirs des États au Conseil européen”, Économie et Prévision, nº 163, 2004/2, notamment les précisions relatives aux données de population figurant en note sous l’annexe II (http://hussonet.free.fr/bobay04.pdf). JR

Bonjour Jacques,

merci pour cette référence intéressante. L’article rejoint les conclusions des auteurs que j’ai cités en début de ce post en ce qui concerne le déséquilibre du pouvoir des états dans le TCE.
J’ai bien lu la note sur les données de population. Et je suis d’accord sur le fait qu’il faut d’abord définir qui fait partie de la population et ensuite il faut avoir une mesure fiable de cette population et aussi une mesure partagée entre tous les états.

J’ai également noté qu’il faut tenir compte de l’évolution temporelle de la population. Ce qui signifie qu’il faut recalculer le poids de chaque état et le seuil de prise de décision régulièrement et pas seulement lorsque de nouveaux pays entrent dans l’Europe.

Je note également que le système jagellonien s’appliquerait plutôt au Parlement qu’au Conseil (p. 111).

Amicalement,
Sebastiao

États vs. citoyens

Bonjour
Je découvre aujourd’hui ce forum et le premier fil que je lis est celui-ci. J’y vois une affirmation qui paraît a-priori de bon sens (avantager les États désavantage forcément les citoyens) mais…
Déjà en 1958 Léopold Kohr soutenait exactement le contraire dans Breakdown of Nations. Donner le même poids à chaque état constitue une pression extrêmement forte exercée sur les plus gros à se décentraliser suffisamment pour adhérer en tant que leurs parties constitutives. Donner le même poids à chaque citoyen constitue une pression extrêmement forte vers la centralisation du pouvoir au niveau le plus haut puisqu’elle minimise la souveraineté des États face à celle de l’Union. Or tout montre que, toutes choses égales par ailleurs, la « démocratie » s’éloigne d’autant plus de la Démocratie que le pouvoir est éloigné des citoyens.

Citoyens ET États

À propos du message de lanredec en date du 20 octobre 2911 :

Depuis 1958, l’Internet a changé fondamentalement la donne.

Cette idée – d’ailleurs très générale – de Léopold Kohr, d’un éloignement des pouvoirs par rapport aux citoyens en raison d’un processus organisationnel progressif fondée sur l’idée (jugée abstraite) d’égalité des citoyens et d’égalité des États se comprenait sans doute à l’époque ; mais de nos jours on dispose des moyens d’organiser une démocratie conciliant les intérêts des citoyens et des États.

D’ailleurs, les États, les confédérations d’États et les fédérations d’États ne sont rien d’autre, dans une société démocratique, que les citoyens organisés. Le seul vrai problème qui se pose est de donner aux citoyens le moyen de contrôler efficacement et en permanence l’exercice du pouvoir par leurs organisations officielles.

Voyez les propositions d’EUROCONSTITUTION.ORG relatives aux modalités possibles de démocratie participative à l’échelle européenne sous

http://www.euroconstitution.org/EUROCONSTITUTION-1-Rév.%207.htm

plus particulièrement les articles 12 à 16 du projet de « constitution européenne confédérale et démocratique ».

Pour ce qui est de la France, les citoyens disposent d’un outil participatif extraordinaire avec la loi de 1901 sur les associations, qui permettrait (au besoin en la modifiant, mais ce ne serait sans doute même pas nécessaire) de créer à tous les niveaux nationaux et locaux des structures citoyennes de contrôle des pouvoirs fonctionnant en toute indépendance par rapport à la structure officielles, dont ils ne devraient évidemment pas faire partie.

C’est essentiellement affaire d’un peu d’imagination, et surtout de volonté politique populaire.

EUROCONSTITUTION.ORG envisage d’ouvrir un débat sur l’éventuelle création d’une association citoyenne de contrôle de l’exercice des pouvoirs à tous les niveaux (y compris européen) et dans tous les domaines (y compris judiciaire).

EUROCONSTITUTION est ouvert à la participation de tous : dès que le projet aura 50 inscrits (19 pour le moment), on passera au stade de la rédaction collective des propositions et à l’élection d’un coordonnateur permanent

JR (coord. prov. d’EUROCONSTITUTION.ORG)

[b]Citoyens ET États[/b]

EUROCONSTITUTION.ORG envisage d’ouvrir un débat sur l’éventuelle création d’une association citoyenne de contrôle de l’exercice des pouvoirs à tous les niveaux (y compris européen) et dans tous les domaines (y compris judiciaire).


Le présent site milite, ce me semble, non plus de l’intérêt, mais sur le moyen de donner cette association les moyens politiques d’exercer démocratiquement ce contrôle.

Je rappelle que l’association fondamentale à qui est dévolue ce rôle existe dans notre Constitution, elle s’appelle le Parlement.

Les moyens de rendre ce contrôle démocratique existent depuis que l’on sait que le calcul des probabilités permet de lui conférer une représentativité OBJECTIVE, la seule que peuvent accepter les démocrates, qui faute de tous y participer voient que ce mode de désignation est le seul qui respecte l’UNIVERSALISME qui est le principe démocratique fondamental.

Internet a simplement permis de lever, de façon encore souterraine, sur l’ INTERDIT relatif à cette discussion qui est évidemment TABOUE.

« Contrôle » citoyen/« surveillance » citoyenne"

L’association 1901 envisagée plus haut aurait sa justification même si l’on arrivait à mettre sur pied un parlement idéal parfaitement représentatif : en effet, la future association n’aurait aucune mission de représentation.

Le parlement, institution officielle parmi d’autres, serait mal placé pour contrôler les autres institutions officielles : et quelle institution officielle pourrait contrôler le parlement ?

La logique veut que l’association envisagée soit non pas une institution officielle mais une institution purement citoyenne, indépendante de tous les organismes constitutionnels. Elle devrait permettre aux citoyens eux-mêmes d’effectuer à tout moment des contrôles et de faire des recommandations à tous les niveaux, territoriaux et fonctionnels.

Elle n’aurait bien entendu aucun pouvoir décisionnel.

Peut-être que le terme « contrôle » est mal choisi et que le mot « surveillance » conviendrait mieux : c’est celui qui sera provisoirement retenu pour ouvrir le débat correspondant sur EUROCONSTITUTION.ORG. JR

[b]"Contrôle" citoyen/"surveillance" citoyenne"[/b]

Le parlement, institution officielle parmi d’autres, serait mal placé pour contrôler les autres institutions officielles : et quelle institution officielle pourrait contrôler le parlement ?

La logique veut que l’association envisagée soit non pas une institution officielle mais une institution purement citoyenne, indépendante de tous les organismes constitutionnels. Elle devrait permettre aux citoyens eux-mêmes d’effectuer à tout moment des contrôles et de faire des recommandations à tous les niveaux, territoriaux et fonctionnels.

Elle n’aurait bien entendu aucun pouvoir décisionnel.


Je suis surpris d’entendre que le parlement ne serait pas une institution « purement » citoyenne, simplement parce qu’il est « officiel ».:confused:

Si l’on tient à contrôler le parlement qui serait représentatif (ce dont je ne suis pas sûr), il suffirait alors de prévoir un référendum périodique.:smiley:

A propos du message Message n°11287
Bonjour Jacques
Vous me permettrez de ne pas voir le rapport entre mon intervention et votre réponse.
Même si je suis (au moins partiellement) d’accord avec ce que vous avancez, mon propos était de montrer que dans le poids qu’on donne au vote des États dans l’Union, rien n’est simple et que l’impression que « un État une voix » favorise les États, ou que « un citoyen une voix » favorise les citoyens est loin d’être aussi évidente qu’il y paraît.
Quand à Internet, je suis loin d’être sûr qu’il rende obsolètes les idées de Kohr : quand quelque chose va mal c’est (autant en 2011 qu’en 1958) que quelque chose est devenu trop gros, et quand quelque chose est suffisamment petit il peut être (autant en 2011 qu’en 1958) aussi foncièrement mauvais qu’on veut ça n’a pas grande importance.